Jean-Étienne Despréaux
Syncope, Reine de Mic-Mac
Parodie de Pénélope
Représentée devant leurs Majestés à Versailles
le 31 janvier 1786
Ballard, 1786
definitacteur, tic-tac tictac
definitacteur, l’enrhumé lenrhume
Costumes n
Syncope, habit souci à l’antique, grande mante bordée de pleurs
Unique, capote de taffetas ciré, par dessus un habit de guerrier, grande perruque blanche
Tic-Tac, habit de housard bleu anglais, brodé d’argent, ceinture et brodequin couleur rose
L’Enrhumé, habit de pédant
Nasus, couronne sur la tête, pelisse et manchon
Alerte, couronne pendue à sa ceinture et des béquilles
Cléone, habit russe
Femmes de chambre et blanchisseuses de Mic-Mac, chemises drapées, coiffures à la créole, boucles d’oreilles, colliers, bracelets et ceintures en coquilles
Vingt amoureux transis, pelisse et manchons
Deux Coryphées, même costumes
Personnages dansants et chantants n
Premier acte m
Amoureux transis : Sieurs Abraham, Simonet, Leberton, Blanche, Lebel, Coindé, Deshayes, Rivet
Cuisiniers : Sieurs Barré, Ducel, Coulon, Guillet
Suivantes de Syncope : Demoiselles Lafond, Masson, Leclerc, Siville
Blanchisseuses : Demoiselles Coulon, Hiligeberg, Ester, Puisieux, Simon, Dancour
Peuple
Les deux coryphées, les quatre cuisiniers : Sieurs Delahaix, Clerget
Jokeys : Demoiselle Nanine, Simon, Sieurs Laborie, Lachapelle
Maître d’hôtel : Sieur Auguste
Divertissement du dernier acte m
\persliste[Sieurs Laurent, Gardel, J. Favre
en femmes, Sieurs Barré, Ducel, Coulon, Guillet, I.] Cosaques
Russiens : Demoiselle Guimard, Sieur Nivelon
Lapons : Sieur Guaienetey, Demoiselle Langlois, Dame Perignon
Peuple, avec les habits du second acte de \emph Panurge, lesquels ils auront sous leurs pelisses : Sieurs Abraham, Simonet, Deshayes, Rivet, Leberton, Blanche, Lebel, Coindé
Personnages n
Syncope, reine de Mic-Mac, \emph Pénélope : Demoiselle Gontier
Unique, roi de Mic-Mac, \emph Ulysse : Sieur Dugazon
Tic-Tac, fils d’Unique et de Syncope, \emph Télémaque : Sieur Trial
L’Enrhumé, confident de Tic-Tac, \emph Eumée : Sieur Chénard
Nasus, premier amoureux transi, \emph Nésus : Sieur Rozières
Alerte, père d’Unique, \emph Laerte : Sieur Désessarts
Cléone, dame de compagnie, \emph Suivante de Pénélope : Demoiselle Rosalie
Femmes de chambre
Blanchisseuses, de Mic-Mac, \emph Naïades : Demoiselle Carline
Vingt amoureux, transis, \emph poursuivants : Sieurs Chateaufort et Dupresnoy
Députés de la cuisine : Demoiselle Carline
Jockeys
Peuple
La scène est à Mic-Mac, île de la mer Glaciale.
Syncope, Reine de Mic-Mac
Acte i
Le théâtre représente une salle à manger, vingt amoureux transis sont à boire et à chanter au fond du vestibule.
Scène i
Syncope est dans un coin sur le devant de la scène, occupée à broder un gilet pour son mari
definitacteur, chœur d’amoureux chœurdamoureux
chœurdamoureux
Air : Zon, zon, zon, que le vin est bon
1
Dans les climats les plus lointains,
Laissons les fous et les taquins
Courir après la gloire.
Qu’ils s’y coupent jambes et bras
Pour faire inscrire leur trépas
Au temple de mémoire.
Aimons la Dame de céans,
Buvons beaucoup, vivons cent ans,
Et disons, zon,
Que son vin est bon !
Toujours il en faut boire.
2
Que sous de sanglants étendards,
Partout ils suivent le dieu Mars,
Qu’ils y risquent leur vie.
Nous, sous l’étendard des amours,
Nous désirons passer nos jours.
C’est là notre folie.
Aimons la dame de céans,
Buvons beaucoup, vivons cent ans,
Et disons, zon,
Que son vin est bon !
Il vaut bien l’ambroisie.
3
Le sage ne répand le sang
Que pour faire un repas friand.
Alors rien n’est féroce.
Lorsque l’on trouve le plaisir,
C’est bien fou de n’en pas jouir,
Pour chercher plaie ou bosse.
Aimons la dame de céans,
Buvons beaucoup, vivons cent ans,
Et zon, zon, zon,
Buvons son vin fort bon,
En attendant la noce.
Scène ii
Syncope et sa suite
syncope
Air : J’avais pour tout mon domestique
coupletvaud 0
4
Depuis vingt ans cette canaille
Trait mes vaches, et boit mon lait,
Et depuis vingt ans je travaille
Le jour à broder ce gilet,
La nuit, pour tromper leur attente,
Je découds et je suis contente.
Quand je découds...ter
Je suis contente.
5
Dans le vin ils nagent sans cesse,
Et moi je nage dans les pleurs.
Leurs yeux s’allument par ivresse,
Les miens s’éteignent de douleur.
La nuit, etc.
6
Mon fils, en vain, cherche sur terre
S’il ne trouve pas son papa.
Il faut que je sois adultère,
Lorsque ce gilet finira.
La nuit, pour tromper leur attente,
Je découds et je suis contente.
Quand je découds...ter
Je suis contente.
definitacteur, chœur d’amants chœurdamants
chœurdamants
Aimons la dame de céans,
Buvons beaucoup, vivons cent ans,
Et zon, zon, zon,
Buvons son vin fort bon,
En attendant la noce.
Scène iii
Les députés de la cuisine et les précédents
un député
Air : Pour une fois, c’n’est pas la peine
coupletvaud 0
7
Si vous êtes la maîtresse,
Chassez de cette maison
Des amoureux, qui sans cesse
Dépensent tout à foison.
Tous les jours dans la cuisine
Ils ne font que carillon.
En vérité, cela ruine,
Ils mangeront votre maison.
8
On voit l’un tourner la broche,
L’autre arrose l’aloyau.
L’un met du feu sous la cloche,
L’autre en met dans un réchaud.
Les uns hachent des ciboules,
Un autre plume un chapon.
Ils ont détruit toutes vos poules,
Ils mangeront votre maison.
Madame, on ne peut plus y tenir, ce qu’ils gazouillent n’est pas croyable.
syncope, à part
Sots que vous êtes, que ne m’en débarrassez-vous par quelque indigestion !
premier député
Il est honteux de voir des rois godailler de la sorte.
syncope
Air : Des fraises
Ainsi que vous, mes enfants,
Je suis fort en colère,
Ces lâches de poursuivants...
les députés
Vous grugent depuis vingt ans.
syncope
Que faire, que faire, que faire ?
un des députés
Air : J’veux être un chien
Depuis vingt ans que votre époux
S’est en allé d’auprès de vous,
Vous n’en avez pas de nouvelles.
Puisqu’il ne vous a pas écrit,
Sans doute il a rendu l’esprit.
Or, pour vous consoler,
Faut, sans vous désoler,
Faire aujourd’hui noces nouvelles.
definitacteur, chœur d’amants transis chœurdamantstransis
chœurdamantstransis
Canon
Air : Je suis un fou
Nous sommes fous
De vos appas, épousez-nous !
Nous sommes fous, etc.
Ils sortent.
premier député
Madame, défendez qu’on leur donne du vin, car ils s’enivrent toute la journée.
syncope
Air : N’en demandez pas davantage
Je sens votre malheureux sort,
Avec vous mon cœur le partage.
Si, vraiment, mon époux est mort,
À l’un de ces rois, je m’engage.
Mais, j’attends mon fils.
Ah ! mes chers amis !
N’en demandez pas davantage.
definitacteur, chœur des députés de la cuisine chœurdesdeputesdelacuisine
chœurdesdeputesdelacuisine
Même air
Régaler vingt rois chaque jour,
C’est déranger votre ménage.
Ils disent qu’ils vous font l’amour,
Ils ne font que du gaspillage.
syncope
Ah ! mes chers amis !
Ah ! j’attends mon fils.
N’en demandez pas davantage.
Les députés sortent.
Scène iv
Syncope et ses suivantes
Ô Jupiter ! Neptune ! tous les dieux ! combien attendrai-je encore après mon époux ?
Air : Nages toujours et ne t’y fie pas,
coupletvaud 0
9
Dans ma maison je suis esclave,
Vingt amoureux mangent mon bien,
Et du grenier jusqu’à la cave,
Bientôt on ne trouvera rien.
J’attends le père,
J’attends le fils,
Cette attente me désespère.
J’attends le père,
J’attends le fils,
Je ne reçois aucun avis.
10
Mon fils, je crains qu’une tempête
N’aille secouer ton bateau !
Que tu ne te casses la tête,
Ou que tu ne tombes dans l’eau.
J’attends le père,
J’attends le fils,
Cette attente me désespère.
J’attends le père,
J’attends le fils,
Je ne reçois aucun avis.
Scène v
Nasus, Syncope et sa suite
nasus, parlant du nez
Air : Reçois dans ton galetas
coupletvaud 0
11
Tremblez qu’il ne vienne ici,
Ou c’est ton heure dernière.
Oui, le fils de votre mari
Sera jeté dans la rivière.
Oui, s’il met un pied sur le bord,
Sous les flots il trouve la mort.bis
syncope
Mon fils ! ah !
nasus
12
Quoique né fier et brutal,
Je n’ai point l’âme coquine.
De bonne foi, je trouve mal
Que, sans raison, on l’assassine.
Pour ne pas être du projet,
Demain j’emporte mon paquet.bis
cléone
Air : Des fraises
De vingt qui vous font la cour,
Monsieur, seul est honnête,
Répondez à son amour.
syncope, tout bas
Hélas ! il est chaque jour
Plus bête, plus bête, plus bête.
nasus
Air : En revenant de Saint-Denis
Seul, je mérite votre main,
Et votre fierté me refuse.
Madame, adieu, je pars demain,
Je vois bien qu’ici l’on m’amuse.
Votre fils on expédiera,
Je m’en moque comme de ça.
Oui, pour le sauver du naufrage,
Primo, je veux le mariage.
Il sort.
definitacteur, chœur de femmes chœurdefemmes
chœurdefemmes
Air : Tôt, tôt, Carabo
Ô ! malheureuse mère !
Votre fils va périr ;
Faites vite un beau père,
Il peut le secourir
Sans sortir
D’ici
Carabi,
Bientôt,
Carabo.
syncope
Mon cher fils va périr !
chœur
Le lairez-vous, le lairez-vous, le lairez-vous mourir ?
Scène vi
Syncope
syncope
Air : Vaudeville,
Ah ! je suis sur le qui vive,
Mon époux il faut trahir !
chœur
Air : Tôt, tôt, Carabo
Ô ! malheureuse mère !
Votre fils va périr ;
syncope
Suite de l’air : \provair de Figaro
Quelle affreuse perspective !
Ou bien mon fils va mourir.
chœur
Air : Tôt, tôt, Carabo
Ô ! malheureuse mère !
Votre fils va périr.
syncope
Suite de l’air : \provair de Figaro
Grands dieux ! quelle alternative !
Je n’espère en ce moment
Que sur la bonté du vent.bis
chœur
Air : Tôt, tôt, Carabo
Ô ! malheureuse mère !
Votre fils va périr.
syncope, à ses suivantes
Avec votre petit air gai, croyez-vous me consoler ?
chœurdefemmes
Ô ! malheureuse mère !
Votre fils va périr.
Scène vii
Peuple, l’Enrhumé, les précédents, deux coryphées
Air : R’lan tan plan
Madam’, voici votre enfant,
R’li, r’lan, r’lan tan plan,
Tire lire en plan,
Madam’, voici votre enfant,
J’avons vu son navire.
chœur
J’avons vu son navire,
R’lan tan plan tire lire.
les coryphées
Il est poussé par le vent,
R’li, r’lan, etc.
Tout droit dans son empire.
chœur
Tout droit dans son empire,
R’lan, etc.
les coryphées
Il est grimpé sur un banc,
R’li, r’lan, etc.
J’l’avons entendu dire.
chœur
J’l’avons entendu dire,
R’lan, tan plan etc.
les coryphées
Je m’en vais revoir maman,
R’li, r’lan, etc.
Je m’en vais revoir maman,
Ah ! combien je vais rire.
lenrhume
Air : Bonnes gens,
La moitié de vos larmes,
Madame, il faut essuyer.
Dissipez vos alarmes,
Tâchez de vous égayer.
Tic-tac revient, vent en poupe,
Il fend l’humide élément.
Oui, lui, ses gens et sa troupe,
Seront ici dans l’instant.
Le chœur reprend la reprise.
syncope, tombant en syncope
Aïe ! aïe ! aïe ! qu’on me tue aussi.
lenrhume
Même air
Les chagrins de la vie
Sont les ombres d’un tableau.
Plus cela contrarie,
Et plus l’effet en est beau.
C’est ainsi que tout s’enchaîne,
Pleurs et ris, crainte et désir,
C’est en sortant de la peine
Qu’on sent le prix du plaisir.
cléone
Paix donc, Messieurs, il ne s’agit pas de chanter dans ce moment. Comme on doit assassiner Tic-tac, allez lui dire qu’il se sauve.
lenrhume
Comment ?
cléone
Comme il pourra.
Air : Monsieur de Catinat
Pour éloigner Tic-tac, au devant de lui, cours.
La Reine de Mic-Mac en toi seul a recours.
lenrhume, sortant lentement
Je voudrais vainement lui donner du secours,
Dans un péril si grand, et des instants si cours.
Scène viii
Syncope, ses femmes et Cléone
syncope, revenant à elle
Je parierais mon petit doigt qu’il est mort. Il n’y avait que Nasus qui pouvait le défendre, et Nasus ne veut pas.
Air : Nous nous marierons dimanche
Tiens, va voir ce Roi,
Dis-lui que je crois
Pouvoir l’épouser dimanche,
Et que mon cœur
En sa faveur
Se penche.
Que je me plains,
D’un fils je crains
Qu’on tranche
La nuque aujourd’hui.
S’il le sauve, à lui
Je m’abandonne dimanche.
Cléone sort.
chœurdefemmes
Air : Ah ! dam’ cadet
Seule en son lit passer les nuits,
Fait que l’on a peur des esprits.
Il vaut mieux avoir deux maris,
On craint moins le veuvage,
Et l’un reste au logis,
Quand l’autre voyage.
syncope
Ô ! que je suis fâchée de ce que j’ai promis ! ô mon dieu ! mon dieu ! que je suis fâchée !
Air : Jeune fillette que l’amour guette, opéra-comique – de Cécile
coupletvaud 0
13
Je vois l’enfer, et j’aperçois le diable,
Il me menace, et fronce les sourcils.
J’entends Cerbère et sa voie effroyable,
Je vois des diables sur des grils,
Une ombre errante,
Et gémissante,
Me remplit d’épouvante.
14
C’est mon mari ! je reconnais son ombre.
Ah ! qu’il est laid ! dieux ! comme il est changé !
Comme la mort lui donne un regard sombre !
Je lui trouve un air affligé.
Son ombre errante, etc.
Scène ix
Syncope, sa suite
chœurdamantstransis
Air : Je suis un fou
Nous sommes fous
De vos appas, épousez-nous.
Nous sommes, etc.
syncope
Air : Folies d’Espagne
De vos chansons vous me rompez la tête,
En vous je vois des amoureux transis.
Mais ce que je trouve plus malhonnête,
C’est de vouloir assassiner mon fils.
chœurdamantstransis
Air : Mon bon André,
Qui pourrait me croire capable
De ce dessein abominable ?
Ce n’est pas moi.
Serait-ce toi ?
syncope
N’importe qui me l’a dit, je le sais, marauds que vous êtes. Ne devriez-vous pas être honteux du bacchanal que vous faites ici depuis vingt ans ?
chœur
Air : Je suis un fou
Nous sommes fous, etc.
syncope
Rendez-moi mon fils, qu’il me montre l’extrait mortuaire de mon époux, et nous tirerons au doigt mouillé qui de vous le remplacera.
chœur
Air : Du haut en bas
C’est un détour.
syncope
Non, vrai, ce n’est pas une feinte.
chœur
C’est un détour.
syncope
Je ne vous demande qu’un jour.
D’honneur vous me glacez de crainte,
Non, je ne ferai plus de feinte.
chœur
C’est un détour.
syncope
En vérité, Messieurs, vous êtes incroyable. On n’a jamais fait l’amour aussi cruellement. Eh bien ! prenez le reste de ce que vous n’avez pas mangé, emparez-vous de mon château, vendez mes robes, mon linge, mes chiens, mon perroquet. Je vais faire retenir une place à la diligence pour aller chez mon père Nacarre, mais laissez-moi mon enfant.
chœur
Nous sommes fous, etc.
syncope, à part
Ils m’ennuient plus que jamais !
chœurdefemmes
Air : Carabi
Ô malheureuse mère !
Votre fils va périr.
syncope
Voulez-vous vous taire, Mesdemoiselles, n’allez-vous pas recommencer la même chanson.
Scène x
Tic-tac, Syncope et les précédents
tictac
Air : Ah ! le bel oiseau, maman
Maman, baisez votre enfant,
Il a fait un bon voyage.
Maman, baisez votre enfant,
Il n’a point eu d’accidents.
syncope
Ton cher père est-il vivant ?
Tu n’en sais rien, je le gage.
tictac
Pardonnez, chère maman,
Il approche du rivage.
Maman, baisez, etc.
syncope
Ah ! que je suis bien aise et fâchée de te revoir ! Si tu savais ce que je ne veux pas te dire...
tictac
Quoi donc ?
syncope
Ce n’est pas le moment. Voyons, donne-moi des nouvelles de ton père !
tictac
Air : La madelaine
coupletvaud 0
15
Il n’a pas un sol de vaillant,
Mais il revient chargé de gloire.
Il a dépensé son argent,
Sans jamais quitter la victoire.
Il arrive dans ses états,
Et de son bras
Il rossera,
Et punira,
Et cætera.
chœur, à part
Sur la reprise de l’air précédent
En vain tu comptes sur cela.
On te prendra
Malgré tout ça,
Et tu seras,
Et cætera.
tictac
16
On dit qu’il est vif et prudent,
Colère, hardi, brutal, honnête ;
Que, lorsqu’on l’obstine un instant,
De son sabre il abat la tête.
Nous saurons le vrai de cela,
Car bientôt il arrivera,
Et punira,
Et cætera.
chœur
En vain tu comptes sur cela.
On te pendra
Malgré tout ça,
Et tu seras,
Et cætera.
tictac
17
On vend sa vie et son portrait,
On le montre en cire à la Foire.
Aucun ne croit ce qu’il a fait,
Mais l’on achète so histoire.
Nous saurons le vrai de cela,
Car bientôt il arrivera,
Et punira,
Et cætera.
chœur
En vain tu comptes sur cela.
On te pendra
Malgré tout ça,
Et tu seras,
Et cætera.
syncope
Air : Mon père était broc
Mon fils, que faisons-nous ici ?
tictac
Je n’en sais rien, ma mère.
syncope
Je vais attendre mon mari.
tictac
Je vais voir mon grand-père.
syncope
Je vais rebroder,
Je vais repleurer,
Ce sont là tous mes charmes,
Et dans quelques temps,
Je viendrai céans
Répandre encor des larmes.
Ils s’embrassent.
Ôtez votre habit, vous l’abimerez. On n’a jamais voyagé paré de la sorte.
finacte
Acte ii
Le théâtre représente un lieu désert, où l’on voit un ancien monument, et au fond un lavoir pittoresque.
Scène i
Alerte, l’Enrhumé, Tic-tac
alerte, avec des béquilles
Je suis fort inutile ici, ainsi, aidez-moi à rentrer dans ma maison.
lenrhume
Nous avions préparé un petit ballet pour allonger le temps.
alerte
Pourquoi faire des dépenses qui ne servent à rien ? Je n’en veux point. Je n’en veux point. Donnez-moi mes lunettes, c’est le flambeau de la vieillesse.
lenrhume, les lui donnant
Les voilà.
On entend le tonnerre.
alerte
Dieux ! quelle tourmente !
Sur l’onde écumante,
Et je vois dans les flots
La peur des matelots.
Je sens que je radote, mais c’est qu’à mon âge je n’ai plus le temps d’espérer.
Il sort. Orage.
Scène ii
Unique seul
unique
Air : Suis-je en France,
Suis-je en Grèce ? suis-je en Russie ?
En Afrique ? ou bien en Asie ?
...........
...........
Trouverai-je dans ces lieux
Des ours, des hommes, ou des dieux ?
Que de peines pour se faire une renommée ! Voici le quarante-troisième naufrage que je fais. Quelle diable de vie ! cela ne finira donc jamais. Ce lieu ressemble singulièrement au lavoir où mes blanchisseuses se rassemblaient. Je crois les entendre. Ah ! quel bonheur, si j’étais à Mic-Mac.
Il sort.
Scène iii
Blanchisseuses de Mic-Mac
definitacteur, chœur de blanchisseuses chœurdeblanch
chœurdeblanch
Air : Vraiment, ma commère, oui
Le jour a chassé la nuit,
Un ciel serein nous sourit.
Je sens que le vent s’apaise,
Ici nous seront à l’aise.
chœur
Vraiment, ma commère, oui.
Elles se mettent à travailler autour du lavoir.
une blanchisseuse
Air : Tôt, tôt, tôt, battez chaud,
coupletvaud 0
18
Tous les hommes sont blanchisseurs,
Et même les plus grands seigneurs.
Chacun savonne en Chine, en France,
Gens de cour, prélats, magistrats,
Le héros avec ses soldats,
Sait vous savonner d’importance.
Tôt, tôt, tôt, battons chaud.
Tôt, tôt, tôt, bon courage,
Vive à jamais le savonnage.
Le chœur reprend le refrain Tôt, tôt, tôt.
19
L’homme, dès l’instant qu’il est né,
Est savonneur ou savonné.
Pédants, maîtres, femme ou maîtresse
Vous le savonnent chaque jour.
Et quand il est vieux à son tour
Ses gens il savonne sans cesse.
Allons donc, venez donc,
Mais paix donc. À cet âge,
L’on donne à tous le savonnage.
Allons donc, etc.
20
Manquez à quelqu’un de renom,
Vous en recevrez un savon.
Mais là, de la belle manière,
Le savonnage va grand train,
Il vous rince votre béguin,
Mieux qu’avec de l’eau de rivière.
Tôt, tôt, etc.
Scène iv
Les acteurs précédents, Unique
unique
Air : Si les galants de la ville,
Dites-moi, la jeune fille,
Le vrai nom de ce pays ?
Comment se nomme la ville
Qu’on voit ici vis à vis ?
une blanchisseuse
Vous ne lisez pas l’Histoire,
Ou bien vous lisez sans soin,
Car Mic-Mac porte sa gloire
Dans les climats près et loin.
unique
Croyez-vous Syncope en vie ?
Son fils n’est-il pas bien grand ?
Alerte a-t-il la manie
De prêcher à chaque instant ?
une blanchisseuse
Air : On compterait les diamants
Le fils est aussi grand que vous,
Mais, il ne promet pas grand chose,
Et c’est toujours sur les genoux
De sa maman qu’il se repose.
Toujours elle verse des pleurs,
Et n’a pas le moindre courage
Pour renvoyer tous les grugeurs\definition Grugeur Celui, celle qui gruge, qui mange, qui dépouille Littré, 1872-77
Qui la veulent en mariage.
Mais... n’est-ce pas à Monsieur Unique que j’ai l’honneur de parler ?
unique
Comment, est-ce que vous me reconnaissez ?
la blanchisseuse
Pardi, c’est moi qui vous blanchissais avant votre départ.
unique
En ce cas-là, dites-moi...
la blanchisseuse
Je n’ai pas le temps de causer. Adieu, Monsieur. Cependant je vous avertis, en amie, de ne pas compter entrer tout d’go dans votre maison.
Elles sortent.
Scène v
Unique seul
unique
Air : La bonne aventure
La vie est en vérité
Un fardeau terrible.
Être toujours tourmenté,
Faire l’impossible,
Combattre pendant vingt ans,
Monstres, hommes, éléments,
Et combattre encor céans,
C’est par trop pénible.
Scène vi
Tic-tac, Unique, l’Enrhumé
tictac
Serait-ce vous, Monsieur, qui venez d’arriver à la nage ?
unique
Air : J’avais égaré mon fuseau,
Voyant mon bateau prendre l’eau,
Je suis sauté dans la rivière.
Je ne regrette qu’un chapeau,
Une canne et ma tabatière.
N’ayant plus rien,
Je ne crains rien,
De tout je me passerai bien.
[bis]
Plus je me trouve malheureux,
Et plus j’en rends grâce aux dieux.
tictac
Air : La Camargo
Répondez, Monsieur,
Calmez ma frayeur,
Aviez-vous avec vous
De maman l’époux ?
Unique est son nom,
Répondez-moi donc !
unique
Hélas ! il est au fond
Du gouffre profond.
tictac, pleurant
Deuxième reprise de l’air
Je n’ai plus de papa,
Qui donc me conduira ?
lenrhume
Ami, que feras-tu ?
Ton père est perdu.
unique
Dieux ! quels charmes !
Que les larmes
Que je voi
Répandre pour moi !
On reprend le rondeau.
tictac
Parlez franchement,
Dites-moi vraiment,
Aviez-vous avec vous
De maman l’époux ?
Unique est son nom,
Répondez-moi donc !
unique
Vraiment, il est au fond
Du gouffre profond.
Duo
tic-tac et l’enrhumé, ensemble
Air : Il pleut, bergère
Ah ! cachez à sa mère
Ah ! cachez à ma mère
Le sort de son époux.
Tous les jours elle espère
Qu’il reviendra chez nous.
Et puisque l’espérance
Soutient les malheureux,
Essuyons par prudence,
Essuyons-nous les yeux.
Ils tirent plusieurs mouchoirs, et s’essuient les yeux.
trio, ensemble
Air : La sagesse est un trésor,
tictac
Trompez, trompez ses douleurs.
lenrhume
Trompez, trompez sa faiblesse.bis
tictac
Elle est sujette aux vapeurs.
lenrhume
Elle en mourrait de tristesse, etc.
ensemble, ensemble
Trompons, trompons la faiblesse, etc.
unique
Mets donc tes lunettes, mon cher l’Enrhumé. Quoi ! depuis un quart d’heure tu ne me reconnais pas ?
lenrhume
Air : L’avez-vous vu, mon bien aimé,
À qui diable était cette voix ?
Je crois la reconnaître.
Serait-ce Unique que je vois ?
Non, ce n’est pas mon maître.
Il était brun, vous êtes blond,
Il était court, vous êtes long.
Ce n’est pas lui,bis
Ma bêtise est extrême.
unique, ôtant sa perruque
Si fait, c’est lui,bis
C’est Unique lui-même.
tictac
De ma naissance, c’est l’auteur.
Que je le baise de bon cœur,
Des deux côtés,
Vous permettez ?
Ils s’embrassent.
unique et tic-tac, ensemble
Quel bien suprême
De baiser ce qu’on aime !
unique
Voilà beaucoup de temps perdu, dépêchons-nous de rentrer au château.
tictac
À propos, papa, j’oubliais de vous dire que ma mère a une vingtaine d’amoureux.
unique, avec surprise
Comment, vingt amoureux !
lenrhume
Depuis votre départ, ils se sont emparés de la maison. Ils y commandent en maîtres, et Syncope les craint comme le feu.
unique
Est-ce que ?...
lenrhume
Oh, non ! Je ne crois pas, mais je vous conterai cela en chemin.
unique
Mon fils, as-tu du cœur ?
tictac
Tout autre que mon père l’éprouverait sur l’heure.
unique
Ceci n’est pas de toi, mais cela prouve ta mémoire.
tictac
Mille morts, mon père, j’affronterai. Derrière vous je ne crains rien. Je me battrai comme un enragé.
unique
Il faut faire mettre dans le journal de Mic-Mac que je suis mort. Cette redingote et cette perruque, que Minerve m’a prêtées, me déguisent assez bien, et nous surprendrons nos coquins.
Air : Confiteor
Pour nous venger en peu de temps,
N’en parlez pas à votre mère.
Je veux tuer ces insolents,
C’est le moyen de m’en défaire.bis
Oui, chaque coup \ibis\ sera sanglant,
Et c’est l’affaire d’un instant.
Oui, c’est l’affaire d’un instant.
Ils reprennent en trio.
Oui, chaque coup, etc.
finacte
Acte iii
Le théâtre représente les palais des souverains de Mic-Mac.
Scène i
Tic-tac, Unique
tictac
Air : Vous m’entendez bien
Papa, ma mère suit mes pas.
unique
Allez annoncer mon trépas.
Je veux, seul avec elle...
tictac
Hé bien !
unique
Faire scène nouvelle.
tictac
Je n’y comprends rien.
Ils sort.
Scène ii
Unique seul
unique
Parbleu ! voilà de grand marauds. Avec quel front ils mangent mon bien ! Que de sottises ne m’ont-ils pas dit. Il faut que j’aie bien de la patience !
Air : En jupon court, en blanc corset
Comme d’un nuage de larmes,
Vingt fois mes yeux se sont couverts.
Ma foi, si j’avais eu mes armes,
J’exterminais tous ces pervers.
Air : Du haut en bas
À petit feu,
Faisons ici mourir ma femme,
À petit feu,
Oui, faisons la souffrir un peu.
Pour savoir ce qu’elle a dans l’âme,
Oui, oui, faisons mourir la dame,
À petit feu.
Scène iii
Syncope, Unique
syncope, dans un grand fauteuil
Voyons, bon homme, contez-moi tout ce que vous savez. Vous dites donc que ?...
unique
Air : Grégoire,
coupletvaud 0
21
J’ai vu votre cher mari
En Chine, en Mississipi,
Je l’ai vu près de l’Afrique,
Je l’ai vu dans l’Amérique,
Partout il se portait bien.
syncope, avec joie
Fort bien ?
unique
Très bien.
syncope, amoureusement
Ah ! son bonheur fait le mien.
unique
Il disait, voyant une dame,
J’aime ma femme.bis
22
Lorsqu’à Troyes il aborda,
Avec sa canne il traça,
Sur le sable du rivage,
De profil votre visage.
Il était fort ressemblant.
syncope, avec surprise
Vraiment ?
unique
Vraiment.
Puis il nous dit en chantant,
Je me moque de chaque Dame,
J’aime ma femme.bis
23
Un soir, mangeant du jambon,
Chez le père Agamemnon,
On dit en parlant d’Achille,
Briséïs est fort gentille,
C’est un vrai morceau friand.
syncope, avec dépit
Friand ?
unique
Friand.
Chacun dit un mot galant.
Lui seul dit, parlant de la dame,
J’aime ma femme.bis
syncope, amoureusement
Air : Si jamais je prends un ami,
Depuis vingt ans je t’attends,
Et depuis vingt ans je soupire.
Depuis vingt ans tout mon temps
Se passe à pleurer mon martyre.
Quelquefois,
En dormant, je crois
Lui parler, mais ce n’est qu’un rêve.
je m’éveille en sursaut,
Et je fais un saut
En bas du lit, et j’endêve\definition Endever Avoir grand dépit de quelque chose Acad. 1762.
Preuve que son image ne me quitte pas, c’est que voilà son portait à l’huile que je porte toujours à ma ceinture.
unique, déroulant un tableau
Voici le tableau fidèle de tous ses travaux. Ils sont dessinés de sa propre main.
syncope, dans l’enchantement
Ah ! n’oubliez pas un mot.
unique
Il composa lui-même l’air et les paroles, et tous les soirs il nous les chantait.
syncope
Et dès qu’on entendait sa séduisante voix, tout le monde accourait sans doute ?
unique
Air : La nuit, quand je pense à Jeannette
Sa voix avait tant de charmes,
Que chacun suivait ses pas
En pleurant à chaudes larmes.
syncope, avec abandon
Ah ! vous ne m’étonnez pas !
Mon Unique est incroyable,
Séduire est son vrai talent.
Pour bien parler, c’est un diable,
Ou plutôt un charlatan.
unique, montrant avec une baguette les différents travaux qui sont sur le tableau
Air : Rassurez-vous, belle Princesse,
coupletvaud 0
24
Voici le récit incroyable
De ce héros incomparable,
Qui des mers sut braver les eaux,
Et vingt ans courut monts et vaux.
syncope, en soupirant
Mont et vaux ?
25
Quand Achille au bord du Scamandre,
À son tour fut réduit en cendre,
Ajax voulut son bouclier,
Mais Unique en fut héritier.
syncope, indifféremment
Héritier ?
26
Ne pouvant pas prendre la ville,
En ressources toujours habile,
Il fit bâtir un beau matin,
Un très grand cheval de sapin.
syncope, avec étonnement
De sapin ?
27
Un jour, en cherchant des coquilles,
Il rencontra deux crocodiles,
Enfants de Charybde et Scylla,
De sang froid il les regarda.
syncope, en tremblant
Regarda ?
28
Ce fort géant que l’on renomme,
Qui, sans mâcher, avale un homme.
Il sut s’esquiver de sa main.
syncope, avec curiosité
Comment ?
unique
Le rendant quinze-vingt.
syncope, avec plaisir
Quinze-vingt ?
unique
Madame, je crains de vous ennuyer, car voilà une scène bien longue.
syncope
Non, non, je vous en prie, continuez.
unique
29
Calypso, riche Demoiselle,
Qui, soit disant, est immortelle,
Voulut partager son bonheur.
Il refusa jusqu’à son cœur.
syncope, avec tendresse
Quoi ! son cœur ?
unique
Oui, son cœur.
30
Chez une fameuse sorcière,
Il fit si bien qu’à sa prière
On lui rendit ses compagnons
Qu’elle avait changés en cochons.
syncope, en souriant
En cochons ?
Scène iv
Nasus, Tic-tac, l’Enrhumé, Syncope, Unique, les amoureux transis
nasus
Air : Elle est morte, la vache [à Panier]
Chez les ombres
Unique est passé,
Aux lieux sombres,
Il est trépassé.
chœurdamantstransis
Il est trépassé,bis
Oui, vraiment passé,
Et bien passé,
Et très passé.
nasus
Chez les ombres
Unique est passé,
Aux lieux sombres,
Il est trépassé.
syncope
Ce n’est pas vrai.
nasus
Il vient de se noyer dans l’instant, et cet homme l’a vu.
unique, à part, à Nasus
C’est bête, il ne fallait pas lui dire.
syncope, s’évanouit
Il a été ! il n’est plus !
unique
De son bateau brisé, je suis le déplorable reste.
syncope, revenant à elle
Vous êtes le reste d’un bateau, qu’est-ce que cela veut dire ? Expliquez-vous mieux !
unique
Madame, de l’équipage, je suis le seul qui s’est sauvé.
syncope
Au moins, je vous comprends.
Langoureusement.
Air : Est-il donc vrai, Lucile
Peut-être on vous engage
À me faire souffrir.
Tout homme qui voyage
Est sujet à mentir.
Mais, à l’âge où vous êtes,
Comment n’en pas rougir.
Sachez que vous me faites
À petit feu mourir.
Air : Réveillez-vous, belle endormie
Soyez sincère en assurance,
À mon cœur, donnez dans l’instant
Le désespoir ou l’espérance.
Unique est-il mort ou vivant ?
unique
Air : Je suis un pauvre misérable
Vu que je suis un misérable, un misérable,
Vous m’insultez.\indicreprmus Quatre fois
syncope
Ah ! c’est bien loin de ma pensée.
Air : Je suis simple, née au village
Non, bon homme,
Non, non, bon homme,
Je suis bien loin de vous fâcher.
Vous insulter ?
Moi, vous fâcher ?
Non, non, mais dites-moi donc comme
Mon cher homme,
Mon très cher homme,
De son vaisseau
Tomba dans l’eau.
unique
Puisque vous doutez de tout.
Air : Laire-là
On peut vous prouver dans l’instant
Que votre Unique est au néant.
La chose est très facile à faire.
Laire-là, etc.
En ôtant sa boucle de col.
Voici sa boucle de col qu’il me donna lui-même.
syncope
Encore plus fort, il n’en faut plus douter, car cela ne finirait pas.
syncope, au désespoir
Air : ouverture – de Panurge
Quel coup terrible !
Qu’il m’est sensible !
unique, froidement
Cris superflus !
Il n’est plus.
syncope, tombant en syncope
Il n’est plus...bis
Mon mari,bis
Mon ami.bis
unique
Cris superflus !
Il n’est plus.
syncope
Il n’est plus !
Je n’en puis plus.
Ah !
Mon cher ami !\indicreprmus Quatre fois
Mon cher mari.\indicreprmus Quatre fois
tictac, indifféremment
Consolez-vous, chère maman,
Chère maman.\indicreprmus Cinq fois
syncope, au désespoir
Ah ! mon cher enfant,
Cher enfant.\indicreprmus Treize fois
chœurdamants, en la poursuivant autour du théâtre
Madame, à l’instant,
[bis]
Il faut entre nous
Choisir un époux.
syncope, se sauvant
Non, non, non, non...
chœur, galamment
Séchez vos yeux,
C’est ennuyeux,
[bis]
Allons, Madame,
Soyez ma femme.
Il est chez les morts
Sur les sombres bords.
syncope
Mon mari, mon mari n’est plus des nôtres !
chœur, avec colère
Votre époux, votre époux est chez les autres.
unique, à part, en riant
Bon, ça prend bien,bis
Ils ne se doutent de rien.
Ça prend bien,bis
Ils ne se doutent de rien.
syncope, criant
Plus d’espoir !bis
Eh bien ! je m’en vais le voir.
l’enrhumé et unique à part., ensemble
Ça prend bien,bis
Ils ne se doutent de rien.
syncope, criant
Plus d’espoir !bis
Eh bien ! je m’en vais le voir.
chœur, gaiement
Séchez vos yeux,
C’est ennuyeux,
Allons, Madame,
Soyez ma femme.
Il est chez les morts
Sur les sombres bords.
Séchez vos yeux,
C’est ennuyeux,
Allons, Madame,
Soyez ma femme.
syncope, sanglotant
Mon mari \ibis\ n’est plus des nôtres !
chœur
Votre époux \ibis\ est chez les autres.
syncope, au désespoir
Quel coup terrible !
Qu’il m’est sensible !
unique et l’enrhumé, ensemble
Cris superflus !
Il n’est plus...
syncope, tombant en syncope
Il n’est plus !
Je n’en puis plus !
Ah ! mon cher mari !\indicreprmus Quatre fois
Mon cher ami.\indicreprmus Quatre fois
tictac
Consolez-vous, chère maman,
Chère maman.\indicreprmus Cinq fois
syncope
Ah ! mon cher enfant !
Cher enfant.\indicreprmus Treize fois
chœur
Madame, à l’instant,
Il faut, entre nous,
Choisir un époux.bis
syncope, en colère
Non, laissez-moi donc.\indicreprmus Quatre fois
chœur
Non, non, non.
syncope, s’évanouissant
Je m’en vais,
[bis]
Je m’en vais
Pour jamais.
chœur, amoureusement
Il faut, entre nous,
Choisir un époux.\indicreprmus Trois fois
Allons, Madame,
Il faut, entre nous,
Choisir un époux !bis
Décidez-vous.
unique, à part
[bis]
Ça prend bien,
Ils ne se doutent de rien.
syncope, criant
Plus d’espoir !bis
Eh bien ! je m’en vais le voir.
tout le monde, ensemble
Plus d’espoir.\indicreprmus Trois fois
deuxcol, \syncope
Je veux le voir !bis
chœur
Non, plus d’espoir.\indicreprmus Deux fois
tout le monde, ensemble
Plus d’espoir.bis
Non, plus d’espoir.bis
tictac, à Unique, à part
Mon papa, soit dit sans vous fâcher, il faut que vous ayez le cœur bien dur, car à quoi cela sert-il de lui faire de la peine ?
unique
Paix, morveux !
tictac
Allons, maman, prenez courage, il faut espérer que cela ne sera rien.
syncope
Comment ne sera rien ? Il est mort. C’était bien la peine de revenir.
Air : Que ne suis-je La Fougère
De ce héros que j’adore,
Et qui cause tous mes maux,
Allez voir s’il reste encore
Quelques morceaux sur les eaux.
Tête, bras ou pieds, n’importe,
Vous n’en auriez qu’un cheveu,
À l’instant qu’on me l’apporte,
Dans un grand coffre en ce lieu.
unique, à part, à Tic-tac
N’oubliez pas d’apporter sa canne et son épée.
tictac
C’est-là le plus nécessaire.
definitacteur, Chœur d’amoureux transis chœurdamoureuxtransis
chœurdamoureuxtransis
Nous sommes fous
De vos appas, épousez-nous.
Ils sortent.
Scène v
Unique, Syncope
unique
Que prétendez-vous faire d’un corps inanimé ?
syncope
Me déguiser comme lui.
unique
Quoi ! mourir ?
syncope
Oui.
unique
Votre fils est bien assez grand pour commander ici.
syncope
Non, il n’est pas encore majeur.
unique
Air : Reçois dans ton galetas
Sachez que vingt ans de pleurs
Vont rendre le ciel sensible.
Et que, pour finir vos malheurs,
Ici vous verrez l’impossible.
Il me l’a dit en trépassant.
Rien n’est plus sorcier qu’un mourant.bis
syncope
Les voilà déjà ?
Scène vi
Tout le monde
unique
Air : Le dieu de la tendresse,
Faut dans cette rotonde\definition Rotonde Un bâtiment de forme ronde, et par dedans et par dehors Acad. 1798,
Faire entrer tout le monde,
Surtout les amoureux,
On a grand besoin d’eux.
On verra,bis
Comment cela finira.
chœur
Nous voilà...bis
Pour terminer tout cela.
Duo
tic-tac et l’enrhumé portant un grand coffre., ensemble
Mineur de l’air précédent
De ce héros adroit,
Prudent, sage et terrible,
Repose en cet endroit.
syncope
Quoi ?
tictac
Le bras droit.
Oui, ce bras invincible,
Qui fit chose impossible,
Sera montré dans peu
En temps et lieu.
syncope, la main sur le coffre
Air : Ô Mahomet
Messieurs, je crois à cet homme incroyable,
j’ose espérer que chacun y croira.
Que son récit soit faux ou véritable,
N’importe, il faut croire ce qu’il dira.
Messieurs, je crois, etc.
unique, montant sur le coffre
Air : Nage toujours, et ne t’y fies pas,
coupletvaud 0
31
Je fais serment sur ma perruque,
Et sur le coffre que voici,
Qu’Unique va couper la nuque
Des insolents qui sont ici.
Sans rhétorique
Voici le fin.
C’est que c’est moi qui suis Unique,
Sans rhétorique
Voici le fin,
Et je me démasque à la fin.
definitacteur, chœur des poursuivants chœurdespoursuivants
chœurdespoursuivants, se sauvant
Ciel ! c’est Unique,
Fuyons sa main,
Et craignons une fin tragique.
Ciel ! c’est Unique,
Fuyons sa main,
Craignons une tragique fin.
Il prend sa canne et son épée qui sont cachées dans le coffre et poursuit les poursuivants.
Scène vii
Syncope et le peuple
32
À sa prudence, à sa colère,
Je le reconnais, mes amis.
Oui, de mon fils il est le père,
Oui, de son père il est le fils.
definitacteur, chœur de peuple chœurdepeuple
chœurdepeuple
Si c’est son père, il est son fils,
Si c’est son fils, il est son père,
Si c’est son père,
Il est son fils.
Scène viii
unique, revenant
J’ai tout tué, mes chers amis.
syncope
33
Votre vivacité m’enchante,
Comment déjà tout est fini ?
unique
D’un seul coup j’en ai tué trente,
J’en aurais tué mille. Ainsi,
Baisez le père,
Baisez le fils.bis
Baisez la mère,
Baisez le père,
Baisez le fils.
Allons-nous-en, mes chers amis.
chœur
Baisons le père, etc.
Ballet général des habitants de Mic-Mac.
Fin