Denis Carolet
Polichinelle Amadis
La Parodie d’Amadis
Pièce en trois actes
Représenté sur le théâtre des marionnettes du sir Bienfait
au mois de mars 1732
BnF ms. fr. 9312
definitacteur, chœur de filles chœurdefilles
definitacteur, chœur des filles chœurdesfilles
definitacteur, chœur de prisonniers chœurdeprisonniers
definitacteur, l’ombre lombre
definitacteur, deux suivantes d’urgande deuxsuivantesdurgande
Acteurs
Amadis
Florestan
Corisande
Oriane
Arcabonne
Arcalaus
L’ombre d’Ardan Canile
Urgande
Troupes de filles de joie
Troupes de captifs
Troupe de démons
Troupe de procureurs
La scène est en bien des endroits.
Polichinelle Amadis
Acte i
Scène 1
Florestan, Amadis
florestan
Air : De nécessité nécessitante
De nécessité nécessitante
Il faut que je voye mon amante,
Mais avant que de voir ma commère
J’ai voulu voir mon pauvre frère.
Qu’as-tu ? Tu boudes ? Tu es toujours de mauvaise humeur. Est-ce que tu m’en veux parce que je suis le bâtard de ton père ?
amadis
Air : Sans devant derrière
J’aime. Quand on est amoureux
On ne peut être que malheureux.
Avant que d’aimer mon cher frère
Je culbutais tout, sans devant derrière,
Mais à présent je crains les coups
Sans devant derrière, sans dessus dessous.
Air : Je suis la Violette, moi
Je n’en puis plus, j’ai le cœur tout en braise,
Je brûle nuit et jour,
J’étais guerrier, je ne suis qu’un nicaise,
Grâce à mon chien d’amour.
Mais après tout, quand je serais un âne,
J’adore Oriane, moi,
j’adore Oriane.
florestan
Bon, tu n’y penses pas. Elle dépend de son père. C’est un anglais qui n’est pas aisé.
amadis
Air : Un certain je ne sais quoi
Elle m’aimait si tendrement
Mais je l’aimais de même.
Plus d’un galant jaloux et blême
Nous trouvait seuls à tous moments.
Je voyais leur face de carême,
Et j’étais traité en amant.
florestan
Elle va se marier à un seigneur de la Basse-Normandie. Il l’attend de pied ferme dans son château.
amadis
Air : Le grand seigneur m’a choisi
Si je croyais qu’elle en valut la peine
Pour l’obtenir, nous en découdrions.
Qui l’aurait cru, que ma belle inhumaine
Se fût soumise à garder des dindons.
Air : Pierre Bagnolet
Fut-il jamais amant plus tendre.
Fut-il amant plus malheureux
On me bannit sans m’entendre.
On me chasse comme un péteux,
Comme un teigneux,
Comme un galeux.
Fut-il jamais amant plus tendre ?
Fut-il amant plus malheureux ?
florestan
Air : Eh vogue la galère
Quand un cœur est sincère
Il faut le ménager,
Si dans une autre affaire
Il a su s’engager
Et vogue la galère, etc.
Air : [Changement] pique l’appétit
Faites une nouvelle maîtresse,\versfaux[Il y a une syllabe de trop.] \SR
Ne pleurez plus une tigresse
Qui de tous les amants se rit,
Changement pique l’appétit.
amadis
Air : C’est ma devise
Rien ne pourra me consoler
Je suis trop tendre.
Pour elle, je veux m’immoler
Sans rien entendre.
À m’aller pendre par mon cou
Tout m’autorise.
Être un amoureux sombre et fou
C’est ma devise.
florestan
Je ne saurais te laisser comme cela. Viens avec moi, nous boirons chopine, cela t’égayera !
amadis
Adieu. Un amoureux comme moi n’a jamais de meilleure compagnie que la sienne.
Scène ii
Florestan, Corisande
corisande
Air : Margot sur la brune
Je vois ce que j’aime !
florestan
Je te revois de même !
corisande
Ma joie est extrême !
florestan et corisandre, ensemble
Oh ! Bienheureux moment !
florestan
Bonjour commère.
corisande
Bonjour compère.
florestan
De cette affaire
Parlerons-nous ?
corisande
Venez, vous règnerez chez nous.
Oh çà, vous n’irez plus si souvent à la guerre. Je ne vous épouse pas pour que vous alliez en campagne.
florestan
Ç’en est fait, je vous aime mieux que ma réputation. Ne suis-je pas d’assez bonne famille ? Bon, mon frère Amadis a du cœur pour nous deux.
corisande
Air : Que j’estime mon cher
Sortons. Que faire encore là ?
Nous dire je vous aime,
Cela n’est bon qu’à l’Opéra,
On dit toujours de même.
Scène iii
Oriane, Florestan, Corisande
corisande
Air : Flon, flon
Oriane ma chère
Mon amant est constant
Il m’épouse. L’affaire
Se fera dans l’instant.
Et flonflon etc.
oriane
Votre bonheur me fait venir l’eau à la bouche.
florestan
Votre Amadis se plaint de vous.
oriane
Air : Un petit moment plus tard
Il a tort, le traître.
Il en aime une autre, entre nous,
Il en est le maître.
La belle me l’a soufflé.
De charmes elle est pourvue.
Hélas, j’ai le cœur enflé,
Je suis, je suis perdue.
florestan
Cela ne se peut pas, il est sec comme un coucou depuis qu’il a entendu publié vos bans.
oriane
Il était bien pressé de me planter là. Que n’attendait-il pas que je fusse mariée ou morte, je n’aurais rien à lui reprocher !
Air : Tu croyais, en aimant [Colette]
Sans tant faire de verbiage,
Et sans appeler le dépit,
Disons qu’Amadis est volage,
Et n’a plus pour moi d’appétit.
corisande
Même air
Commère, ton cœur extravague,
Allons un peu nous divertir,
À deux pas, on joue à la bague.
florestan
Allons, il y faut consentir.
Scène iv
Arcabonne seule
arcabonne
Air : De tous les capucins [du monde]
Dieu d’amour, que prétends-tu faire
Du cœur d’une vieille sorcière ?
Non, mon cœur n’est pas fait pour toi,
Il est fait pour sentir la haine.
Être diablesse est mon emploi,
Et l’amour veut qu’on soit humaine.
Scène v
Arcabonne, Arcalaus
arcalaus
Air : Folies d’Espagne
Les bois, ma sœur, vous ont rendu sauvage,
Vous soupirez, et je ne sais pourquoi.
arcabonne
J’ai le cœur tendre et par ma foi j’enrage
De ressentir ce que je sens chez moi.
Il faut, pour me punir de ma faiblesse, que je vous conte comment cela m’est venu.
Air : Ah, Pierre
Une bête enragée
M’accosta l’autre nuit,
Hélas j’étais grugée,
Mais on me défendit.
Mon frère... mon frère,
J’étais morte sans lui.
arcalaus
Eh qui, lui ? Vous êtes si troublée que vous ne savez ce que vous dites.
arcabonne
Air : Un certain je ne sais quoi
C’était un gros garçon, ma foi,
Je le crois voir sans cesse.
Il accourut vite vers moi,
J’aimais sa hardiesse.
Il se cachait, mais la tendresse,
Fait qu’on se montre malgré soi.
Je vis un certain je ne sais qu’est-ce,
Je vis un certain je ne sais quoi.
arcalaus
Ne devriez-vous pas mourir de honte, vieille folle, de me dire cela ? Fi !
arcabonne
Air : Prévôt des marchands
Non, je ne connais plus mon cœur
J’y sens une douce langueur,
Un tel souvenir me chatouille.
arcalaus
Songez que l’Enfer est à vous.
Çà, que votre cœur se dépouille
D’un amour indigne de vous.
arcabonne
Air : Belle Iris, vous avez deux pommes
Puisque vous m’avez fait sorcière,
Guérissez-moi de mon amour,
Si vous pouvez faire ce tour,
Vous serez savant mon cher frère.
arcalaus
Oubliez-moi votre pacan,
Et vengez votre frère Ardant.
Air : Non, je ne ferai pas
Amadis l’a percé, comme un tonneau de bière,
Pour ne le pas venger, il faut être de pierre.
arcabonne
Au seul nom d’Amadis, je grille de courroux.
Je suis femme et saurai me venger mieux que vous.
arcalaus
Air : Morguienne de vous
J’aime ce transport.
arcabonne
Livrez-moi le drôle.
Je vous le rends mort,
J’en donne parole.
arcalaus
Sortez, taisez-vous. Quelle femme, quelle femme.
Sortez, taisez-vous, j’en sais plus que vous.
Scène vi
Arcalaus
arcalaus
Air : De tous les capucins [du monde]
Esprits qui ne cherchez que noise,
Qui dans Gisors et dans Pontoise
[il manque ici deux pages]
Que je ne te donne au diable !
Si tu passes je t’accable
Sous le poids de ma fureur.
Vois ce magasin de hardes,
Ces fusils, ces hallebardes,
De plus d’un soldat aux gardes
Je suis le fameux vainqueur.
amadis
Ce diable-là est pire que Cartouche !
Air : Jardiniers d’Octave, lon la
Je me ris de ton courroux,
Je veux passer !
arcalaus
Oh ! Tout doux !
corisande
Attends-moi, mon amant !
arcalaus
Suis-le promptement,
La mort est ton partage.
corisande
Mon cher Amadis, défends-nous.
amadis
J’apprête mon courage
Pour vous,
J’apprête mon courage.
Il donne des coups de pieds dans le ventre à Arcalaus.
arcalaus
Air : Voici les dragons
Il est plus fort que le diable,
Évitons ses coups.
Mais si quelque fille affable
Peut lui paraître agréable
Il est à nous.bis
Air : Monsieur le Prévôt des marchands
Démons, sous d’aimables minois,
Cachez vos visages sournois
Amadis s’y laissera prendre.
Je le connais pour un gaillard
Qui de son naturel est tendre
Et mène la fille à l’écart.
Scène vii
Une troupe de filles de joie, Amadis Le manuscrit passe en réalité de la scène 6 à la scène 10. \SR
chœurdefilles
Suivons, suivons tour à tour,
Bacchus et l’Amour.
une fille de joie
Air : Jupin, de grand matin
Amadis, mon mignon,
Mon petit trognon,
Mon aimable garçon,
Mon pigeon,
Mon charmant tendron,
Sur ce vert gazon,
Baise-moi sans façon.
Je m’appelle Manon,
Vois mon chignon,
Chacun, dans ce canton,
Connait mon nom.
Tu m’ôtes la raison,
Viens donc fripon,
Saisir l’occasion.
Mon bouchon,
Parle-moi sur ce ton,
Mon cher poupon,
je t’aime tout de bon,
Sans trahison,
Car je connais à fond
Ton mérite, mon petit bichon.
amadis, la prenant pour Oriane
Air : Si tu savais, Pierrot
Orianne, hélas, c’est moi qui vous aime,
Vous m’aimez aussi, j’en suis enchanté.
J’ai de vous revoir une joie extrême,
Nous pouvons ici tout faire en liberté.
Orianne, hélas etc.
chœurdesfilles
Allons, allons, allons à la guinguette, allons.
Acte ii
Scène 1
Chœur de prisonniers, Florestan, Corisande
chœurdeprisonniers
Air : Les olivettes
Mettez-nous à la porte,
Que de bi, que de ba, que de bagnolet,
Mettez-nous à la porte,
Ouvrez-nous le guichet.
un geolier
Air : Morguienne de vous
Oui, vous sortirez,
Les prisons sont pleines,
Mais vous périrez,
Vos plaintes sont vaines.
Morguienne de vous, quelles quelles quelles gueules,
Morguienne de vous, quelles gueules êtes-vous !
Scène ii
Arcabonne, Florestan, Corisande
Arcabonne descend sur un monstre ailé à sept têtes.
arcabonne
Air : Tu croyais
Cessez de me rompre la tête
Je vais terminer vos tourments.
un prisonnier
Hélas, soyez assez honnête,
Pour nous laisser gagner aux champs !
arcabonne
Air : Les mousquetaires
Quand on est mort, c’est pour longtemps,
Vous allez mourir, mes enfants,
Et vous serez quittes des tourments.
J’immole mon ennemi,
Je veux vous perdre avec lui,
Vous périrez tous aujourd’hui.
corisande
Air : Pèlerins de Saint Jacques
Florestan,
florestan
Belle Corisande,
tous deux, ensemble
Quel contretemps !
corisande
Faut-il qu’à mes yeux on vous pende ?
florestan
Ah ! Je l’attends.
corisande
Puis-je à la potence vous voir ?
Que vous en semble ?
Hélas, nous comptiez bien ce soir
Coucher tous deux ensemble.
florestan
Air : Un boulanger de Gonesse
Épuisons la tendresse,
Dans un tendre duo.
Adieu, belle maîtresse.
corisande
Adieu, beau jouvenceau.
tous deux, ensemble
Ce n’est plus pour nous
Que le four chauffe,
Ce n’est plus pour nous
Qu’Amour est doux.
arcabonne
Peste soit des amoureux ! Leurs adieux d’Opéra m’ont donné la migraine, taisez-vous, canailles !
Air : Marie Salisson
Oh, toi qui n’es plus qu’un peu de cendre,
Oh, oh, tourelouribo,
Montre ton nez pour m’entendre,
Oh, oh, tourelouribo,
Tu verras si je suis tendre,
Oh, oh, tourelouribo.
Scène iii
Arcabonne, L’ombre Dardan Canile et les précédents
lombre, sortant du tombeau
Air : En cueillant des barbeaux
Tu me trahis, misérable sorcière !
arcabonne
Moi, vous trahir ? Hélas, mon frère, tant s’en faut.
lombre
Dans un moment tu rejoindras ton frère.
Tu en auras tantôt,
Tu en auras tantôt,
Et je saurais te reprocher plus d’un défaut.
Il tombe dans son tombeau.
arcabonne
La victime paraît, faisons mentir mon frère.
Scène iv
Amadis, Arcabonne et les précédents
arcabonne
Air : Vous m’entendez bien
Meurs !... Que mes sens sont interdits !
Que vois-je ? Ô, ciel ! C’est Amadis !
Oui, c’est lui, j’en suis sûre.
Eh bien,
Je le sens, je vous jure,
Vous m’entendez bien.
Air : Le Prévôt des marchands
Quoi ? Je t’allais percer le sein,
Moi qui te dois baiser la main !
Tu m’as secourue en brave homme,
Et je t’en dois récompenser.
En vain l’on veut que je t’assomme,
Non, je ne saurais te percer.
Oh çà, que veux-tu que je fasse pour toi, mignon ? Je veux te faire du bien, en dépit de mon frère, ou j’y mangerais mon grimoire.
amadis
Air : Eh bien
Faites relâcher mes amis,
Voilà ce que veut Amadis.
arcabonne
Qu’ils sortent d’esclavage,
Eh bien,
Pour nous, cher Amadis.
Allons dans ce bocage,
Vous m’entendez bien.
Ils sortent tous deux.
chœur de captifs et corisande, ensemble
Air : Adieu paniers, vendanges [sont faites]
Quittons ces lieux funestes,
Amadis nous a fait grand bien
Grâce à lui, je ne crains plus rien,
Adieu paniers, vendanges sont faites.
Ils sortent tous en soutane.
Scène 5
Arcalaus, Arcabonne
arcalaus
Air : Capucins
Oriane est dans l’esclavage,
Elle a causé trop de tapage,
Pour n’avoir pas un triste sort.
arcabonne
Je l’ai vu, ah, qu’elle a de charmes.
arcalaus
Faites-lui voir Amadis mort.
Mais quoi, vous répandez des larmes et vous soupirez ? Ce n’est pas là de la haine, où je suis bien trompé... La vieille carogne, elle veut encore faire des siennes.
arcabonne
Cela vous est bien aisé à dire monsieur mon frère, vous ne savez pas tout.
Air : Un petit moment plus tard
Ce redoutable ennemi,
Dont je suis enchantée,
Mon pauvre frère, est celui
Qui m’a, qui m’a sauvée.
arcalaus
Vous aimez Amadis, coquine !
arcabonne
Oui, je l’aime, et ce qui me chiffonne le cœur, c’est qu’il me hait et qu’il en aime une autre.
arcalaus
Pour vous faire sentir
Jusqu’où va ma colère,
Je prétends les unir.
Devant vous ils vont faire
L’amour
La nuit et le jour.
arcabonne
Air : Le Prévôt des marchands
Morbleu, mon frère, c’en est trop,
Mon amour s’enfuit au galop,
Mon cœur n’est point fait pour la haine.
L’amour n’y peut longtemps loger,
Je vois ma rivale, sa peine
Me suffit pour me dégager.
arcalaus
Pourrai-je encore me fier à vous, vieille chatte chaude ?
arcabonne
Touchez là, mon frère, je me vengerai de façon qu’il vaudrait mieux pour ces deux amants-là qu’ils perdissent la vie.
Scène vi
Oriane seule
oriane
Air : La halle
À qui pourrais-je avoir recours
Je suis ici, sans nul secours,
En vain, je compte
Sur le bras d’Amadis
Il ne tient compte
De l’état où je suis.
Scène vii
Arcalaus, Oriane
arcalaus
Air : Badinez, mais [restez-en là]
Je vous entends, cessez de feindre,
Je ne prétends point vous contraindre.
Amadis vous a planté là,
Murmurez... Tant qu’il vous plaira.
oriane
C’est un coquin, ne m’en parles pas.
Air : Quand le péril [est agréable]
Il me paraît si détestable,
Que je ne me plains pas de vous,
Et si vous êtes, entre nous,
Plus laid que le grand diable.
arcalaus
Bon, bon, quand vous verrez Amadis, vous ferez la poule mouillée.
oriane
Non, vous dis-je, je le hais à la mort.
arcalaus
J’ai donc bien fait de le terrasser, il est sans vie.
oriane
Il est sans vie, hélas !
arcalaus
Air : Que j’estime
Vous l’aimez encore ?
oriane
Ai-je tort ?
Il avait tant de charmes !
arcalaus
Regardez, le voilà mort,
Et couché sur ses armes.
Scène viii
Arcalaus, Oriane, Amadis qui paraît mort
oriane
Air : Or écoutez, [petits et grands]
Que vois-je, je n’ai plus d’appui !
Amadis expire aujourd’hui,
Il m’appelle, je vais le suivre
Il est mort, je ne dois plus vivre,
Il m’aimait ce charmant héros,
Je l’accusais mal à propos.
Ceux qui l’ont fait mourir ont eu grand tort,
Je l’aimerai toujours, quoiqu’il soit mort !
Elle tombe évanouie sur un gazon.
Scène ix
Arcalaus, Arcabonne, les deux amants
arcabonne
Air : Ma commère, quand je danse
Ah, quel plaisir, mon cher frère,
De les voir en cet état.
Courrez ici,
Revenons là.
arcalaus
Ah, ma sœur, que j’ai de plaisir à tout cela.
arcabonne
Ah, quel plaisir, mon cher frère,
De les voir en cet état.
Air : Réveillez-vous, [belle endormie]
Réveillons Amadis, mon frère,
Qu’il pleure Oriane à son tour.
Que nous, l’allons entendre braire
S’il voit ses yeux privés du jour.
Mais que nous annonce cette nouvelle machine ? Il y a ma foi des diables qui travaillent pour eux.
Scène x
Urgande, Arcalaus, Arcabonne, Amadis paraît mort et Oriane évanouie
On voit un rocher enflammé s’avancer et derrière un monstre marin d’où sort Urgande.
urgande
Air : Belle Iris, vous avez deux pommes
Je suis plus diable que les diables,
Je sais les grimoires par cœur.
Je fais consister mon bonheur
À secourir les misérables.
Je suis Urgande Arcalaus,
Tous tes efforts sont superflus.
Elle le touche de sa baguette.
Air : Tu croyais, en aimant [Colette]
Et toi, scélérate Arcabonne
Ah ! Connais aussi mon pouvoir !
À tous les diables je te donne,
Et je me ris de ton désespoir.\versfaux[Il y a une syllabe de trop.] \SR
Elle la touche aussi de sa baguette.
arcabonne, arcalaus, ensemble
Air : Des fraises
Elle parle tout de bon,
Son air est formidable.
Elle n’entend pas raison,
Elle nous porte un guignon
De diable, de diable, de diable.
deuxsuivantesdurgande
Tremblez, misérables jaloux,
Vous trouverez plus fort que vous,
On va vous tailler des croupières,
Laire lan laire lan laire etc.
urgande, à ses suivantes
Air : Des fraises
Qu’Oriane et qu’Amadis
Que mon pouvoir rassemble,
Par vos soins soient réunis
Ils reviendront tantôt mis
Ensemble, ensemble, ensemble.
Et vous, maudits enchanteurs, reprenez l’usage de vos sens pour enrager de n’avoir fait que de l’eau claire.
Scène xi
Arcalaus, Arcabonne
arcalaus
Air : Tu croyais
Démons, jouez de votre reste,
Et quoi ? Vous n’osez vous montrer ?
Il paraît des greffiers et des procureurs qui se battent avec des démons. Les robins ont le dessus.
Quittons ces lieux, et que la peste
Nous crève avant que d’y rentrer.
finacte
Acte iii
Scène 1
Urgande, Amadis
urgande
Air : Ne m’entendez-vous pas
Dans ces lieux plein d’appas,
On goûte mille charmes.
La fierté rend les armes,
Dans ces lieux plein d’appas,
Ne m’entendez-vous pas ?
amadis
Air : Le prévôt des marchands
Loin du doux objet de mes vœux,
Je baille et je dors en ces lieux.
Laissez-moi pleurer à mon aise,
Laissez en paix un pauvre amant.
urgande
Se peut-il que rien ne vous plaise ?
amadis
Tout cela m’est indifférent.
urgande
Air : Vous avez bien de la bonté
Oriane est dans ce séjour.
amadis
Que dites-vous madame ?
urgande
Vous l’allez voir.
amadis
Que son retour
Va chatouiller mon âme.
urgande
Vous lui conterez votre amour
Elle n’y sera plus sévère.
amadis
Que puis-je faire ?
Madame, en vérité,
Vous avez bien de la bonté.
Je tremble un peu, mais je ne sais pourquoi.
urgande
Et quoi, vous tremblez ? Cela ne sied point à Amadis, j’aime qu’on soit ferme mon ami.
amadis
Air : Des fraises
Madame, quand je verrais
Tous les diables ensemble,
Jamais je ne tremblerais.
Mais que je voie une fille que j’aime. Là,
Seulement le bord de son cotillon,
Sot et très sot je parais
Je tremble, [je tremble, je tremble].
Urgande sort.
Scène ii
Oriane, Amadis
oriane
Air : Lairelanlaire
Fermez pour jamais mes yeux,
Je perds ce que j’aime le mieux,
Je n’ai plus besoin de lumière,
Laire la laire lan laire etc.`
Laire la mais qui va là ?
oriane et amadis, ensemble
Air : Ma voisine, es-tu fâchée
Oh, ciel, le puis-je croire ?
oriane
Amadis, vous vivez !
amadis
Ma vie est une histoire.
oriane
Amadis, vous vivez !
amadis
Oui, je vis, ma princesse.
oriane
Et moi je vis aussi !
amadis
Parbleu, notre diablesse
En a le démenti.
oriane
Air : Je l’ai perdu, ce misérable
Je vous aime, tout inconstant.
amadis
Vous accusez un innocent,
Je n’en aimais jamais une autre.
oriane
Eh bien, vivons donc l’un pour l’autre.
Air : Que j’estime mon cher voisin
Vous aurez peine à m’engeôler,
Mais hélas, je suis bonne.
On n’a qu’à savoir me parler,
Aussitôt, je pardonne.
Écoutez ce rondeau, il vous mettra dans votre fort.
Oui, je vous aime,
Cher Amadis, tout vous le dit,bis
Pour vous mon ardeur est extrême,
J’en ai pensé perdre l’esprit.
Oui, je vous aime.
amadis
Écoutez à votre tour ce rondeau, il vous rassurera.
Air : Le grand seigneur m’a choisi
Je vous promets,
Aimable tourterelle,
Je vous promets
De ne changer jamais.
oriane
Je vous promets
D’être toujours fidèle,
Je vous promets
Un cœur neuf et tout frais.
oriane et amadis, ensemble
Air : Vivons
Vivons, vivons, dans l’espérance,
Vivonsbis dans l’espérance.
Scène iii
Urgande, Amadis, Oriane
urgande
Air : Êtes-vous de chantilly
Tout est-il bien réuni ?
amadis
Oui, madame Urgande, oui.
oriane
Mais je dépends de mon père.
urgande
Je me charge de l’affaire,
Je lui ferai dire oui.
oriane, amadis, ensemble
Madame, en vérité,
Vous aurez bien de la bonté.
urgande
Air : Zeste, zeste
Vous allez être heureux,
Pour vous je m’intéresse,
Votre Amadis sans cesse
Comblera tous vos vœux.
Que le drôle fait rage.
amadis
Air : non, je ne ferai pas
Je dois à l’univers une illustre aventure,
Ce superbe palais, de magique structure,
Par moi doit être ouvert, il contient des amants
Qui près de leurs Iris, dorment depuis cent ans.
urgande
Refrain connu
Le temps passé n’est plus,
Fallala talarara
Le temps passé n’est plus,
Ma foi, vous n’en trouverez plus.
Il y a longtemps que les amants ne s’endorment plus auprès de leur maîtresse.
Air : Hé bien
Ce palais est rempli d’amants
Qui passent d’aimables moments,
Ils savent dire j’aime
Soudain
On leur répond de même,
Cela va bon train.
amadis
Air : Quand le péril [est] agréable
Faisons comme eux, belle Oriane,
Aimons-nous sans nous endormir.
L’amant qui dort ne peut servir
La mode le condamne.
Scène iv
Amadis, Oriane, Urgande, Chœurs d’amants modernes
urgande
Air : Les tantalari
Amants timides et transis
Ici vous n’êtes plus admis.
En amour il faut de l’esprit,
Sur le lit tantalarara
Sur le lit tantalari.
vaudeville
Air : à noter
Autrefois, la fille à vingt ans
Ignorait le doux badinage.
Et ne pouvait voir des amants
Que pour parler de mariage.
Ce n’est plus l’usage à présent,
Aujourd’hui sans parler d’emplette,
Tourelourirette,
Un amant prend les devants.
Autrefois on était constant
Même en dépit du mariage,
L’hymen n’était point rebutant,
On en faisait un tendre usage.
Ce n’est plus l’usage à présent,
Aujourd’hui l’épouse coquette
Tourelourirette,
Avec l’amant prend les devants.
polichinelle
Autrefois j’avais seul le droit
D’amuser par des rapsodies
Et d’assembler Paris chez moi,
Avec de minces parodies.
Mais hélas, Messieurs, qui l’eut cru !
Aujourd’hui sur moi l’on empiète,
Tourelourirette,
Amadis a déjà paru.
Fin