Auteurs : | Carolet (Denis) |
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Parodie de : | Atys de Quinault et Lully |
Date: | mars 1736 |
Représentation : | mars 1736 Foire Saint-Germain - Marionnettes de Bienfait |
Source : | ms. BnF, fr. 9315 |
Air : Que j’estime [mon cher voisin]
La bonne déesse vient honorer Auteuil de sa présence. Mercure nous a remis la lettre d’avis, elle aura assez fait de chemin pour boire un coup. Allons, allons, debout, canailles !
Veux-tu donc te taire, maudit bossu ? As-tu le diable au corps ? Tout le monde dort et tu fais plus de bruit qu’un enragé. Oh, parbleu, je gagerais que l’amour te trotte dans la cervelle.
Ma foi, mon compère, ce sont les punaises qui m’ont éveillé. Pour l’amour, je ne le connais guère, une bonne pinte de vin d’Auteuil est tout ce que j’aime.
Tu n’es pas difficile en inclinations, mais tu as beau te défendre d’aimer, je ne te crois pas. Je te soutiens, moi, que tu en tiens pour quelque paysanne d’ici, car je t’entendis l’autre jour parler d’une certaine Marguerite : tu ne me croyais pas si près de toi, tu en dégoisais diablement.
Tu te trompes, compère. Il est bien vrai que je parlais de Marguerite, mais je disais que je ne pouvais différer sa petite fierté ; il semble que sa gorge ne soit que pour elle, on ne saurait la toucher.
À d’autres, tu me la bailles belle ! Va, va, il n’est pire eau que l’eau qui dort, la chanson le dit bien. Veux-tu gager chopine que tu aimes Marguerite ?
Ma foi, j’aurais trop peur de perdre, j’aime mieux t’avouer la chose de bonne grâce. Eh bien oui, j’aime à la rage cette petite friponne de Marguerite, elle est fringante, elle a de jolis tétons. Ah, compère, si j’en croyais ce que je m’imagine,
Quand je pense à elle, je suis toujours hors de moi. Tu vois bien qu’il ne faut pas s’étonner si j’ai la puce à l’oreille
de si bon matin.
Tiens, la voici.
Ah, compère, je le sens bien, tout me tremble dans mes chausses et le cœur me fait tic, tac, tic, tac.
Air : Que j’estime [mon cher voisin]
Tout le monde ici se dispute à qui la logera.
Air : Je reviendrai demain [au soir]
Air : Turlurette
Cela ne te donne-t-il pas envie d’en faire autant ?
C’est bon pour toi, bonne bête qui fais l’amour comme un moineau. Pour moi, je n’aime que le cabaret et le jeu de quilles.
Ma foi, je ne suis pas plus amoureuse que toi, tout mon plaisir est de cueillir des noisettes dans le bois.
Oui, quand Maître Lucas, ton prétendu, est avec toi. Si tu n’as pas vu la feuille à l’envers dans le bois de Boulogne, ce n’a pas été ta faute, car je crois qu’avec une friponne comme toi, on n’a qu’à se baisser et en prendre.
Tu parles par jalousie. Tiens, mon pauvre Polichinelle, avec toute ton indifférence, je te crois amoureux comme un matou.
Oui, quand il a passé par les mains du chaudronnier.
Air : Le plaisir passe la peine
Tu ne me connais pas, Marguerite, je me méfie des filles, je m’y connais, moi.
Air : [L’amour] la nuit et le jour
Et puis après, je serais joli garçon ; oh, que nenni ! Mais laissons-nous ; si Cybèle nous surprenait dans une si jolie conversation, elle ne croirait pas que nous aurions toujours eu nos mains dans nos poches. Les vieilles sont plus malignes que tu ne penses.
Tu as raison, j’aperçois nos paysans, il faut que Madame Cybèle ne soit pas loin.
Air : Mirliton
Que t’importe ?
Oh, moi, cela ne me fait rien, au contraire : c’est moi qui ai conseillé à Maître Lucas de t’épouser.
Quand je te dis que tu m’aimes, je ne me trompe pas. Je le vois à tes discours.
Tu n’es peut-être pas si connaisseuse que tu crois.
Air : Prévôt [des marchands]
Va, j’en ferai bon usage.
Je m’en rapporte bien à toi, mais Maître Lucas doit t’épouser tantôt. Je lui ai obligation, c’est lui qui m’a appris le jardinage. Le tour est un peu coquin de couper l’herbe sous le pied à son maître.
Je ne m’en embarrasse guère, j’aime mieux le garçon que le maître.
Écoute donc. Tout garçon que je suis,
Air : Ma raison s’en va bon train
Je t’assure que si ton jardin ne profite pas, ce ne sera pas faute d’être bien bêché.
Je ne doute point de ton mérite et je te promets que je ne serai jamais amante qu’à toi. Mon père aura beau dire, Lucas n’obtiendra rien de moi.
Tout cela est fort bien, mais si ton père te le fait épouser de force, que feras-tu ?
Ce que je ferai ? Comme bien des filles font à Paris quand elles épousent quelqu’un malgré eux ; tiens, Maître Lucas s’en repentira.
Je t’entends, cela vaut toujours mieux que rien.
Paix, paix, j’entends du bruit. Je vais faire la sainte Nitouche, fais comme moi.
Air : Je veux garder ma liberté
Quelle poussière ! Le fiacre de Cybèle n’est pas loin.
Air : Trembleurs
Les femmes ont des mesures à garder quand elles font la folie d’être amoureuses à certain âge. Les femmes ont des mesures à garder quand elles font la folie d’être amoureuses à certain âge. \emph Motus, la voici., la voici.
Air : Pendus
J’ai résolu d’acheter ici une maison de plaisir. L’encens qu’on me donnait là-haut m’a causé tant de migraine que j’ai quitté l’Olympe pour jamais ; je suis folle d’Auteuil, et à cause de la proximité du bois de Boulogne, je vais commencer par faire choix d’un jardinier et je prétends qu’on lui parle chapeau bas.
Air : Tout comme il vous plaira, larira
Enfin, mon pauvre garçon, voilà Madame Cybèle cheux nous ; je touche au moment d’épouser la petite Marguerite.
Il faut attendre ici Cybèle, elle y va nommer son jardinier, et je ne doute point que le choix ne tombe sur vous, car vous êtes le meilleur planteur d’Auteuil.
Cela me ferait trop d’honneur, mais parlons de Marguerite.
Air : Diogène
Qu’est-ce que cela vous fait, vous l’allez épouser ?
Sans doute.
Eh bien, vous serez son maître et vous en ferez ce que vous voudrez.
D’accord, mais jarnonbille, si quelque goulu en avait croqué l’entamure, ça ne me ferait pas rire.
Air : La besogne
Cela ne se voit que trop souvent. Si vous faisiez bien, vous resteriez garçon ; pour moi je vis content comme je suis, et je ne sais pas encore comme les filles sont faites.
L’insolent ! Retire-toi, voilà Madame Cybèle. Laisse-moi seul avec la déesse.
Oh çà, Maître Lucas, vous vous attendez peut-être que je vous prendrai pour mon jardinier ? Point du tout, il est bien vrai que vous l’entendez, mais comme vous êtes sur le point de vous marier et que la jeune Margot vous occupera assez, j’ai fait choix de Polichinelle pour avoir soin de mon jardin.
Air : Capucin
C’est bien de l’honneur pour moi, Madame, je serais charmé d’être à vos gages, mais, comme vous dites fort bien, ma femme me donnera assez d’occupations, et vous m’avez tout l’air de ne pas vous contenter de la moitié d’un homme à votre service.
Lucas, je te crois discret.
Si j’étais femme, vous pourriez en douter.
Je vais te confier un secret.
Confiez, il sera en bonnes mains.
Air : Qu’on apporte bouteille
Je l’aime, je sais qu’il n’est pas des mieux faits, mais il me plaît et promet beaucoup pour le jardinage.
Vous vous gaussez, vous dis-je !
Va, va, mon pauvre Lucas, tu ne connais pas les déesses. Tiens, mon enfant, nous aimons mieux souvent nos valets que nos maris.
Il y a, morgué, bien des grosses madames sur terre qui suivont votre exemple. Polichinelle sait-il cette bonne nouvelle-là ?
Pas encore, mais j’ai ordonné au diable de se cacher cette nuit dans la ruelle de son lit, et de lui faire cette déclaration-là pour moi... Voici mon mignon, ne lui dis mot... Allons, qu’on se prépare à faire honneur à mon jardinier.
Air : De mon joli, joliet
En vérité, Madame, vous jetez des pierres dans mon jardin qui retombent dans le vôtre.
Je te laisse. Songe au poste que tu vas occuper chez moi ; je veux, avant qu’il soit peu, voir du fruit de ta façon.
Peste soit de la vieille carogne ! Qu’elle plante ses choux elle-même ; je vais voir Marguerite, c’est l’affaire la plus pressée que j’aie. Mais il me semble que j’ai envie de faire un somme. Voyons. Il faut prendre le sommeil au mot, il ne saurait venir plus à propos, car depuis que je suis amoureux, je n’ai pas fermé l’œil. Mettons-nous sur ce gazon, ma bosse me servira de traversin.
Air : Landerira
Air : C’est le Prince d’Orange
Au guet ! Au guet ! Main-forte ! Vite ! À la garde ! Au commissaire ! Au voleur !
Qu’as-tu donc, mon poulet ?
Ah, Madame, j’ai pissé plein mes chausses !
Air : L’amour me fait lon lan la
Hé pourquoi donc, mon petit matou ?
Air : Des fraises
Sais-tu bien, mon petit bichon, que c’est moi qui t’ai fait voir tout cela pour te faire savoir que je t’aime à la folie ?
C’est s’y prendre fort joliment que d’endosser la peau du diable pour tenter d’honnêtes garçons !
Air : Dondaine
En vérité, Madame, vous me faites trop d’honneur, il ne vous faut que de l’encens et je n’en ai point.
Va, va, mon gros pâté, j’aime mieux les caresses d’un joli homme comme toi que les respects des dieux dont je suis la grand-mère.
Cela ne vous rend pas plus jeune.
Je ne sens pas moins le plaisir que me fera la tendresse de mon cher Polichinelle. Je ne t’ai pas fait mon jardinier pour des prunes.
Air : Parez votre chapelle
Chère mère Cybèle, j’implore votre autorité.
Air : Je voudrais bien me marier
Allez, ma fille, ne craignez rien, vous ne vous marierez que quand je l’ordonnerai, adieu. Suis-moi, mon cher, j’ai quelque chose à te faire faire dans mon jardin.
Air : Pouvoir
Quelle diable de réponse me fais-tu là ! Tiens, voici Polichinelle, je parie qu’il te condamnera. Approche, mon garçon. Margot me fait un compliment qui ne dit rien de bon pour mon amour.
Air : Que j’estime [mon cher voisin]
Margot, le pauvre Lucas ne voit pas ce qui lui pend au bout du nez.
Oh, ma foi, il t’en pend plus long qu’à lui que tu ne vois pas.
Air : Ton humeur est, Catherine
Tu m’as fait une infidélité, suffit.
Tu en as menti, c’est toi.
C’est toi-même.
Oh, c’est toi !
Et moi je te dis que c’est toi, car tu aimes Cybèle : y suis-je ?
Bon, tu veux rire, me crois-tu assez fou pour aimer cette vieille carcasse céleste ? Je t’aime mieux, tu es un plus friand gobet.
Tu as beau dire, tantôt tu as paru interdit quand je t’ai trouvé avec elle, tu m’as fait rentrer les paroles dans le ventre, et tu m’as chassée comme une péteuse.
Va, va, j’avais mes raisons. Ne crains rien, un petit duo va nous raccommoder ensemble, c’est ainsi que les amants se réconcilient à l’Opéra.
Air : Ah, Madame Anroux
Oh çà, mes compères les bateliers, vous savez mes petites facultés ; cependant je trouve un bon parti pour ma fille ; tenez, voici Maître Lucas, c’est lui que j’ai choisi pour mon gendre.
Compère, nous approuvons votre choix.
Air : Nanon dormait
Halte-là, Maître Simon, de la part de Cybèle je m’oppose à ce mariage !
Que nous veut dire ce mal bâti-là ?
Holà, hé, Grippe-sergent, qu’on nous emporte, Marguerite et moi, en lieu de sûreté ! Adieu, Maître Lucas, nous allons bien vous tailler des croupières.
Air : Morguenne [de vous]
Voilà le diable qui emporte ma prétendue, et c’est vous qui faites ce beau remue-ménage-là !
Ce n’est pas ma faute, j’ai donné des verges pour me fouetter, j’étais folle de Polichinelle et le coquin, le traître, cependant aime cette salope de Margot.
Polichinelle aime ma future ? Le misérable !
Ils nous jouaient tous les deux, mon enfant.
Air : Hé bien
J’ai vu des choses qui m’ont fait venir l’eau à la bouche.
Et à moi les cornes à la tête.
J’en suis pour ma déclaration.
Et moi pour mes deux ans de persévérance.
Je me vengerai et je vais toujours commencer par tigonner ma crasseuse de rivale. La voici fort à propos pour être bien frottée.
Air : Marie Salisson [est en colère]
Jour de Dieu, il faut que je t’arrache les yeux de la tête.
Ne t’avise pas de cela, vieux parchemin ridé, je t’arracherai les dents avec mon sabot !
Tu nous en revends donc, traîtresse ?
Air : Lon la
C’est trop endurer, je veux mettre cette effrontée-là en capilotade.
Ah, Madame Cybèle, ne la frappez pas, je la crois grosse.
L’ingrat, il aurait été fâché de faire pour moi tout ce qu’il fait pour elle. Tu vas ressentir l’effet de mon juste courroux. Toi, Citron, mords Polichinelle et lui communique ta rage.
Aïe, aïe, je n’en puis plus, j’enrage, au secours, qu’on me mène à la mer, qu’on me saigne ! Marguerite, donne-moi un lavement !
Air : Diogène
Margot, décampe au plus vite, le diable va t’emporter ; prends garde à toi, il pourrait faire d’une pierre deux coups.
Tu te trompes, mon cher Polichinelle, serre-moi la main. Me connais-tu ?
Retire-toi, maudit loup-garou !
Ne vas pas me mordre, au moins !
Air : Je suis perdue
Je crois ma foi que c’est tout de bon. Et vraiment oui, elle est bien trépassée !
Tant mieux !
Eh morgué, tant pis ! Il ne fallait pas la laisser tuer tout à fait.
Vivat, le diable est mort ! Allons, du vin ! J’ai assez tué de monde pour boire un coup, il faut que je revienne de loin car je suis bien fatigué.
Tu n’as pas fait tant de chemin que tu crois. Par la vertu de cette baguette, je te guéris de ta rage. Vois maintenant ta besogne de sang-froid.
Ah, morbleu, qu’est-ce qui a fait ce coup-là ?
C’est toi.
C’est moi ?
Air : Elle est morte, la vache à Panier
Air : La Palisse
J’enrage ! Fi, Madame Cybèle, vous êtes la plus méchante de toutes les diablesses. Si vous n’aviez l’âme chevillée dans votre chien de corps pour une éternité, je vous tordrais le cou. Ah, pauvre Margot !
Il se trouve mal et je suis la cause de tout ce bacchanal. La chien d’amour, mon cher Polichinelle !
Air : Des fraises
Ah, mon cher, pardonne-moi ; du moins que ton dernier soupir soit pour Cybèle.
J’y consens. Tiens, voilà mon dernier hoquet.
Air : Quand Moïse [fit défense]
Air : Confiteor
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