Auteurs : | Moline (Pierre-Louis) |
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Parodie de : | Armide de Quinault et Gluck |
Date: | 6 septembre 1778 |
Représentation : | 6 septembre 1778 Inconnu - Meaux en Brie |
Source : | ms. BnF, NAF 9277 |
Remarques : | |
Représenté pour la fête de l'Arquebuse, par les élèves de la danse de l'Opèra. |
Air : Sans un petit brin d’amour,
Parbleu, je suis charmé de te retrouver ici, mon cher La Valeur, et toi aussi, mon camarade La Victoire.
À la vérité, nous ne devions pas arriver si tôt. Nous avons encore cinq jours pour nous rendre au régiment, et crainte de te manquer, nous venons te chercher trois jours d’avance.
C’est fort bien fait, mais votre précaution est inutile, car je ne partirai point !
Comment ! tu ne peux plus t’en dédire. Nous avons donné notre parole à notre caporal de te ramener avec nous.
Cela n’est pas possible : vous savez que je me suis battu avec un de nos camarades, qui m’a insulté, et que mon capitaine me menace de la prison.
Va, ne crains rien, viens avec nous, et je te réponds de ta liberté.
Non, je me trouve bien ici ! D’ailleurs, j’ai des affaires qui m’engagent à y rester quelque temps.
Est-ce que tu serais devenu amoureux, par hasard ?
Non, pas que je sache, morbleu ! Et cette sottise n’a pas encore troublé mon heureuse indifférence. Je n’ai jamais été amoureux que de la gloire... peut-être qu’avec le temps cela pourra changer, mais, jarnombille, jusqu’à présent...
Air : Je suis un bon soldat
Tu n’as que faire de te vanter ; nous savons que tu es un de nos plus vaillants soldats.
Mais je vois venir ici Madame Terrible, la maîtresse de ce logis. Il est de la bienséance que je l’évite pour le moment. Suivez-moi, mes amis, et allons d’un autre coté.
Il s’éloigne de moi sitôt que je parais devant lui, et il me fuit comme si j’étais une sorcière ou quelque magicienne... Oh ! le perfide !
Qu’avez-vous donc ma cousine ? vous êtes toute rêveuse.
Quel sujet peut vous attrister ?
Hélas !
Vous ne faites que vous plaindre depuis quelques jours ; cependant vous n’avez pas lieu d’être chagrine, car depuis que vous êtes veuve de Monsieur Terrible, on ne voit chez vous que des fêtes, et c’est à qui s’empressera à vous procurer du plaisir.
Hélas !
Air : Chacun à son tour
Eh bien ! mes enfants, tout cela ne saurait toucher mon cœur. Je sais que tous nos jeunes villageois sont épris de mes charmes, mais je ne triomphe [pas – d’un amant que je déteste, et qui se fait une gloire de me voir avec indifférence. Apprenez que je suis amoureuse d’un soldat... C’est la seule conquête qui puisse flatter mon amour propre.
Ah ! ciel ! un soldat, ma cousine ?
Oui, c’est un soldat ! en un mot, c’est Renaud. Vous le connaissez, il est dans l’âge aimable où, sans effort, on aime ; et cependant, le cruel est insensible pour moi !
Air : Folies d’Espagne
Vous l’aimez et vous le haïssez ? quelle bizarrerie ! pour moi, je me déciderais d’un coté ou d’un autre, ou je n’y penserais plus.
Bon, son image me suit partout ! je l’ai encore vu cette nuit en rêvant... ah ! qu’il me paraissait aimable ! je ne peux y penser sans rougir...
Voici le compère Michaut avec toutes les filles et les garçons du village. Qu’est-ce que cela veut dire ? ils viennent tous en dansant !
Air :
Eh bien ! qu’est-ce donc, mon cher oncle ? d’où vous vient cette gaîté ? vous mettez tout le monde en train aujourd’hui ! quel en est le sujet ?
C’est demain votre fête, ma nièce, et je viens vous présenter ce bouquet. Vous me permettez ?
Vous êtes bien galant pour votre âge !
Oh ! dame. Le petit divertissement que je vous donne est sans cérémonie. Tout ce qui me fâche c’est qu’aujourd’hui je ne puis plus conduire le branle comme autrefois.
Vous avez raison, cela fait pitié, et les temps sont bien changés !
Mais, à propos de changement, n’avez-vous pas envie de vous remarier ? Savez-vous qu’il est ridicule à votre âge de rester veuve, et, d’honneur, cela m’afflige beaucoup ! Mariez-vous bien vite si vous voulez que je meure content.
Cela ne presse point !
J’ai entendu parler d’un certain Renaud qui est la terreur de ce canton. C’est un brave soldat, d’une famille honnête, et, je crois, qui pourrait vous convenir.
Que me dites-vous là ? sachez que c’est le plus grand de mes ennemis, et si jamais quelqu’un pouvait lui donner sur les oreilles, celui-là serait digne de moi !
Eh ! la, la... ma nièce, ne vous emportez point ! En attendant que cela arrive, réjouissons-nous d’avance, et célébrons votre fête.
Mais qui vient ici nous troubler ? quoi, c’est toi, La Sonde ?
Ah ! madame, tout votre cabaret est dans le plus grand désordre ! ouf ! je n’en puis plus !
Air : Trembleurs
Ah ! le pauvre garçon.
Quel est donc ce soldat ? raconte-moi vite tout ce qu’il vient de se passer.
Je vais, Madame, vous en faire un fidèle récit. Je conduisais vos dindons dans la basse-cour, lorsque deux hommes ont pris querelle en buvant (c’était un rat de cave et un muletier). Je m’avance pour les mettre d’accord, mais aussitôt l’un d’eux jette une bouteille à la tête de l’autre, et cette bouteille va frapper la tête d’un jeune soldat qui passait devant nous. Au même instant ce guerrier plein de courage s’élance sur nous comme un furieux, et se saisissant d’un bâton, nous rosse sans miséricorde. Nous appelons au secours et voilà déjà plus de cinquante personnes qui se battent contre ce guerrier, mais c’est en vain qu’ils veulent résister à sa valeur. Ce seul guerrier, Madame, dans un clin d’œil les met tous en capilotade. Enfin, ils prennent la fuite avec les dindons épouvantés, les autres entrent sans vie sur le champ de bataille, et moi, fort heureusement, je me suis échappé de ce combat avec un œil emporté et une jambe fracassée.
Il n’y a que Renaud dans le monde capable d’une pareille action.
Vous l’avez deviné, Madame, c’est ainsi qu’on nomme ce guerrier.
Va, mon pauvre La Sonde, console-toi, tu n’en mourras pas pour cette fois-ci, et j’aurai soin de toi. Attends avec patience le dénouement. À ses cousines. Allez, vous autres, le faire reposer dans cette cabane jusqu’à nouvel ordre.
Oui, Madame, il est de votre honneur de punir ce soldat de sa témérité.
Allons le chercher partout, il me paiera cher tout le dégât qu’il vient de me faire.
Air : À coups d’pieds, à coups d’poings
Et ceci est un peu trop fort, je ne suis pas femme à me laisser manquer, et je le poursuivrai jusqu’au trépas...
Eh bien ! ma nièce, suivez-moi, et si je ne vous venge pas tout à l’heure...
Mais je ne te conçois point, mon ami ! Que diable viens-tu chercher encore ici, après le désastre que tu as fait dans ce logis ? Si la maîtresse te rencontre, tu auras beaucoup de peine à t’échapper de ses mains, et tu paieras les pots cassés. D’ailleurs, il y a à craindre pour toi que les charmes de ses beaux yeux ne te fassent oublier tout ce que tu dois à la gloire.
Va, ne crains rien, il lui sera malaisé de me prendre dans ses filets, ni d’une façon, ni d’une autre.
On dit, cependant, qu’elle a plusieurs sortilèges pour se faire aimer malgré qu’on en ait point envie ; et elle a encore le secret de vous rendre amoureux par enchantement.
Par enchantement ? ah ! ah ! ah ! le secret est curieux, cela doit faire un amour bien intéressant.
N’importe, je t’en avertis ! prends-y garde, et méfie-toi de cette cabaretière. Elle est plus dangereuse que tu ne penses.
Air : Plus inconstant que l’onde est le nuage
Air : Va t’en voir s’ils viennent
Je ne sais pas ce que j’ai, mais le vin que nous avons bu ce matin m’a un peu troublé la tête, et je meurs d’envie de dormir.
Eh bien ! repose-toi ici ! Adieu camarade, nous viendrons te chercher sur la brune.
Ma foi, on a beau dire, cet endroit-ci me parait admirable pour y dormir à son aise. Quelle tranquillité !
Air : Dans le fond d’une écurie
Mais je commence à bailler. Allons, en arrive ce qu’il pourra, il faut que je sommeille. Bonsoir la compagnie !
Enfin, le voilà endormi comme je le désirais. Aux villageois. Venez ici, vous autres, et divertissez-vous à présent tant qu’il vous plaira. Je vous préviens que Renaud a le sommeil fort dur, et quelque tapage que vous fassiez, ne craignez point qu’il s’éveille. Je vais chercher un instrument dont j’ai besoin, et je lui prépare un réveil qui ne l’amusera pas. En attendant, dansez autour de lui, et chantez comme des aveugles, et criez comme des sourds.
C’en est assez, éloignez-vous, et laissez-moi seule. Ils sortent. Enfin, il est en ma puissance ! Je le tiens, pour le coup, et il ne m’échappera plus... son sommeil favorise ma vengeance...puisqu’il méprise mon amour, soyons impitoyable... mais que dis-je ? c’est lui qui a mis en fuite tous mes dindons, il faut que je le tue.
Air : Dérouillons, ma commère
Frappons, achevons... il est cependant bien aimable, bien gentil, et, ma foi, ce serait grand dommage de le tuer ; non, je n’en ai pas le courage, et le couteau m’échappe des mains.
Air : C’est bien doux, Rosette est jeune
Que j’ai de plaisir à le voir ! et qu’il a bonne grâce à dormir ! On croirait que ce jeune guerrier est né seulement pour faire la guerre. Eh bien, on se trompe, il est encore fait pour l’amour ! Il faut cependant que je l’enchante pour le mettre à l’épreuve, et quand il sera bien amoureux de moi, je tâcherai de le haïr à mon tour... c’est une pensée admirable... car après tout, quand j’évoquerais ici, ou ailleurs, toutes les furies des Enfers, la Rage, la Haine et toute sa suite, ce qui fournirait à plus d’un auteur un acte d’opéra, tout cela ne saurait m’inspirer une meilleure vengeance pour punir un amant qui méprise mes charmes... Mais il ne s’éveille point, aurait-il envie de dormir d’ici à demain ?
Air : Réveillez-vous, belle endormie
Allons, il n’y a pas moyen de le réveiller ! Aux villageois. Accourez ici, vous autres, et venez seconder mes désirs amoureux. Transportez ce guerrier dans le fond du cabaret, et surtout ayez soin de le porter bien légèrement, et transformez-vous en zéphires, s’il est possible, afin de ne point troubler son repos.
Eh ! non, jour de Dieu, il n’y a pas de temps à perdre, te dis-je ! Suis-moi ! Je ne souffrirai pas, morbleu, que notre camarade Renaud s’amuse ici plus longtemps à la bagatelle. Il faut qu’il marche avec nous. Notre parole est donnée et nous le conduirons à notre caporal, mort ou vif ! Voilà d’abord son fusil que je lui apporte.
Et moi, son sabre de bataille.
Air : Joconde
Va, je n’aurai pas grand peine à me faire cette violence. On n’aime jamais qu’une fois dans sa vie, et depuis que j’ai perdu ma chère Rosette, j’ai renoncé à tout autre engagement.
C’est tout comme moi, car tu n’ignores point l’amour que j’ai eu pour la petite Lise. Lorsqu’elle retourna à son village, je pensais en perdre la tête. Enfin, n’importe ! La gloire me console de son absence. Mais il n’en serait pas de même de notre camarade Renaud. Il n’a jamais été amoureux, lui, il est encore tout neuf sur cet article, et les premières passions sont les plus dangereuses pour un jeune homme qui entre dans le monde.
Madame Terrible aura beau faire, toutes ses finesses sont cousues avec du fil blanc, et nous enlèverons Renaud malgré elle.
Il faut tenir ferme, mon cher La Valeur, et si, pour nous amadouer, elle venait à nous offrir à boire, il faut la refuser sans miséricorde.
J’en demeure d’accord.
Air : Palsangué, Monsieur l’curé
Quand Renaud jettera les yeux sur son fusil, il rougira de sa faiblesse.
Quand il verra briller son sabre, il sera transporté de joie.
Air : Où allez-vous, Monsieur l’abbé
Morbleu, la belle chose que la gloire... Quand on est devant l’ennemi... À grand coups de sabre, ha ! Il remet le sabre. Malgré tout cela, je trouve que l’Amour a bien aussi son mérite, et il ne le cède en rien à la guerre. Par exemple, quand on est auprès d’un minois qui vous enchante... ah ! camarade ! un siècle de gloire ne vaut pas un moment de plaisir !
Allons, viens avec moi, et laisse-là tes fades comparaisons !
Il n’y a rien qui nous presse. Attends, j’ai encore quelque chose à te dire...
Eh bien ! dépêche-toi !
Voilà les deux camarades de Renaud ! Ils viennent le chercher. Allez au devant d’eux, et empêchez-les d’entrer au logis.
C’est mon cher La Valeur ! Allez, soyez tranquille, je vais bien jouer mon rôle.
C’est trop nous amuser ! Allons chercher Renaud.
Parbleu, voilà qui est ravissant ! Ma foi, vive la gaîté ! Allons mes enfants, divertissez-vous ! Il me semble que je suis à une noce.
Eh ! qu’ils dansent tant qu’ils voudrons, retirons-nous !
Quoi donc, Monsieur le soldat ? Vous voulez déjà nous quitter ? Est-ce que les jeunes filles vous font peur ?
Oh, laissez-moi !
Comme vous êtes fier !
Attends un moment, camarade, elle a un son de voix qui m’intéresse, et je voudrais voir sa figure.
Votre ami est plus raisonnable que vous, et je lui conseille de rester avec nous.
Air : Adieux paniers, [vendanges sont faites]
Ciel ! que vois-je ! c’est toi, ma chère Rosette !
Eh oui, mon cher La Valeur ! C’est moi même, et toujours aussi fidèle pour toi qu’il est possible de l’être dans un cabaret.
Ah ! quelle heureuse rencontre !
Air : Nanon dormait
Mais dis-moi donc, par quel hasard je te trouve ici ?
La chose est fort simple. Madame Terrible est ma cousine, et à présent je demeure chez elle. Le reste serait trop long à te raconter, c’est pourquoi, devine si tu peux !
Voici un récit un peu laconique, et je n’ai pas le don de deviner. Mais enfin, ma chère Rosette, tu m’aimes donc toujours malgré les rigueurs de l’absence ?
Ah, si je t’aime !
Air : J’aime une ingrate beauté
Parbleu, je joue-là un plaisant personnage.
Ils ne finiront point... Haut. Eh bien ! Veux-tu venir, ou ne veux-tu point ?
Eh ! laisse-moi lui parler encore un instant.
Comme il est opiniâtre dans ses amours ! Mais je ne vois qu’un seul moyen pour les séparer. Voici de quoi les faire disparaître aussi adroitement qu’à l’Opéra.
Ahi ! ahi !
Ah ! mon ami, qu’as-tu fait ?
Un beau coup de théâtre.
Air : Folies d’Espagne
Entrons dans le cabaret, et profitons des conseils que notre caporal nous a donnés.
Peut-être que je la trouverai sur mes pas... Haut. Je te suis sans balancer.
Air : Comme v’la qu’est fait
Quoi ! C’est vous, charmante Lise ?
Eh ! C’est vous cher amant ? C’est vous que je revois ?
Ah ! Je n’ose en croire mes yeux ! Mais par quel heureux destin...
Tenez, mon cher La Victoire, pour vous abréger un ennuyeux récit : je suis la sœur aînée de Rosette, et notre aventure est la même, mais je vous retrouve ici sans le secours d’une magique puissance, et mon cœur est satisfait.
Chère Lise, quel bonheur !
Air : Aimons toujours notre berger,
Ah ! ah ! ah ! Voilà mon rôle doublé à merveille, et je crois que la copie l’emporte encore sur l’original.
Air : Nanon dormait
Allons, suis-moi, morbleu ! C’est trop nous arrêter !
Eh bien, camarade ! Va-t-en si tu veux, et ne te gène pas pour moi. Je veux réparer auprès de Lise le temps que j’ai perdu sans la voir.
En voici bien une autre... Attends, attends, je vais te rendre l’échange de la bonne façon.
Eh ! Messieurs de grâce, laissez-moi tranquille ! Je n’ai que faire de vous pour m’habiller !
Air : La Polonaise, contredanse
Enfin, me voilà débarrassé de ces maroufles ! Mais avec tout cela, quand je songe à ma position, je la trouve plaisante et des plus singulières. Un guerrier comme moi, être vêtu de la sorte ! Eh ! que ne fait-on pas pour l’amour ? Hercule a [filé] pour Omphale, et je peux me parer pour plaire à ma charmante maîtresse. Cependant, je ne conçois rien à l’amour extrême que Madame Terrible m’a inspiré. C’est une énigme pour moi comme pour bien d’autres : il faut qu’elle m’ait ensorcelé pendant je dormais.
Air : Vogue la galère
Ne vous impatientez point mon cher Renaud, mon toutou, mon bijou, mon petit chou. Je ne vous quitte que pour un instant, je vais bientôt revenir.
Madame Terrible, vous m’allez quitter ?
Un moment. Il faut que je descende au fond de mon caveau pour une affaire très importante. Il faut que je fasse rincer mes bouteilles.
Air : Réveillez-vous, [belle endormie]
Il en tient un peu à ce que je crois. Mais je veux encore l’éprouver tout à fait...Haut. Adieu, Renaud.
Madame Terrible, vous m’allez quitter ?
Vous ignorez l’inquiétude cruelle qui me dévore. Apprenez que je suis jalouse de cette gloire que vous chérissiez tant avant que de m’aimer. C’est une rivale fort dangereuse, et je crains toujours qu’elle ne m’enlève votre cœur.
Rassurez-vous, belle princesse !
Air : À chacun son tour
Cet aveu sincère me transporte de plaisir ! Eh bien, je ne vous quitterai plus, et je veux que dès ce jour vous quittiez bravement le service en attendant que je vous achète une charge d’oisif.
Air : La Magnotte
Je perdrais plutôt le jour.
Non, mon ami, ne perdez ni le jour, ni la nuit. Ne vous désolez pas d’avance. Adieu, je vais apprendre mon bonheur à mon cher oncle.
Eh ! que diable, vous dites toujours la même chanson !
Monsieur, n’en soyez pas étonné, c’est tout comme à l’Opéra afin de vous donner du plaisir !
Je vous en dispense. Quand votre maîtresse n’est point ici, rien ne peut m’amuser.
Eh bien ! Dansez avec nous, cela dissipera votre mélancolie !
Non ! éloignez-vous de moi !
Le voici, profitons de ce moment.
Ciel !que vois-je ? quel éclat frappe mes yeux ?
Je t’apporte ton fusil.
Et moi ton sabre.
Ah ! mes braves camarades ! que je suis honteux de paraître ici devant vous !
Notre caporal te rappelle.
Et notre capitaine te pardonne.
Il me pardonne ! Eh bien, mes amis, je pars avec vous, et rien ne peut me retenir ! Quittons ces frivoles ornements, et reprenons notre habit militaire, c’est celui qui me convient le mieux.
Allons, ne restons pas ici plus longtemps !
C’en est fait, je vous suis.
Ah, ma cousine ! Accourez vite ! Voilà Renaud qui va partir !
Ah ! Ciel ! arrêtez-vous ! est-il vrai ? ... Renaud ! Non ! Je crois que c’est pour plaisanter. \’ Ecoutez-moi, parlez ! Je veux savoir de votre bouche si vous partez ou non... mais... je suis prête à m’évanouir, approchez-moi une chaise... Eh bien ! Renaud, expliquez-vous, et ne me déguisez rien. Allez-vous partir pour tout de bon, ou est-ce pour rire ?
Je pars.
Je meurs.
Adieu. Il s’arrête. Cependant, elle me fait pitié et je sens que je l’aime plus que je ne le pensais... mais n’importe, il faut partir.
Quelle cruauté !
Quelle ingratitude !
Il est parti ! ... Il est parti ! ... Ah, le perfide Renaud ! Il me fuit... il me laisse mourante et au désespoir... D’un ton modéré. Mais cela suffit... Il me vient un projet éclatant... Oui, m’y voilà bien décidée... Ma maison, mes meubles et tout le cabaret paieront pour son ingratitude.
Air : Dérouillons, ma commère
Commençons d’abord par cette cabane.
Ahi ! ahi ! ahi ! au feu ! au secours !
Comment ? c’est toi qui était là ?
Eh ! oui, de par tous les diables ! Vous le saviez bien !
Ah ! Mon pauvre La Sonde, pardonne ma fureur. Tu vois les funestes effets de l’amour et du désespoir !
Et contre qui en avez-vous pour mettre le feu à la maison ?
Le perfide Renaud m’a abandonné !
Non, Madame, me voici encore.
Quoi ! C’est vous ? Ah ! Je vous croyais bien loin.
L’excès de votre amour a touché mon cœur. Vous me voyez prêt à vous épouser avant d’aller rejoindre nos drapeaux. Mais c’est à condition que vous consentiez au mariage de vos deux cousines avec mes deux camarades. Je crois que cette catastrophe sera plus heureuse qu’un incendie.
Mais, ils se connaissent donc ?
Sans doute ils se connaissent, et ce n’est pas d’aujourd’hui. On vous contera tout cela. Il s’agit à présent de faire leur bonheur.
Eh ! Je ne demande pas mieux. Je suis trop glorieuse de m’allier avec des militaires. Ils sont tous braves comme leurs épées. Je n’ai plus rien à désirer étant l’épouse de Renaud. Allons nous réjouir en attendant, et célébrons ici ce triple mariage.
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