Pétrine

Auteurs : Favart (Charles-Simon)
Parodie de : Proserpine de Quinault et Lully
Date: 13 janvier 1759
Représentation : 13 janvier 1759 Comédie-Italienne - Hôtel de Bourgogne
Source : Théâtre de M. Favart, Paris, Duchesne, 1763, t. IV
Charles-Simon Favart

Pétrine


Parodie de Proserpine
Représentée par les Comédiens Italiens Ordinaires du Roi
le 13 janvier 1759
Œuvres Complètes de Favart, Paris, Duchesne, 1759
definitacteur, mademoiselle l’écluse lecluse
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definitacteur, chœur de garçons et filles chœurdegarconsetfilles

Acteurs


Madame Painfrais, fermière : Monsieur Chanville
Pétrine, sa fille : Madame Favart
L’Écluse : Mademoiselle Desglands
Flammeron, maître de forges : Monsieur Rochard
Robinette, servante de ferme : Mademoiselle Susette
Canichon, maître Pêcheux : Monsieur Marignan
Bonaventure, messager : Monsieur Desbrosses
Mathurin, valet de ferme
Filles et garçons de fermes
Forgerons
Bucherons et bucheronnes

Pétrine


Scène i

Le théâtre représente la ferme de Madame Painfrais Madame Painfrais, Bonaventure

madame painfrais

Air : C’est mademoiselle Manon

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Informations sur cet air

Eh ! Quoi, je vois ici monsieur Bonaventure,
La fleur des messagers et le courrier banal ?
Pour moi votre présence est d’un charmant augure.
bonaventure
Je viens ici d’la part du procureux fiscal.
madame painfrais
Se souvient-il donc
Que de son cœur il m’a fait le don ?
bonaventure
Ma foi, s’il s’en souvient, il ne s’en souvient guère.
Il s’agit commère...
madame painfrais
De quoi ? Parlez, dépêchez.
bonaventure
De conduire du grain dans les marchés.
Marchez.

Il vous ordonne de partir à l’instant.


madame painfrais

Comment, il m’ordonne ! Dites donc qu’il me prie.


bonaventure

Tout comme il vous plaira.


madame painfrais

Ah ! Je vois bien qu’il ne m’estime plus.


bonaventure

Pardonnez-moi, il vous regarde comme la perle des fermières, des meunières et des boulangères. En vertu de ça, il veut vous donner de nouvelles pratiques.


madame painfrais

Ah ! Je ne me soucie plus de rien depuis que j’ai perdu la sienne, il me faisait jadis l’honneur de se fournir chez moi.


Air : Et dans ç’coin-là, et, et dans ç’coin-ci


S’il savait aimer constamment,
Qu’il serait charmant !
Qu’il serait charmant !
J’inspirais dans mes jeunes ans
Ses transports ardents,
C’était le bon temps.
Et, et dans ç’coin-là,
Et, et dans ç’coin-là,
Il me suivait toujours,
Et n’avait souci que d’nos amours,
Et, et dans ç’coin-là,
Et, et dans ç’coin-ci,
À mille petites jeux,
Nous jouions tous deux. Ô temps heureux !
bonaventure

Eh ! Que diable, Madame Painfrais, n’êtes-vous pas en âge de raison ? Vous voulez qu’un procureur fiscal chargé d’affaires, qui a femme et enfants, s’amuse encore à vous conter fleurette ?


madame painfrais

Pourquoi pas ?


bonaventure

Air : Vous n’êtes pas égaux en égaux


Songez qu’il a tout le village,
Et la maison à gouverner.
madame painfrais
Il eut toujours autant d’ouvrage,
Que venez-vous me lanterner ?
N’avait-il pas, sans se gêner,
Dans son âge,
Du temps de reste à me donner,
À me donner,
À me donner ?
bonaventure

Air : Rli, rlan


Il faut qu’il ait de la réserve,
Il doit penser en homme mûr,
Il a sa femme qui l’observe,
De la tromper il n’est pas sûr.
madame painfrais
N’est-il pas maître de sa femme ?
Le conduit-on comme un enfant ?
Rli, rlan, rli, rlan,
Je mènerais la bonne dame
Rlan tanplan, tambour battant.
bonaventure

Peste ! Comme vous allez ! Mais encore une fois, laissez-là cet amour antique dont vous m’entretenez mal à propos. Allons au fait, exécutez ce que monsieur Criniser, le procureur fiscal, vous commande.


madame painfrais

Eh ! Bien ! Dites-lui que je pars dans la minute, et qu’il n’y a rien que je ne fasse pour lui plaire.


bonaventure, en sortant

Soit. Bon voyage. La folle !


madame painfrais

L’impertinent !


Scène ii

Madame Painfrais, Mademoiselle L’Écluse

madame painfrais

Ah ! Voici Mademoiselle L’Écluse ! Venez ça, gentille batelière, je suis obligée d’aller à la ville, je laisse ici ma chère fille Pétrine, vous aurez l’œil sur elle.


lecluse

Et qui est-ce qui aura l’œil sur moi ? Tenez, ma commère, emmenez-moi avec vous : je cours ici trop de risque.


madame painfrais

Comment ?


lecluse

Vous connaissez bien monsieur Canichon, le maître Pêcheux.


madame painfrais

Eh bien ?


lecluse

Il est venu me trouver dans ce village. Il m’aime et je veux le fuir.


madame painfrais

Air : Ne v’là-t-il pas que j’aime


Fuir à votre âge un amoureux ?
Bon ! Bon ! Vous voulez rire.
lecluse
Commère, il est trop ennuyeux.
madame painfrais
Oh ! Je n’ai plus rien à dire.
lecluse

Air : Partez d’abord


Mon cœur insensible,
Pour fuir cet amant
A fait l’impossible,
Mais c’est vainement.
Dès que l’on sort,
Il part d’abord
Avec audace,
Plus on le fuit,
Plus il poursuit,
Sans s’arrêter,
Et je suis bien lasse...
madame painfrais
De lui résister.
lecluse

Air : Tout roule aujourd’hui dans le monde


De Boulogne à la Grenouillère,
De la Grenouillère à Saint Cloud,
Sur la terre et sur la rivière,
Enfin je l’ai trouvé partout.
madame painfrais
Eh ! Mais, mais, c’est pis qu’une rage.
lecluse
Pour fuir ses ennuyeux propos,
Je me suis jetée à la nage,
Il m’a suivie entre deux eaux.

Enfin j’ai été chercher un asile jusques dans la sombre demeure de monsieur Flamron, l’entrepreneur des forges. Eh bien ! Est-ce que le galant Canichon n’est pas encore venu m’y trouver !


madame painfrais

Air : La nuit, quand j’pense à Jeannette


Mais c’est être bien cruelle,
Quoi ! Toujours fuir un amant !
Vous voulez être un modèle.
lecluse
Je crains un engagement.
madame painfrais
Là, parlez-nous sans finesse,
Lorsque de la sorte on fuit,
On annonce sa faiblesse
À l’amant qui nous poursuit.
lecluse

Ah ! Il est vrai, ma commère, que je suis faible et monsieur Canichon plus dangereux qu’on ne pense. Sitôt qu’il me parle, il m’endort, et vous savez qu’une fille ne peut plus répondre de sa vertu lorsqu’elle est endormie.


madame painfrais

En ce cas, je vous conseille de ne le voir qu’en particulier, il n’est pas nécessaire qu’il endorme aussi le public. Vous pourrez le recevoir chez moi, disposez de ma maison.


lecluse

Que dites-vous donc, ma commère ?


madame painfrais

Et ! Là, là, ne faites plus l’hypocrite.


Il faut se laisser enflammer
Quand on est en âge d’aimer.
Plus l’âge, plus l’âge s’accumule,
Plus le cœur dissimule,
Et qui lirait dans nos secrets
Y trouverait bien des regrets.
Il etc.

Même air


Ayez soin de ma fille,
Elle est simple et gentille,
Accompagnez partout ses pas
Mais chut, ne lui redites pas
Qu’il faut se laisser enflammer
Quand on est en âge d’aimer.

Adieu, je vais annoncer mon départ à Pétrine.


Scène iii

Mademoiselle L’Écluse seule

lecluse

Madame Painfrais est singulière, elle me conseille d’écouter un amant et me donne sa fille à garder, cela ne s’accorde pas. Oh ! Je suis sa servante, j’ai trop de peine à me garde moi-même.


Air : Ziste, zeste et zon, zon, zon


Que c’est un suplice bien rude
De résister à ses désirs !
Aimer et blâmer ses plaisirs,
C’est un métier de prude.
Ah ! Voilà déjà Canichon !
Fuirai-je encor ? Mais si je reste,
Ziste, zeste,
Zon, zon, zon,
J’ai plus d’amour que de raison.

Scène iv

Canichon, Mademoiselle L’Écluse

lecluse
Me suivrez-vous toujours ?
canichon
Me suivrez-vous toujours ?
ensemble, ensemble
Toujours, toujours,
canichon
Mais queux discours !
Vous m’traitez comme un ours,
Quand on vous adore !
lecluse
Moi ! Je vous adore !
ensemble, ensemble
Me fuirez-vous toujours
Toujours, toujours,
Me fuirez-vous
deuxcol,
lecluse
Oui toujours.
canichon
Quoi ! Toujours !
canichon

Air : Va, va, Fanchon


Si c’est com’ça, Mam’selle, je me r’tire,
J’n’aurons pu rien ensemble à démêler.
Ç’que j’vous dis-là, c’est pour ne plus vous l’dire,
J’vous parle ici, pour ne vous plus parler.
lecluse

Air : Mon p’tit cœur


Ce discours m’étonne fort.
canichon
J’vous aimais et c’là qu’ça s’passe.
Oui, j’allons r’virer de bord,
Mon cœur était dans la nasse,
Les filets en sont rompus.
lecluse
Canichon !
canichon
Tout ça me lasse,
V’là trop de moments perdus.
lecluse
Hélas ! Vous n’m’aimez plus.
canichon

Non morgué, et j’allons aimer Pétrine, il y a du pain à manger avec elle, il n’y a que de l’iau à boire avec vous.


lecluse

Air : Ma Fanchon, ne pleurez pas


Mais, tu n’y gagneras rien.
canichon
Eh ! bien, rendez nous service,
Vous parlerez pour moi.
lecluse
Fort bien,
Moi, me charger d’un tel office !
canichon
Vous vous déf’rez d’un ennuyeux.
lecluse
Je sais un moyen qui vaut mieux.bis

Air : Marions, marions-nous


Tu me suivais malgré moi
Aux bois, aux champs, à la ville,
Pour me défaire de toi,
Il est un secret facile :
Marions, marions, marions-nous,
Tu me laisseras tranquille,
Marions, marions, marions-nous,
On se quitte étant époux.
canichon

Eh ! Sarpejeu, v’là qui s’appelle parler en brave fille.


mademoiselle l’écluse et canichon, ensemble

Air : Ah ! Si t’en tat’, si t’en gout’, si t’en as


Duo
Ne cherchons plus d’inutiles détours,
Nous faisons bien d’abréger nos amours,
Nous ennuierions par de plus longs discours,
Pour être heureux, les amants de nos jours
Prennent toujours
Les chemins les plus courts.

Scène v

Pétrine, Mademoiselle L’’Ecluse, Canichon

pétrine

Air : Hélas ! Tu t’en vas


Maman s’en va donc ?
Et sans qu’elle m’emmène,
Ça m’fait de la peine.
Maman s’en va donc ?
Et m’laisse à la maison.


Mais c’est... c’est, dit-on,
Que l’air de la ville
N’est pas... n’est pas bon
Pour fille nubile.


Maman s’en va donc etc.
Que ferai-je sans elle ?
Quelle absence cruelle !
lecluse
Nous vous consolerons.
pétrine
Que ferai-je sans elle ?
lecluse
Comptez sur notre zèle.
canichon
Nous vous amuserons.
pétrine
Maman s’en va donc etc.
lecluse

Allez, allez, ne craignez rien, j’aurai soin de vous, moi. Que vous êtes simple ! Il y a tant de filles qui se réjouissent de l’absence de leurs mères, mais voici la vôtre : chantons, pour lui marquer combien son départ nous afflige.


mademoiselle l’écluse, canichon, pétrine, ensemble

Air : Le cul dans une hotte


Ma mère, entendez les cris
Commère, entendez les cris
De nos cœurs attendris,
Vous vous en allez à Paris
Assise dans une hotte,
Adieu, jeux et ris,
L’ennui sera notre hôte.

Scène vi

Pétrine, Mademoiselle L’Écluse, Canichon, Madame Painfrais dans sa charrette suivie des Valets et Servantes

madame painfrais
Ahi, ahi, dia, hu.
Quand j’aurai vendu
Mon grain, ma farine,
Je reviendrai, Pétrine,
Tout aussitôt
Dia, huriau,
Soyez bien sage,
Petite fille,
Lorsqu’à votre âge
L’on trotte et babille,
On pleure un temps perdu,
Et souvent la vertu
Ahi, dia, hu.

Air : Adieu donc, Dame Françoise

Voir la partition
Informations sur cet air

chœur
Adieu donc, notre bourgeoise,
Allez vendre votre grain.
lecluse
Quand on s’attarde en chemin,
Souvent quelqu’un cherche noise,
Revenez plutôt demain,
Revenez plutôt demain.
chœur
Adieu donc, notre bourgeoise,
Allez vendre votre grain.
Madame Painfrais sort.

Scène vii

Canichon, Pétrine, Mademoiselle L’Écluse, Valets et servantes de Madame Painfrais

canichon

Air : Par ma foi, l’eau m’en vient à la bouche


Puisqu’ici n’est plus notre maîtresse,
Dansons tous et réjouissons-nous.
chœur
Puisqu’ici n’est plus notre maîtresse,
Dansons tous et réjouissons-nous.
lecluse
Profitez du temps qu’elle vous laisse,
Aujourd’hui c’est campo pour vous.
canichon
Allons gai, faisons carillon
À faire trembler la maison.
chœur
Puisqu’ici etc.
Les Valets et Servantes de la ferme dressent une table, apportent des brocs de vin et de quoi manger. On danse, la maison tremble, la table tombe.
pétrine

Air : Quand je bois du vin clairet


Arrêtez, arrêtez-vous,
Tout tremble,
La maison tombe sur nous,
Sauvons-nous, sauvons-nous tous.

Scène 8

Mademoiselle L’Écluse, Canichon
lecluse

Il faut avouer qu’on a fait faire à madame Painfrais un voyage bien profitable.


canichon

Sarpejeu, elle trouvera de la besogne bien faite à son retour. Mais que vois-je ? C’est monsieur Flamron, l’entrepreneur des forges.


Scène ix

Mademoiselle L’Écluse, Canichon, Flamron

flamron

Air : Belle brune que j’adore


Moi qui fus toujours si sage,
J’ai trouvé, pour mon malheur,
Une fille de village
Qui m’a dérobé mon cœur.bis


Tout d’abord qu’on l’envisage,
On se sent comme un trison,
Si mon cœur est son partage,
Le sien m’en fera raison.bis

Air : Bonjour, Mamsel’ Javotte


Bonjour, Mamsel’ L’Écluse.
lecluse
Bonjour, Monsieur Flamron.
flamron
Permettez que j’en use
Avec vous sans façon :
Ah ! S’il vous plaît,
Faites-moi voir Pétrine,
Chacun me dit que c’est
Une beauté divine.
lecluse

Air : La rareté


De la jeune Pétrine, il est vrai que l’on vante
La beauté
À peine elle a quinze ans, mais c’est une innocente.
flamron
La rareté !
Innocente à quinze ans ! Ah ! Ton récit augmente
Ma curiosité.
lecluse

Air : Amis, sans regretter Paris

Voir la partition
Informations sur cet air

Ne comptez plus sur mon appui,
Je suis sa gouvernante.
canichon
Plus d’une bonne est aujourd’hui
D’humeur plus complaisante.
lecluse

Pétrine évite avec soin les messieurs les mieux frisés, les mieux poudrés, jugez combien un forgeron lui paraitrait étrange.


flamron

Air : Un mouvement de curiosité


Fais-la moi voir, hélas ! je t’en conjure.
lecluse
Non, je ferais une infidélité.
flamron
Obéis-moi.
lecluse
Ce ton poli me rassure,
Et mon devoir cède à votre volonté.
Promettez-vous...
flamron
Ce n’est, je te le jure,
Qu’un mouvement de curiosité.

Air : Pan, pan, pan

Voir la partition
Informations sur cet air

Amène-moi promptement
Cette fille
Si gentille.
lecluse
Il faut agir prudemment.
flamron
Amène-la promptement.
lecluse
Cachez-vous tout doucement
Sous cette épaisse charmille.
flamron
Que je la voie un moment,
Il ne m’importe comment.

Scène x

Flamron, Canichon

flamron
Et toi, reste en attendant.
Pour Pétrine mon cœur grille,
Et toi, reste en attendant,
Je te prends pour confident.
canichon

Eh bien, voyons, je gage que vous êtes amoureux de Pétrine.


flamron

Tu l’as deviné.


canichon

Contez-nous donc ça.


flamron
Je viens de voir par sa fenêtre
Ce cher tendron,
Et dans l’instant j’ai senti naître
Un doux frisson.
En petit cotillon de laine
Elle blutait,
On l’eût prise pour une reine
Qui s’amusait.


Le tendre incarnat d’une rose
La colorait,
J’ai vu la bouche demi-close
Qui soupirait.


L’amour faisait briller sa flamme
Dans ses beaux yeux,
Mais je la sentais dans mon âme
Encor bien mieux.
canichon

Tatigué, not’ bourgeois, comme vous prenez feu ! Mais en quoi puis-je vous servir ?


flamron

Je n’en sais rien.


canichon

Comment vous y prendrez-vous ?


flamron

Air : Pour voir un peu comment ça f’ra


Je suis novice en fait d’amour,
C’est la première fois que j’aime,
Je ne sais point faire ma cour,
Mais j’imagine un stratagème,
Pétrine vient, cachons-nous là,
Pour voir un peu comment ça f’ra.

Scène xi

Pétrine, Mademoiselle L’Écluse, Robinette et suite

pétrine

Air : Allons danser sous ces ormeaux


Amusons-nous par des chansons,
Et sur l’herbette
Joliette
Rions, courons, sautons, dansons,
Mais entre nous point de garçons.
On danse.
pétrine

C’est assez dansé, mes bonnes amies.


lecluse

Oui, jouons à de petits jeux.


robinette

À la climusette.


lecluse

Non, non, à Colin-Maillard.


pétrine

Oui, oui, jouons, jouons : qui est-ce qui le sera ? Voyons.


Un I, un L, ma tante Michell’,
Des raves, des choux,
Des figues nouvelle’,
Des raisins doux.
lecluse

C’est vous.


pétrine

Air : Gare le pot au noir


Dépêchons-nous, allons, ma chère,
Que l’on m’attache le mouchoir,
Doucement donc ! Comme elle serre !
lecluse
Ne peux-tu rien apercevoir ?
pétrine

Non.


Mais si quelque chose me barre,
Comme je ne pourrai rien voir,
Criez gare, gare, gare,
Gare le pot au noir.
lecluse

Oui, oui, que rien ne t’inquiète.


Pétrine joue à Colin-Maillard avec sa suite.
pétrine

Air : Gare le pot au noir


Qu’on ne me fasse aucune niche,
Tenez, cela n’est pas du jeu,
Je n’en suis plus, si l’on me triche.
flamron, à part, dans le fond du théâtre
C’est trop longtemps cacher mon feu.
Bas, aux filles de la suite de Pétrine.
Que l’on me donne de l’escarre !
À part.
Tout favorise mon espoir.
chœurdefilles
Gare, gare, gare, gare,
Gare le pot au noir.
Toutes les filles prennent la fuite.

Scène xii

Pétrine, Mademoiselle L’Écluse, Robinette, Flamron et suite de Flamron

flamron, bas, à sa suite

Air : Toujours seule, disait Nina


Secondez mes vœux les plus doux,
Mes amis montrez-vous
Tous.
pétrine
Paix... J’entends...
flamron, bas
Elle ne voit rien.
pétrine, saisissant Flamron
Pour le coup je le tiens
Bien.
flamron, contrefaisant sa voix
Je n’ai garde de m’échapper.
pétrine
Qu’est-ce que je viens d’attraper ?
C’est Jeanneton,
Flamron l’embrasse.
Oh ! Finis donc,
Oui, te voilà, te voilà,
Pétrine ôte son bandeau et fait un cri d’effroi.
Ah !

Air : Examinez sa grâce


Arrête, téméraire,
Ma mère, ma mère,
Hélas ! Quel embarras !
flamron
Ta mère n’entend pas,bis
Ta mine a su me plaire.
pétrine
Ma mère, ma mère,
deuxcol,
pétrine
Ah ! Ne m’approchez pas.bis

flamron


Il faut suivre mes pas.bis
pétrine
Oh ! Laissez-moi, laissez-moi,
Dame,
L’effroi glace mon âme.
flamron
Pour toi l’amour m’enflamme.
deuxcol,
pétrine
Ah ! Ne m’approchez pas.bis


Ma chère Robinette, Robinette,
Hélas, secourez-moi.


Ma chère Robinette, Robinette,
Hélas, c’est fait de moi.


flamron


Il faut suivre mes pas.bis


Petite Pétrinette, Pétrinette,
Je meurs d’amour pour toi.


Petite Pétrinette, Pétrinette,
Je meurs d’amour pour toi.


Scène xiii

Flamron, Pétrine, Robinette

robinette

Air : Il est pris, il est pris


Quelle insolente audace.
flamron

Marchez.


pétrine
Laissez, laissez-moi, de grâce.
robinette et pétrine, ensemble
Quelle insolente audace.
flamron
Suivez-nous en douceur,
deuxcol,
flamron
Mon p’tit cœur etc.

pétrine et robinette, ensemble


Au voleur, au voleur, au voleur.


flamron
Toi, si tu ne te tais,
Apprends qu’j’ai des secrets
Pour te rendre discrète.
Morbleu
Pour peu
Qu’ta langue caquète,
Je te rendrai muette.
Suivez-nous en douceur,
deuxcol,
flamron
Mon p’tit cœur etc.

pétrine et robinette, ensemble


Au voleur, au voleur, au voleur.


Scène 14

Madame Painfrais

Air : Je vais revoir ma petite Pétrine


Je vais revoir ma petite Pétrine,
Elle est gentille, elle est peu fine,
Et l’Amour est bien séducteur,
Je sais trop par mon propre cœur
Tout ce qu’on risque sans sa mère.
[bis]
Ah ! Si ma fille est plus sévère,
Nous aurons bien du bonheur.

Air : Ah ! ah ! ah ! Venez-y toutes


Pétrine, hola ! Pétrine.
Me reçoit-on ainsi ?
Viens ici.
Pétrine... La coquine
A quitté la maison.
Aux Valets et Servantes de la ferme.
Venez tous, accourez vite,
Qu’avez-vous fait de ma petite ?
Répondez-moi donc,
Mais, mais, répondez-moi donc.

Scène xv

Madame Painfrais, Robinette, Garçons et Filles de la ferme

chœurdegarconsetfilles

Air : Gros nez, canon


Hélas ! Hélas !
Ô trop malheureuse mère !
Vous ne la reverrez pas.
robinette

Air : Ma mie Margot


Avec noirceur,
Un ravisseur
D’une effroyable mine,
Hélas !
D’entre nos bras,
Vient d’enlever Pétrine :
Hélas !
ensemble, ensemble
Vient d’enlever Pétrine.
madame painfrais

Air : Je viens devant vous


Quoi ? Ma fille !... \^o dieux ! Quelle disgrâce !
Tout mon sang se glace.
robinette
Je sens vos regrets,
Et je voudrais être à sa place,
Tant mon triste cœur
Est sensible à votre douleur.
madame painfrais
Et quel est... quel est ce téméraire ?
Répondez, ma chère.
robinette

Air : Trembleurs

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Informations sur cet air

Non, Madame, je n’ai garde,
Un peu trop je me hasarde,
Car si je suis babillarde
Je ne pourrai plus parler.
Ce méchant croqueux d’poulettes
Sait par des ruses secrètes
Rendre les filles muettes.
Ce malheur me fait trembler.
En sortant.

Adieu, adieu.


madame painfrais

Air : Baise-moi donc, me disait Blaise

Voir la partition
Informations sur cet air

Jusqu’à quel point le sort m’afflige !
Hélas, hélas ! Ma fille, que ne puis-je
Partager au moins ton malheur !
Au lieu de m’ôter ce que j’aime,
Ah ! Scélérat de ravisseur !
Que ne m’enlevais-tu moi-même !

Allons, allons, que tout se ressente de la fureur que je ressens.


Air : Jupin de grand matin

Voir la partition
Informations sur cet air

Ah ! L’on va me reconnaître,
Dans mon dépit
Je n’ai point de répit.
Par la f’nêtre
Morbleu, je vais
Jeter mes effets
Et moi-même après.
Un traître, un suborneur
M’ôte l’honneur !
Punissons l’attentat
Du scélérat.
Faisons avec éclat
Un grand sabbat,
Que tout sans dessus dessous
Soit chez nous.
Embrasons ma maison
Comme un tison,
Il faut tout ravager,
Tout saccager.
On ose m’outrager,
Je me ruine pour m’en venger.

Air : Dans nos ormeaux


Mettons en feu
Mon moulin et ma grange.
Elle va allumer à son four deux torches de paille et met le feu à la maison.
mathurin
Ah ! Son cerveau se dérange,
Attendez un peu.
madame painfrais
Non, non, morbleu.
mathurin
Rien n’est plus ridicule,
Ça passe le jeu.
Au feu, au feu,
V’là sa maison qui brûle,
Au feu, au feu, au feu.
chœur
Au feu, au feu, au feu.

Scène 16

Pétrine

Air : Un jour, Nicodême


Ah ! Grands dieux ! Je tremble \indicreprmus quatre fois
Dans ces lieux déserts.
Hélas ! Il me semble
Me voir aux enfers.

Air : Menuet nouveau

Voir la partition
Écouter (midi) Voir la partition Informations sur cet air

Ah ! Maman ! Contre un téméraire,
Que doit-on faire ?
C’est un cruel moment.
Ah ! Maman, contre un téméraire
La plus sévère
Résiste vainement.\indicreprmus fin
Quel parti prendre
Quand on ne peut se défendre ?
Il faut se rendre
Pour sortir d’embarras.
Hélas ! hélas ! Maman,
Toute la colère
Ne sert de guère,
Quand le cœur la dément.
Un amant mérite sa grâce
Lorsque l’audace
Prouve le sentiment.

Scène xvii

Pétrine, Mademoiselle L’Écluse, Canichon

pétrine
Eh quoi ! C’est toi chère L’Écluse !
Hélas ! Qu’est-ce que dit maman ?
Sait-elle mon enlèvement ?
Oh Ciel ! Lorsque l’on est amant,
Comment ! Est-ce ainsi qu’on en use ?
Dis-moi, t’en a-t-on fait autant ?
lecluse

Air : Trinque, trin


Non, je viens ici, chère petite,
Pour vous conseiller fort sagement.
canichon
Pour venir ici plus vite
J’ons abrégé not’ roman,
Et trinque, trinque, trin,
Permettez que tout de suite
Nous vous fassions not’ compliment.
canichon, mademoiselle l’écluse, ensemble

Air : Allons donc, Mademoiselle


Aimez donc, belle Pétrine,
Aimez donc
Monsieur Flamron.
canichon, seul
Ne r’gardez pas à la mine,
Songez qu’c’est un bon luron.
ensemble, ensemble
Aimez donc etc.
canichon, seul
Sa face n’est point poupine,
Il n’a point d’joli jargon.
ensemble, ensemble
Aimez donc etc.
canichon, seul
Mais l’amour qui le domine
En lui parle tout de bon.
ensemble, ensemble
Aimez donc etc.
pétrine

En vérité, Mademoiselle, je suis étonnée que vous me donniez de semblables conseils. Mais puisque monsieur Flamron sait si bien aimer, pourquoi n’ose-t-il parler lui-même ? Est-ce qu’il ne m’a enlevée que par timidité et me laisse-t-il là par attention ?


lecluse

Non, c’est pour nous donner le temps de chanter quelque chose. Mais le voici, nous vous quittons.


pétrine

Je vous suis, j’ai trop peur.


Scène xviii

Pétrine, Flamron

flamron

Air : Menuet anglais


Écoutez-moi donc.
pétrine
Non.
flamron
Entendez raison.
pétrine
Non.
flamron
Parlez-nous, j’vous prie,
Sur un autre ton.
pétrine
Non.
flamron
Vous avez de l’ennui.
pétrine
Oui.
flamron
Je s’rai vot’ mari.
pétrine
Fi.
flamron
Recevez, ma mie,
Mon cœur et mon bien.
pétrine
Rien.
flamron
Mettez vot’ main là.
pétrine
Da !
flamron
Qui cause ç’dégoût ?
pétrine
Tout.
flamron
Je perdrai la vie
Loin de vos beaux yeux.
pétrine
Tant mieux.
flamron

Je suis surpris que vous ne vous plaisiez point chez moi.


pétrine

Oui, ce qu’on y voit est fort amusant.


flamron
1
Si cet asile est sombre,
Il est fait pour l’amour,
L’amour préfère l’ombre
À la clarté du jour.
Ici d’un beau parterre,
On ne voit point les couleurs,
Mais la verte fougère
Y était au lieu de fleurs.


2
Ce bois qu’on voit s’étendre
Nous sert de parasol,
On va la nuit entendre
Le chant du rossignol.
On cueille des noisettes
Au fond d’un bocage épais,
Pour prendre des fauvettes,
On cherche des bosquets.
pétrine

Air : Je suis pour les dames, moi


Non, non, tout ça ne peut me satisfaire,
Qu’on me rende à maman,
Elle m’attend.
flamron
Il ne m’importe guère.
Vous êtes bien enfant !
Tout mon emploi
Sera de vous complaire.
pétrine
Je veux voir ma mère, moi
Je veux voir ma mère.
flamron
Maudite race de Ninette à la cour
De ma poitrine,
Belle Pétrine,
De ma poitrine
L’amour
A fait un four.
Le feu s’allume
Avec tant de chaleur,
Qu’il me consume.
Le diable a pris mon cœur
Pour une enclume,
Qu’il frappe à chaque instant
Et pata, pata, pata, patapan,
Donnez soulagement
À mon tourment,
À mon tourment.


De ma poitrine,
Belle Pétrine,
De ma poitrine
L’amour
A fait un four.
Le feu s’allume.
pétrine
Allez l’éteindre ailleurs.
flamron
Il me consume.
pétrine
Je ris de vos ardeurs.
flamron
Donnez soulagement
À mon tourment.
pétrine
Ah ! Quel supplice !
flamron
Ah ! Quel délice !
Quand on se rend.
ensemble, ensemble
deuxcol,
pétrine
Tout beau, tout beau, finissez-donc,
Je n’entends point raison.
Je ferai le dragon,
Je ferai le démon.
Mon cœur commence à se troubler.
J’veux m’en aller,
J’veux m’en aller.


flamron
Ah ! Quel teint frais ! Quel œil fripon !
Quel petit air mignon !
Ah ! Le joli tendron !bis
Peut-on la voir sans se troubler ?
Je m’sens brûler,
Je m’sens brûler.


flamron

Air : Tarare pompon

Voir la partition
Informations sur cet air

Fussiez-vous, mon trognon,
Mille fois plus sévère,
Vous changerez de ton.
À la cantonade.
Amis, accourez donc,
Et quittez toute affaire.
pétrine
Craignez de m’offenser,
Que prétendez-vous ?
flamron
Faire
Danser.

Air : Lan farira dondaine, bon


V’nez la divertir,
Gentils camarades,
Et pour l’attendrir
Faites des gambades, gué,
Farlarira dondaine, bon,
Farlarira don don.
Danse des forgerons, des bucherons et bucheronnes.
On danse en même temps que Flamron et Pétrine chantent l’air suivant.
flamron
Sans savoir aimer,
Comme bien d’autres j’aime.
Oui, oui, pourquoi vous alarmer ?
Pour vous enflammer,
Je sais un bon système,
L’or, l’or suffit pour tout charmer.
En tous lieux
L’or étend son empire,
La prude soupire
S’il brille à ses yeux,
Par cette méthode,
L’on sait abréger.
Cédez,
En suivant la mode.
On peut s’arranger.
Sans etc.
ensemble, ensemble
deuxcol,
flamron
Quoi ! Mes peines
Près de vous sont vaines !
N’est-ce rien
Que mon cœur et mon bien !
Cessez, cessez, cessez,
Cessez de vous plaindre,
Un amant
Vaut mieux qu’une maman.
Dans nos bois
Tout suivra votre empire,
Faut-il le redire
Mille fois
Quoi etc.


Pourquoi retarder
Le bonheur de la vie ?
Oui, oui, votre cœur doit céder !
Doit-on le garder
Quand on est si jolie ?
Non, non, il faut bien l’accorder.


pétrine
Vos offres sont vaines
Monsieur, vous perdez vos peines,
Votre bien
Pour moi n’est rien, n’est rien,
Cessez de me contraindre,
Je dois craindre,
Ah ! Vraiment !
J’ai trop peur d’un amant.
Mille fois
Faut-il vous le redire ?
Hélas ! Quel martyre !
Je suis aux abois.
Vos etc.


Je voulais garder
Mon cœur toute ma vie,
Ah ! Ah ! Maman va bien gronder.
Dois-je l’accorder ?
C’est contre mon envie,
Mais, mais je sens qu’il faut céder.


Scène xix

Pétrine, Flamron, Mademoiselle L’Écluse, Canichon, suite de Flamron

canichon

Air : À boire, à boire, à boire

Voir la partition
Informations sur cet air

Alerte, alerte, alerte,
Prévenez votre perte,
Le procureux fiscal prétend
Ravoir Pétrine dans l’instant.
flamron

Oh ! Oh ! Mes amis, ceci devient sérieux : il faut passer de la danse au conseil.


Air : J’aurai une robe, canon


Çà, que l’on opine,
Rendrons-nous Pétrine ?
chœur
Eh ! Bon, bon, bon !
Eh ! Non, non, non.
Jarnidienne,
Qu’on y vienne,
Et flon, flon, flon,
Nous ferons carillon.
flamron

Air : Lucas, pour se gausser de nous


Le procureux fiscal sait bien
Qu’ici l’on ne rend rien,
Et je garde Pétrine.
canichon
Il envoie avec des sergents
Ses gens, ses gens,
Ils ont tous la mine
Mutine,
Mutine.
deuxcol,
flamron
Oh ! Je me ris de son pouvoir.
Pour la ravoir
Il faut que l’on bataille.
Hâtons-nous de faire du train,
Allons, allons,
Amis, frappons, tapons, cette canaille.
lecluse
Oh ! L’on se rit de son pouvoir.
Pour la ravoir
Il faut que l’on bataille.
Hâtez-vous de faire du train,
Allons, allons,
Frappons, tapons, frappons, cette canaille.


avec le chœur, ensemble
Chassons, rossons,
Tapons, Frappons,
Chassons, rossons à grands coups de gourdin.
Chassons, rossons,
Tapons, Frappons,
À grands coups de gourdin.
\scene[Le théâtre représente un village.] Madame Painfraissuivie d’ un tambour et d’ un afficheur qui porte une échelle et un paquet d’affiches sur lesquelles on lit en gros caractère : BIJOU PERDU
madame painfrais
airopera, Déserts écartés, sombres lieux
Ma fille n’est plus sous mes yeux,
Hélas, tout redouble mes craintes.
Tandis qu’ici je fais des plaintes,
Un ravisseur, peut-être... ah ! Dieux !
Ma fille n’est plus sous mes yeux,
Hélas ! Tout redouble mes craintes.

Air : Nous nous marierons dimanche


J’en veux avoir raison,
Ose-t-on
Me faire de ces niches ?
Que l’on imprime exprès
Des billets,
Nous ne serons point chiches
Pour les frais.
Qu’on aille à l’instant
Mettre ma chère enfant
Dans les petites affiches.


Il faut à chaque carrefour
Prétantanpan
Battre le tambour.
Pour retrouver Pétrine,
Que l’on tambourine,
Prétantanpan,
Tambourinez donc,
Pour retrouver Pétrine,
Tambourinez donc.
On bat de la caisse et l’afficheur va poser ses affiches.
le tambour

Air : N’avez-vous pas vu l’horloge


N’avez-vous pas vu la fille
De la commère Painfrais ?
madame painfrais
C’est l’espoir de ma famille,
Allez tous courir après.
le tambour
On aura pour récompense
Dix écus et les dépens.
madame painfrais
Courez donc en diligence,
Ah ! Peut-être il n’est déjà plus temps.
Le tambour sort en battant la caisse.

Scène xx

Madame Painfrais, Mademoiselle L’Écluse, Canichon

lecluse

De la joie, de la joie, Madame Painfrais, nous venons vous dire des nouvelles de votre fille. C’est monsieur Flamron, l’entrepreneur des forges, qui l’a enlevée.


canichon

Oui, consolez-vous, vous ne la reverrez plus.


madame painfrais

Air : Tout est dit


Le procureux fiscal endure
Tranquillement cet attentat !
Il permet qu’on nous fasse injure !
Il est donc bien peu délicat.
Lui qui devrait protéger ma famille
Peut-il souffrir qu’un traître, un scélérat
M’ôte ma fille !
Ah ! L’ingrat !

Scène xi

Les acteurs précédents, Bonaventure

bonaventure

Hoé, hoé, hoé, rassurez-vous, je viens vous annoncer le retour de Pétrine, monsieur le Procureur Fiscal la marie à monsieur Flamron.


madame painfrais

Sans mon consentement !


bonaventure

Air : Chacun à son tour


Cette fille qui vous est chère
Sera six mois chez son époux,
Les autres six mois chez sa mère,
Ainsi l’on vous accorde tous.
Ma commère, ainsi la paix est faite,
Entre la nature et l’amour.
Chacun à son tour,
Liron, lirette,
Chacun à son tour.
madame painfrais

On prétend que je donnerai ma fille à un forgeron ? C’est unir le blanc au noir.


canichon

Bon ! Bon ! Ma commère, vous aurez des petits enfants panachés.


bonaventure

Air : Ah ! Maman, que je l’ai échappé belle


Elle vient.
madame painfrais
Ah ! Ma fille !
pétrine
Ah ! Ma mère !
lecluse
Soyez tous d’accord.
madame painfrais
Quel heureux sort !
flamron
Plus de colère.
madame painfrais
Ah ! Mon gendre ! Ah ! Ma fille !
flamron et pétrine, ensemble
Ah ! Ma mère !
canichon
Chacun est d’accord
Voilà les amours à bon port.
madame painfrais

Allons, mes voisins, mes voisines, venez danser à la noce de ma fille.


canichon

Je viens vous les amener.


pétrine et flamron, ensemble
Aimons, aimons-nous
En ménage,
C’est un avantage,
Aimons, aimons-nous
Et servons d’exemple aux époux.
flamron
Mon amour n’est point précoce,
Il commence par la fin.
Mais s’il n’est pas de la noce
Il sera du lendemain.
Aim etc.
lecluse
On aime bien peu,
Quand on soupire
Son martyre.
Un cœur plein de feu
Par ses transports en fait l’aveu.
pétrine
Maman, ce n’est pas ma faute,
Mon cœur s’est bien défendu.
La liberté que l’on m’ôte
Sert d’excuse à ma vertu.
mademoiselle l’écluse et canichon, ensemble
Des tendres soupirs
Le mariage
Dédommage.
L’on gagne en plaisir
Le temps que l’on perd en désirs.
lecluse
Ah ! De la plus scrupuleuse
L’Amour sait venir à bout,
On est encore trop heureuse
Qu’on l’hymen répare tout.
Des tendres soupirs etc.
flamron et pétrine, avec le chœur, ensemble
Aimons, aimons-nous etc.
Aimez, aimez-nous etc.
divertissement
canichon
Gare, gare, place à la danse.
On danse.
vaudeville
flamron
L’amour chez nos bons gaulois,
Était un amour maussade.
Il fallait, pendant six mois,
Filer une intrigue fade.
Aujourd’hui point de temps perdu,
Nous faisons l’amour à l’impromptu.
madame painfrais
L’amour tendre et circonspect
laisse échapper la victoire
Plus d’amour moins de respect,
Du triomphe on a la gloire.
Un cœur faible est bientôt rendu,
Quand on le surprend à l’impromptu.
lecluse
D’un amant rempli d’ardeur,
J’ai longtemps craint la poursuite,
J’avais tort, car le bonheur
Jamais n’arrive assez vite.
je regrette le temps perdu,
Et je le répare à l’impromptu.
robinette
Le matin sans amoureux,
le soir vous voilà Madame,
Flamron d’un ton langoureux,
Ne déclare point sa flamme.
Avec lui point de temps perdu,
Il devient époux à l’impromptu.
pétrine
Si l’hymen est un bonheur,
Pourquoi nous le faire attendre ?
Nous naissons avec un cœur,
L’avons-nous pour le défendre ?
C’est un bien pour notre vertu,
Quand l’hymen arrive à l’impromptu.
Au public.
Messieurs, n’allez pas peser
Gravement un badinage,
On cherche à vous amuser,
On n’en veut pas davantage.
Si notre zèle vous a plu,
Applaudissez-nous à l’impromptu.
Fin

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