Pierre-François Biancolelli, Jean-Antoine Romagnesi
Alceste
Parodie
Représentée pour la première fois, par les Comédiens Italiens ordinaires du Roi
le 28 juin 1728
Les Parodies du nouveau Théâtre-Italien, Briasson, 1738
Acteurs
Alcide
Lycas, confident d’Alcide
Straton, confident de Lycomède
Céphise, confidente d’Alceste
Lycomède
Phérès
Admète, Arlequin
Alceste
Un page
Thétis
Un Médecin
Mercure
Caron
Les Ombres
Pluton
Alecton
Matelots
Démons chantant
Démons dansants
Alceste
Scène i
Alcide, Lycas, Chœur
Le théâtre représente un port de mer avec des vaisseaux.
chœur
Air : Les Triolets
Vivez, vivez époux heureux.
lycas, à Alcide
Quoi ! la musique vous ennuie,
Vous fuyez les ris et les jeux ?
chœur
Vivez, vivez, époux heureux.
lycas
Votre ami voit briller les feux
De l’Hymen charmant qui le lie.
chœur
Vivez, vivez époux heureux.
lycas
Prenez part à cette harmonie.
chœur
Air : Vivons pour ces fillettes
Vivez, vivez, heureux époux.
alcide
Morbleu ! canailles taisez-vous,
Votre concert me blesse.
chœur
Vivez dans l’allégresse,
Vivez,
Vivez dans l’allégresse.
lycas
Mais qu’avez donc, Seigneur Alcide ?
alcide
Air : Je ne suis né ni roi, ni prince
J’adore la charmante Alceste
Désormais quel espoir me reste ?
Mon ami voit combler ses vœux.
lycas
N’en prenez point de jalousie,
Un amant doit être joyeux
Quand sa maîtresse se marie.
Vous prenez la chose trop sérieusement.
Air : Diable zot
L’amour est-il plus fort que vous ?
Un guerrier toujours indomptable
N’ose-t-il braver son courroux ?
Le monstre le plus redoutable
N’a pu se soustraire à vos coups.
alcide
Lorsque l’Amour est sous les armes,
Le plus grand héros n’est qu’un sot,
Peut-on résister à ses charmes ?
Diable zot.
lycas
Vous ne sauriez vous dispenser de voir la fête qui va bientôt commencer.
alcide
De quoi cela m’avancera-t-il ?
lycas
Différez votre départ jusqu’à la nuit.
alcide
Air : Quand je tiens de ce jus d’octobre
Ah ! Lycas, quelle nuit funeste !
Admète, ô trop heureux époux !
lycas
Je suis sûr que Madame Alceste
La passera bien mieux que vous.
alcide
Air : Les Feuillantines
Je les verrai s’agacer,
Se pincer,
À mes yeux se caresser.
Pour Alcide quel supplice !
C’est jouer bis
Le vrai rôle d’un Jocrice.
airopera
Je te l’avais bien dit, je partirai trop tard.
Mais toute réflexion faite,
Air : Gardons nos moutons, lirette liron
Je partirai mal-à-propos,
Car je suis nécessaire ;
Il leur faut du moins un héros
Pour se tirer d’affaire.
Admète est peureux,
Phérès est goûteux,
Sans moi que peut-on faire ?
lycas
Voilà de bonnes raisons, celles-là.
Scène ii
Straton, Lycas
straton
Air : Talaleri, talaleri, talalerire
Lycas, j’ai deux mots à te dire.
lycas
Ces deux mots n’ennuieront-ils pas ?
straton
De Céphise je suis l’Empire,
Pourquoi suis-tu partout ses pas !
Que prétends-tu ?
lycas
Je prétends rire,
Talaleri, talaleri, talalerire.
straton
Pourquoi nous viens-tu troubler ?
Air : Tarare pompon
Ah ! laisse-moi jouir de ma bonne fortune,
J’aime, je suis aimé ; laisse en paix nos amours.
lycas
Sûr du cœur de ta brune,
Peux-tu craindre mes tours ?
straton
Un rival importune
Toujours.
Air : La Chasse de la Reine des Péris
L’agréable Céphise
M’assure d’un amour constant.
lycas
Mon enfant,
Si l’on te favorise,
Crois que l’on m’en fait tout autant.
Tel se croit d’une belle
L’amant préféré, favori,
Seul chéri,
Qui de son infidèle
N’est pas mieux traité qu’un mari.
straton
La voici, l’ingrate.
lycas
Je te laisse avec elle, tu peux t’éclaircir de ce que j’ai l’honneur de te dire.
Scène iii
Céphise, Straton
Air : Menuet d’Hésione
Dans ce beau jour, quelle humeur sombre
Fais-tu paraître à contretemps ?
straton
C’est que je ne suis pas du nombre
Des amants heureux et contents.
céphise
Air : Ah ! Philis, je vous vois, je vous aime
Un air grondeur et sévère
N’est pas un grand agrément :
Il faut pour plaire
Être amusant,
Saillant,
Pétillant,
Pressant,
Caressant ;
Le chagrin n’avance guère
Les affaires d’un amant.
straton
Eh ! Comment veux-tu que je sois gai ? ce maraud de Lycas dit que tu l’aimes.
céphise
Air : Je jure par tes yeux
Lycas est peu discret, bis
straton
Ah ! je me doutais bien que le drôle mentait.
céphise
Lycas est peu discret,
D’avoir dit mon secret.
straton
Comment ? tu me trahis ?
céphise
Non, je te désabuse.
straton
Air : Pierrot se plaint que sa femme
Quoi, Céphise m’abandonne,
Morbleu ! je suis enragé :
Peux-tu sans rougir, friponne,
Me donner un tel congé ?
céphise
Je te le donne,
Straton n’a pas voyagé,
S’il s’en étonne.
straton
Quoi ! cruelle, après tant de promesses...
céphise
Air : Changement pique l’appétit
En vain une beauté charmante
Promet d’être toujours constante,
Aisément, elle se dédit :
Changement pique l’appétit.
straton
Air : Je ris, je chante et je badine
À changer quel sujet t’engage ?
Est-ce là l’effet de tes serments ?
Après deux ans, peux-tu, volage,
Former de nouveaux engagements ?
céphise
Comptes-tu pour rien, à mon âge,
D’être fidèle pendant deux ans ?
straton
Mais comment as-tu pu te résoudre à me quitter ?
céphise
Air : Dame commode
C’est l’inconstance
Dont la vive douceur,
À sa puissance
Assujettit un cœur.
Amour, charmant vainqueur,
Épargne-nous l’honneur
De la persévérance,
Ton trait le plus flatteur,
C’est l’inconstance.
À deux, ensemble
Air : Ah ! mon beau laboureur
Il faut changer toujours/aimer toujours,
Les plus douces amours
Sont les amours nouvelles/Sont les amours fidèles,
Olire, olire,
Sont les amours nouvelles/Sont les amours fidèles,
Olire, ola.
Scène iv
Lycomède, Straton, Céphise
lycomède
Fin de l’air : Réjouissez-vous bons français
Straton donne ordre qu’on s’apprête,
Pour commencer bientôt la fête.
straton
Oui, vraiment, j’ai fort envie de rire.
lycomède
Air : Réjouissez-vous bons français
Je vais faire un tour de maraud,
Mais pour le spectacle il le faut :
Quoique de Thétis je sois frère,
Ne laissons pas que de le faire.
À part Contraignons-nous bien.
Air : La verte jeunesse
La chose est donc faite ?
Alceste en ce jour,
Me préfère Admète,
Malgré mon amour ;
Loin que j’en murmure,
Je suis par ma foi,
De cette aventure,
Content comme un roi.
céphise
Cela n’est pas bien sûr.
lycomède
Bon, c’est moi qui lui donne les violons, tu me vas ouvrir le bal.
céphise
Air : Je ne suis pas si diable [que je suis noir]
Si l’on croit l’apparence,
Vous êtes détaché ;
Mais sous l’indifférence,
Votre amour est caché.
Seigneur je vous devine,
Je m’y connais un peu,
Vous faites bonne mine
À mauvais jeu.
lycomède
Voilà les mariés qui s’approchent, et la fête va commencer.
Scène v
Le Chœur, Admète, Alcide, Alceste, Phérès, Lycas, Céphise, Straton, Matelots et Matelotes
chœur
Air : Les Triolets
Vivez, vivez heureux époux.
phérès
Quel plaisir cet hymen me cause !
Admète et Alceste, ensemble
Que ces liens me semblent doux.
chœur
Vivez, vivez heureux époux.
admète
Ce chœur, à parler entre nous,
Devrait avoir la bouche close.
chœur
Vivez, vivez heureux époux.
admète
Il dit toujours la même chose.
Danse de Matelots.
lycomède
Air : Dans nos Vaisseaux
Dans mes vaisseaux,
Venez, ma belle Reine,
Et souffrez que je vous mène
Danser sur les eaux.
Mes matelots
Vous y feront bien rire,
Par leurs tours nouveaux.
Vous, mes rivaux,
Voyez-la-moi conduire
Comme deux nigauds.
admète
Air : À la façon de Barbari
Il a raison, Alcide, allons,
Conduire notre femme.
lycomède
Quoi ! vous marchez sur nos talons ?
admète
Nous escortons Madame.
lycomède
Quand je donne collation,
La faridondaine,
La faridondon,
Je ne régale les maris,
Biribi,
Qu’à la façon de Barbari
Mon ami.
Alceste entre dans un vaisseau suivie de Lycomède, qui jette Admète dans l’eau.
admète
Comment donc ! qu’est-ce que cela signifie ?
Admète et Alcide, ensemble
Air : Une fille a son déjeuner
Dieux ! le pont s’abîme dans l’eau !
admète
Ah ! le joli cadeau !
alcide
Perfide !
admète
Alceste !
Alceste et Céphise, ensemble
Au secours ! au secours !
Lycomède et Straton, ensemble
Et zeste, et zeste.
admète
Adieu donc mes amours !
Air : Et vogue la galère
Ah ! la maudite fête !
lycomède
Cinglons droit à Scyros.
admète
La chose est malhonnête.
Lycomède et Straton, ensemble
Adieu vaillant Héros,
Et vogue la galère,
[Tant qu’elle, tant qu’elle,
Et vogue la galère,
Tant qu’elle pourra voguer.]
definitacteur, chœur du vaisseau chœurvaisseau
chœurvaisseau
airnote
Gai, gai, Madame la mariée,
Bon, bon, etc.
Admète et Alcide, ensemble
Au secours ! au guet ! au feu !
Scène vi
Thétis, Admète
thétis
Air : Contre un engagement
Thétis proscrit tes jours,
Redoute sa colère,
J’approuve en ses amours
Lycomède mon frère ;
Sois époux débonnaire,
Souffre tout sans crier.
admète
Vous faites-là, ma chère,
Un fort joli métier.
Au secours ! au secours !
thétis
Air : Sans dessus dessous
Quoi ! malgré mon commandement, bis
Vous vous embarquez hardiment, bis
Puisqu’on méprise ma colère,
Sans dessus-dessous, sans devant-derrière,
Vents furieux déchaînez-vous,
Sans devant-derrière, et sans dessus-dessous.
Thétis rentre dans la mer, et les Aquilons excitent une tempête.
Scène vii
Alcide, Admète
alcide
Air : Lanturlu
Que l’honneur nous guide,
Brusquons les instants,
Joignons le perfide
Sans perdre de temps.
admète
Ah ! mon cher Alcide,
En voilà bien de perdu,
Lanturlu, lanturlu, lanturlu.
Ils s’embarquent sur un vaisseau.
Scène viii
Céphise, Straton
Le Théâtre change et représente la ville de Scyros.
céphise
Air : Tantaleri
Alceste devrait être ici.
straton
Crois-moi, n’en prends point de souci,
Puisqu’elle diffère à venir,
Laisse-moi ta la la la la,
Laisse-moi t’entretenir.
céphise
Nous devons l’attendre.
Air : Tout le long de la rivière
Mais d’où pourrait naître
Ce retardement ?
straton
Son époux peut-être
Est dans ce moment
Tout au fond de la rivière,
Laire lon lan la,
Tout au fond de la rivière,
Ah ! qu’il est bien là.
Pour nous, grâce au Ciel, nous sommes dans l’île de Scyros, nous n’avons pas été longtemps en chemin, comme tu vois.
céphise
Air : Ne m’entendez-vous pas
Tu ne te plaindras pas
De mon humeur sauvage ;
Je t’ai dans le voyage
Donné peu d’embarras.
straton
Oh ! je ne m’en plains pas.
La fine mouche ! tu en sais diablement long.
céphise
Air : Menuet des Fêtes Grecques
Et si je t’assurais
Que c’est toi que j’adore ?
straton
En vain tu le dirais,
Non, jamais je ne le croirais.
céphise
Quoi ! tu doutes encore
Du feu qui me dévore ?
C’est trop m’outrager :
J’ai feint de changer
Pour mieux t’engager.
Air : Un mari qui vit en aimant
Ce n’est point inutilement,
Que j’ai feint un tel changement :
Il faut dans l’amoureux commerce
Savoir user de raffinement.
L’heureux amant
Nonchalamment,
Tombe, et languit dans l’assoupissement :
Il faut qu’un rival le traverse,
Pour réveiller son empressement.
straton
Air : Nanon dormait
Ne tente pas une frivole excuse,
De tes discours
Je connais les détours,
Non, non, morbleu, ne crois pas qu’on m’abuse
Une seconde fois.
céphise
J’en vois bis
Que l’on a trompé plus de trois.
N’y a t-il pas moyen de t’apaiser ?
straton
Non, épouse-moi dans ce moment.
Air : C’est l’ouvrage d’un moment
L’amour qui dans tes yeux pétille,
Ne te dit-il pas clairement,
Que faire un époux d’un amant,
Faire une femme d’une fille,
C’est l’ouvrage d’un moment ?
céphise
Air : Un peu de tricherie
Crois-moi, mon cher Straton, diffère,
Je t’aime d’une ardeur sincère.
straton
Et bon, bon, bon,
Je t’en réponds.
céphise
Ah ! ce soupçon me fait injure,
Faut-il qu’un serment te rassure ?
straton
Et zon, zon, zon,
Ah ! voyez donc.
céphise
Oui pour toi seul, beau sire,
Je soupire.
straton
Chanson, chanson, chanson.
Céphise et Straton chantent ensemble, l’un les paroles du premier couplet, pendant que l’autre chante celles du second.
céphise
Air : Menuet de l’Empereur
Quoi sans cesse
De ma promesse,
De ma tendresse,
Straton doutera ?
Je t’assure,
Oui je jure,
Que ta blessure
Bientôt guérira.
Tu dois m’en croire, cher amant,
Différons cet hymen charmant,
Plus on attend,
Et plus la chose paraît drôle.
Crois-en ma parole,
L’Amour s’envole
Quand on l’immole
À de noirs soupçons.
Quoi sans cesse, etc.
straton
Non, non, non,
Non, traîtresse,
Ton cœur me trompera
Comme à l’Opéra.
Non, non, non,
Non, parjure,
Bien sot qui te croira ;
Amusement, amusement,
Doit-on différer un moment ?
Tout retardement est frivole
Mauvaises raisons,
Finissons,
Ne fais point la folle.
Que de façons !
Discours et chansons !
Non, non, non, etc.
Scène ix
Lycomède, Alceste, Céphise, Straton, Soldats de Lycomède
lycomède
Air : Pierre Bagnolet
Non, non, je suis inexorable,
La belle, allons, gagnons pays.
alceste
Malgré la douleur qui m’accable,
Quoi vous êtes sourds à mes cris ?
lycomède
Vous m’avez appris, bis
À devenir inexorable :
Je me venge de vos mépris.
alceste
Air : Est-ce ainsi qu’on prend les belles.
Les beautés les plus cruelles
Se gagnent par la douceur,
Vos maximes sont nouvelles,
Vous parlez d’un ton grondeur :
Est-ce ainsi qu’on prend les belles ?
Lon lan la
Ô gué lon la.
lycomède
Point tant de raisonnement, marchons.
alceste
Air : Que je chéris mon cher voisin
Ne pourrai-je vous émouvoir ?
Ah ! quelle barbarie !
lycomède
Quand l’amour est au désespoir,
Il se change en furie.
Palsambleu, Madame, vous m’avez rendu misérable, il est juste que vous le soyez aussi.
alceste
Air : Le beau berger Tircis
Admète avait mon cœur
Dès ma plus tendre enfance ;
L’Amour, ce charmant vainqueur,
Nous soumit à sa puissance.
Nos feux, notre constance,
Font tout notre bonheur.
lycomède
Voilà un plaisant avœu ! c’est bien là vraiment le moyen de m’adoucir !
straton
Air : Voici les Dragons [qui viennent]
L’ennemi vient nous surprendre.
lycomède
Repoussons ses coups,
Surtout, gardez de vous rendre,
Ah ! je vais bien me défendre !
straton
Et moi itou, et moi itou.
Lycomède contraint Alceste d’entrer dans la ville, Céphise les suit, et les soldats de Lycomède ferment la porte de la ville dès qu’ils sont entrés.
Scène x
Admète, Alcide, Lycas, Soldats assiégeants.
Alcide et Admète, ensemble
Air : Y avance, y avance
Marchez, marchez, marchez, marchez,
Approchez amis, approchez !
admète, criant bien fort
Faites donc plus de diligence,
Avance, avance, avance,
Car l’affaire est de conséquence.
Je crois que le corps de l’armée a peur.
Scène xi
Lycomède, Straton, Soldats assiégés, Admète, Alcide, Soldats assiégeants
alcide
À droite ! et à gauche !
admète
Écoutez bien le commandement : sauve qui peut !
lycomède, sur les remparts
Air : Je reviendrai demain au soir
Messieurs, fussiez-vous encor plus,
Soyez les bienvenus ! bis
Nous ferons tous notre devoir
Pour vous bien recevoir. bis
chœur
Nous ferons tous notre devoir
Pour vous bien recevoir. bis
admète, à Alcide
On ne peut rien de plus honnête, ils veulent apparemment nous donner à dîner ; pour moi je l’accepte, cela vaut mieux que de se battre.
alcide
Vous n’y pensez pas, seigneur Admète ! il faut que le perfide Lycomède vous rende Alceste. Allez la lui demander d’un ton ferme.
admète, en tremblant
Je crois que vous avez raison, mais cependant, le dîner...
Air : On vous en ratisse.
Évite un funeste sort,
Rends-nous Alceste, et d’abord
Nous pardonnons ta malice.
lycomède, sur les remparts
Voyez comme on la rendra ?
On vous en ratisse, tisse, tisse,
On vous en ratissera.
admète
Tu ne veux point la rendre ? non ? une fois, deux fois, trois fois.
lycomède, sur les remparts
Non, non.
admète
Non ? eh bien, tu n’as qu’à la garder !
alcide
Ah ! que dites-vous ?
Air : Je suis un bon soldat titata
Montez tous à l’assaut
Tôt, tôt, tôt !
lycomède
Amis, courez aux armes !
alcide
Que partout le soldat
Ti ta ta,
Répande les alarmes.
admète
Ma foi, cela devient sérieux, attendez.
Air : Les Feuillantines
À moi, compagnons, à moi !
Votre Roi,
Est saisi d’un grand effroi.
alcide
C’est Alcide
Qui vous guide.
admète, en tremblant
Je n’en suis, je n’en suis pas moins timide.
On assiège la ville, il se fait une sortie.
alcide
Air : Des fraises
Je vais, sans craindre leurs coups
Vous ouvrir un passage.
Il seront bientôt à nous,
Mes amis, suivez-moi tous.
Tous ensemble, ensemble
Courage, courage, courage.
Alcide, à la tête des assiégeants, enfonce avec sa massue la porte de la ville. Admète entre dans la ville et en sort avec un cochon de lait, qu’il dit être son prisonnier de guerre.
Scène xii
Phérès armé, marchant avec peine.
Air : Griselidis
Courage, enfants, courage,
Je viens me joindre à vous :
Mon bras dans le carnage
Va seconder vos coups.
Mais hélas ! c’est de la moutarde après dîner : la ville est déjà prise, faisons une réflexion là-dessus.
Air : Qu’il est lourd, qu’il est gourd
Leste et vaillant,
Le jeune combattant,
Dès qu’il apprend
Que l’ennemi l’attend,
Ziste et zeste,
Qu’il est preste,
Malepeste, comme il va !
En un moment l’y voilà ;
Mais sous les ans quand un vieux barbon plie
Qu’il est lourd !
Qu’il est sourd !
Qu’il est gourd !
Il n’en a que l’envie.
Scène xiii
Alcide, Alceste, Phérès, Straton enchaîné, Lycas
alcide, à Phérès
Tenez, Bonhomme, rendez Alceste à votre fils.
phérès
Seigneur Alcide, rendez-la-lui vous-même, l’honneur vous appartient.
Air : J’entends déjà le bruit [des armes]
On n’entend plus le bruit des armes.
Pourquoi voulez-vous nous quitter ?
alcide
Laissez-moi fuir de si doux charmes,
Je ne pourrais y résister.
alceste
Que vous m’allez causer d’alarmes !
alcide
Gardez-vous bien de m’arrêter.
alceste
Non, Seigneur, vous ne partirez point.
Air : Non, non, non, je n’en veux pas davantage
Ce n’est qu’à votre courage
Qu’on doit un repos si doux,
Que l’amitié vous engage
À rester auprès de nous :
Un mari discret et sage,
Un bon ami dans la maison,
Et non, non, non,
Je n’en veux pas davantage.
Alcide s’en va.
Mais à propos d’Admète, il n’est pas ici ; allons le chercher, à quoi s’amuse-t’il ?
Scène xiv
Admète soutenu par des soldats, \emph les Susdits
alceste
Air : Flon, flon
Quel spectacle funeste !
Mon cher, qu’avez-vous donc ?
admète
Je meurs, charmante Alceste,
D’une indigestion.
alceste
Air : Contre un engagement
Quel funeste secours !
La fortune ennemie,
Au dépends de vos jours,
M’aurait-elle servi ?
admète
Mon sort doit faire envie,
Et je suis bien vengé,
Puisque je perds la vie
Pour avoir trop mangé.
Et aux dépends de mes ennemis.
alceste
Air : Les Triolets
Est-ce là cet hymen si doux
Qui nous promettait tant de charmes ?
admète
Mon petit cœur, consolez-vous.
alceste
Est-ce là cet hymen si doux ?
admète
Je meurs sans être votre époux.
alceste
C’est ce qui fait couler mes larmes.
À deux, ensemble
Est-ce là cet hymen si doux
Qui nous promettait tant de charmes ?
admète
Air : Je jure par tes yeux
Alceste, vous pleurez.
alceste
Admète, vous mourez.
admète
Alceste, vous pleurez.
alceste
Admète, vous mourez.
Ensemble, ensemble
Alceste, vous pleurez.
Admète, vous mourez.
Scène xv
Un page, Alceste, Phérès, Admète, Céphise
le page, à Admète
Seigneur, on vous demande.
admète
Qui ?
le page
Un médecin.
admète
Ah ! je suis mort : n’importe, qu’il entre, il faut mourir dans les règles.
Scène xvi
Le Médecin, \emph et les acteurs de la scène précédente
le médecin
Air : L’autre nuit j’aperçus en songe
Pour guérir de ta maladie,
Je t’apporte un médicament,
admète
Ah ! donne-le moi promptement.
le médecin
Non, car il faut perdre la vie.
admète
Comment veux-tu donc me guérir,
Si ton remède fait mourir ?
le médecin
Je vais vous expliquer l’énigme : premièrement, si vous prenez mon remède, vous n’en reviendrez pas.
admète
Cela est clair.
le médecin
Et par un je-ne-sais-quoi, qu’il est impossible d’expliquer, il faut absolument que quelqu’un l’avale pour vous.
admète
Mais cela est ridicule !
le médecin
Je le sais bien. Mais il me faut un malade, et je tuerai qui je pourrai.
admète
Quoi ? il faut absolument que quelqu’un meure de cette affaire-ci ?
Air : Pour passer doucement sa vie
De votre science assassine,
On ne saurait donc fuir les lois ?
le médecin
Non, vraiment, car la médecine
Ne veut jamais perdre ses droits.
Il laisse la fiole entre les mains d’Admète et s’en va.
phérès
Allez vous coucher, mon fils, en attendant que la médecine opère.
admète, au Parterre
Messieurs, n’y aurait-il point parmi vous quelque personne charitable qui voulût se purger pour moi ?
Il remet la fiole entre les mains de Phérès et s’en va en pleurant.
phérès
Oh çà ! il s’agit maintenant de savoir qui prendra la médecine.
Air : Pour toucher son Isabelle
Moi, je n’en ai point d’envie,
Je n’ai qu’un reste de vie,
Qui sans drogue partira.
Ah ! ah ! ah ! ah !
D’ailleurs, faut-il que je meure
Pour un fils qui s’en rira ?
Ah ! ah ! ah ! ah !
Cette raison est meilleure
Que celle de l’Opéra.
Ah ! ah ! ah ! ah !
céphise
Air : Je n’saurais
Je plains fort le sort d’Admète ;
Mais ma foi je ne veux pas,
Me servir d’une recette
Si contraire à mes appas,
Je n’saurais,
Je suis encor trop jeunette,
J’en mourrais.
alceste
Air : Ramonez ci, ramonez là
Pour prendre la médecine,
Chacun de vous fait la mine,
Les bons amis que voilà !
L’un dit ceci, l’autre cela,
La la la,
Moi je sais bien qui la prendra.
Elle arrache la médecine des mains de Phérès, et s’en va.
Scène xvii
[Phérès, le Chœur]
phérès
Allons voir comment se porte mon fils.
chœur
Air : Tombeau de Maître André
Hélas ! hélas ! hélas !
phérès
Qu’entends-je ? il rend le dernier soupir.
chœur
Même air
Hélas ! hélas ! hélas !
phérès
Ah ! c’en est fait, le voilà parti.
chœur
Air : Allons gai
Ô trop heureux Admète,
Que votre sort est beau !
phérès
Comment donc, qu’est-ce que cela signifie ?
chœur
Suite de l’air : [Allons gai]
Une amitié parfaite
Vous sauve du Tombeau
Allons gai, etc.
Scène xviii
Admète, Phérès
phérès
Ah ! le voilà lui-même : embrassez-moi mon cher fils.
admète
Il n’est pas question de cela, quelqu’un est mort pour moi, il est juste de le récompenser.
Air : [Ah !] ceux qui l’ont tué m’ont fait grand tort
Que pour lui l’on apprête
Un divertissement,
Qu’on ordonne une fête,
Qu’on dresse un monument :
Un bon ami pour moi court à la mort,
Mais ma foi, quel qu’il soit, il a grand tort.
Scène xix
Admète, [Céphise, le Chœur]
céphise
Air : Pour la Baronne
Alceste est morte.
admète
Voilà bien une autre chanson.
céphise
Elle vous a fermé la porte,
Par où l’on entre chez Pluton,
Alceste est morte.
Air : Il était une jeune fille
Elle a pris la médecine, bis
En disant : oui je te prends
Eh ! tant amoureuse,
J’en prendrai dix fois autant,
Eh ! Tant amoureusement.
Six pleureurs avec de longs manteaux noirs traversent le théâtre, en chantant
chœur
Air : Dame commode
Alceste est morte.
admète
Que veulent-ils conter ?
chœur
Alceste est morte.
admète
Je n’en saurais douter,
Pourquoi me tourmenter ?
C’est trop le répéter.
chœur
Hélas ! Alceste est morte.
admète
Cessez de le chanter.
chœur
Alceste est morte.
Scène xx
Alcide, Admète, Céphise
alcide
Que signifient ces clameurs ?
admète
Ah ! mon cher ami ! Alceste est gîtée.
Air : J’offre ici mon savoir-faire
Pour moi son amour fidèle
L’a fait mourir.
alcide
J’en suis surpris.
admète
Ma foi, les femmes de Paris
Ne la prendront pas pour modèle.
À deux, ensemble
Ma foi, les femmes etc.
alcide
Il ne faut rien déguiser, mon cher Admète, j’aime Alceste.
admète
Ce serait bien le diable !
alcide
Puisqu’elle est morte, tu n’as plus de prétention sur elle ?
admète
Non, vraiment ! que voulez-vous que j’en fasse à présent ?
alcide
Air : Franchement douguenit
Tu n’as qu’à me la céder,
Et je vais tout hasarder ;
Au manoir ténébreux
J’entreprendrai de descendre
Au manoir ténébreux.
admète
Ma foi vas-y si tu veux.
Car pour moi je sais bien que je n’irai pas.
alcide
Hé bien, acceptes-tu le parti ?
admète
Tope ! je vous souhaite un bon voyage. Quelle folie d’aller chercher ma femme à tous les diables ! après tout, il est bien sûr de l’y trouver.
Admète s’en va.
alcide
Comment descendrai-je aux Enfers ?
Scène xi
Mercure, Alcide
mercure
Air : Ô reguingué
Mercure vient à ton secours bis
Il prétend servir tes amours,
Ô reguingué, ô lon lan la.
alcide
Vraiment dans pareille aventure,
On a grand besoin de Mercure.
Il s’abîme avec Mercure.
Scène xii
Charon, plusieurs Ombres
Le théâtre représente le fleuve Achéron.
charon
Air : Car mon cœur n’est point partagé
Il faut passer tôt ou tard
Dans ma petite nacelle,
J’y passe jeune et vieillard,
Fille, femme et damoiselle ;
Venez-y tous hardiment,
Vous passerez pour votre argent. bis
Air : Là-haut sur ces Montagnes
Sans cesse je travaille
À passer chez les morts,
Les grands et la canaille
Dont fourmillent ces bords :
C’est l’arrêt de la Parque.
Pour entrer dans ma barque,
Ombres, il faut payer ;
Et jusqu’au noir Cocyte,
Il faut que l’on acquitte
Les droits du maltôtier.
une ombre
Air : Landerirette
Passe-moi, Charon, passe-moi.
charon
Paye les soins de mon emploi
Landerirette.
definitacteur, l’ombre ombre
ombre
J’ai payé là-haut.
charon
Paye ici
Landeriri.
les ombres
Air : Il faut que je file, file
Passe, passe, passe, passe,
Passe Charon, passe-moi.
charon
Donne, passe ; donne, passe ;
Donne, passe ; arrête-toi.
une petite ombre
Je tiendrai si peu de place.
charon
Oh ! tu te moques de moi.
les ombres
Passe, passe, passe, passe,
Passe Charon, passe-moi.
charon
Air : Le fameux Diogène
Charon dans ces lieux sombres,
Ne passe que les Ombres
Qui donnent leur denier.
une ombre jolie
Passe-moi, je te prie,
Je suis assez jolie
Pour passer sans payer.
charon
Air : C’est un moineau
De vos appass,
Dans ces noirs climats,
Nous ne craignons point les lacs.
De vos appas,
On fait ici bas
Peu de cas.
ombre
Quel inhumain Batelier !
charon
Oh ! vous avez beau crier,
Un vieux nocher est plus dur qu’un greffier.
De vos appas,etc.
une ombre
Air : Les Feuillantines
Nous sommes trois scélérats,
Fils ingrats.
charon
Oh ! vous ne passerez pas.
ombre
Sommes-nous donc si coupables
Qu’il nous soit défendu d’aller aux diables ?
charon
Air : Quand je tiens ce jus d’Octobre
Vous étiez plus sots que perfides,
Tout le public soutient cela ;
Il faut que Minos en décide,
En attendant, demeurez là.
tarsis
Air : Ah ! Robin, tais-toi
Je suis Tarsis.
zélie
Moi Zélie.
charon
Quels pitoyables accents !
Vous avez, mes pauvres Enfants,
Été peu en vie.
tarsis, à Zélie
Ah ! ce sont les airs,
Et les vers,
De travers,
Qui nous ont, ma Mie,
Conduit aux Enfers.
charon
Air : Dans ma jeunesse
Dans ma jeunesse,
Musiciens brillaient,
Poètes travaillaient,
Danseuses enlevaient,
Et chanteurs excellaient ;
Tout sentait le Permesse :
Aujourd’hui ce n’est plus cela,
Chanteur s’égosille,
Danseuse sautille,
Poète roupille,
Musicien pille,
Et le tout va,
Cahin, caha bis
ombre
Air : Lon lan la derirette
Charon me connaissez-vous bien ?
Je suis ce pauvre Italien,
Lon lan la derirette,
Qui s’est marié dans Paris,
Lon lan la deriri.
Air : Quand je tiens ce jus d’octobre
Devais-tu, Fortune ennemie,
Me traiter si cruellement ?
charon
Êtes-vous mort de maladie ?
ombre
Non, je suis mort subitement.
Scène xiii
Alcide, Charon, les Ombres
sautant dans la barque.
Air : Place à Messieurs
Ombres, sortez sans faire résistance.
charon
Chétif mortel, quelle est ton espérance ?
alcide
Je veux passer, c’est pour toi trop d’honneur.
charon
Place à Monsieur. bis
les ombres
Place à Monsieur.
alcide
Air : Nanon dormait
Allons, allons,
Rame, dépêche, achève.
charon
Nous enfonçons,
Ma foi, ma barque crève.
alcide
Pourquoi tant de façons ?
Passons, passons, passons, passons.
charon
Nous enfonçons.
Scène xxiv
Pluton, l’Ombre d’Alceste, Suivants de Pluton
Le Théâtre change et représente le palais de Pluton.
pluton
Air : La beauté, la rareté, la curiosité
Commence de goûter d’une paix éternelle,
La beauté ;
Tu meurs pour ton époux, ah ! quel excès de zèle !
La rareté !
Dans le séjour des morts, tu viens montrer, ma belle,
La curiosité.
Cela mérite un divertissement qui sera même fort bien placé.
un lutin
Quelle fête voulez-vous lui donner ? nous n’avons ici que des musiciens très mélancoliques.
pluton
N’importe, qu’ils chantent toujours, et même, je veux qu’ils dansent.
lutin
Mais, Seigneur, songez qu’ils n’ont pas envie de rire.
pluton
Je veux qu’ils dansent.
lutin
Ce sont des gens au désespoir.
pluton
Je veux qu’ils dansent.
On danse, et après la danse.
lutin
Air : Pour le peu de bon temps qui nous reste
Chacun vient ici bas pêle-mêle,
Dru comme la grêle,
Peupler Pluton ;
Nous mettons le faussaire,
L’auteur plagiaire,
Dans le cachot du fripon ;
L’amant petit-maître,
Le fourbe, le traître,
Avec le menteur :
Avec qui faut-il mettre
Le procureur ?
Scène xxv
Alecton, \emph les Susdits
alecton
Air : Morguienne de vous
Quel diable de train !
Songeons à combattre ;
Le fils de Jupin,
Fait le diable à quatre.
pluton
Gardes ! qu’on le saisisse !
alecton
Qui voulez-vous qui s’y frotte ? il est plus fort que tout l’Enfer ; tenez, le voici qui mène en laisse votre chien Cerbère.
Scène xxvi
Alcide conduisant Cerbère, Pluton, l’Ombre d’Alceste
pluton
Air : Quel plaisir d’aimer sans contrainte
Hé quoi ! tu viens faire ici tapage !
Téméraire, quel sujet t’engage
À troubler la paix de cet asile ?
alcide
Oui, car c’est un séjour fort tranquille !
Air : Ne craignez rien : l’hymen est votre asile
Je ne viens point te ravir ta couronne,
Alceste, seule ici conduit mes pas,
Il me la faut...
pluton
Hé bien, je te la donne,
C’est le moyen de sortir d’embarras.
alcide
Il faut avouer que Pluton est un bon homme !
pluton, après avoir fait sortir son char
Air : Réjouissez-vous bons Français.
Je consens à remplir vos vœux ;
Montez dans mon char tous les deux,
Profitez vite de l’escorte,
Et que le diable vous emporte.
Alcide et l’Ombre d’Alceste se placent sur le char de Pluton qui les enlève.
Scène xvii
[Admète, le Chœur]
Le Théâtre change et représente un arc de triomphe.
admète
Air : Or, écoutez petits et grands
Alcide est vainqueur du trépas,
L’Enfer ne lui résiste pas,
Jugez ce qu’aura fait ma femme !
J’enrage dans le fond de l’âme,
Mais il faut que je chante, hélas !
Alcide est vainqueur du trépas.
chœur
Air : Mais surtout prenez bien garde [à votre cotillon]
Alcide est vainqueur du trépas,
L’Enfer ne lui résiste pas.
admète
Allons, puisque je ne puis mieux faire, chantons toujours :
Alcide est vainqueur du trépas,
L’Enfer ne lui résiste pas.
Scène xviii
Alcide conduisant Alceste, Admète
alcide
Air : Vaudeville du retour de Fontainebleau
Peut-on avoir trop entrepris
Pour cette heureuse victoire ?
Ah ! dût-on pour un pareil prix,
Traverser cent fois l’onde noire,
Et gai, gai, gai, gai, comme on y va ;
La la la la.
Mais il me semble Madame, que vous regardez Admète bien tendrement.
admète
Il a raison, cela est malhonnête.
alcide
En vérité, je joue ici un fort joli personnage !
alceste
Air : Si ta femme gronde
Je voudrais, Alcide,
N’adresser mes regards qu’à vous,
Mais mon cœur les guide
Sur monÉpoux.
alcide
Quelle perfidie !
alceste
Hélas ! je n’ai pu dans ce jour,
Reprendre la vie
Sans mon amour.
alcide
Mais Admète vous a cédée.
admète
Cela est vrai... allons donc, badine ! Finissez, soyez sage.
alceste, d’un ton attendri
Adieu donc, Admète.
admète, en pleurant
Je vous souhaite le bonsoir.
alcide
Les pauvres enfants me font pitié ! revenez Admète, je vous la rends : la belle chose que de savoir triompher de son amour !
admète
Quoi ! tout de bon, vous me la rendez, et vous l’aimez ? il faut qu’il y ait quelque chose là-dessous.
alcide, à part
Ces maris ont toujours de plaisantes visions.
admète
Air : Eh ! pourquoi donc dessus l’herbette
Et pourquoi donc grand personnage
Et pourquoi donc me la rends-tu ?
alcide
L’amour par l’honneur combattu,
Cède à mon fier courage.
admète
Non, non, ce n’est pas la vertu,
C’est l’effet du voyage.
Allons, ma chère Alceste, puisque je suis le maître du champ de bataille, oublions tout ce qui s’est passé, et qu’on vienne ici célébrer notre mariage.
divertissement
airvide
Goûtez, heureux époux,
Goûtez les plaisirs les plus doux ;
Votre attente est remplie,
Un sort digne d’envie
Succède à vos tourments.
Formez les nœuds les plus charmants,
Et quoique l’hymen vous lie,
Soyez toujours Amants.
On danse.
vaudeville
airvide
Pour son époux, femme jolie,
Immole ses attraits,
Hélas ! quelle folie !
C’est porter l’amour à l’excès ;
C’est ce qu’on n’a point vu de la vie,
Et ce qu’on ne verra jamais.
Coquettes sans supercherie,
Petits-maîtres discrets,
Auteurs sans jalousie,
Normands dégoûtés de procès ;
C’est ce qu’on n’a point vu de la vie,
Et ce qu’on ne verra jamais.
Qu’un vieux prétende chez Silvie,
Sans or, trouver accès,
Hélas ! quelle folie !
Qu’un Gascon régale à ses frais,
C’est ce qu’on n’a point vu de la vie,
Et ce qu’on ne verra jamais.
À son amant, fille jolie,
Disait je te promets
D’aimer sans tricherie.
Hélas ! lui dit-il, chère Agnès ;
C’est ce qu’on n’a point vu de la vie,
Et ce qu’on ne verra jamais.
Au Parterre.
C’est vous qui d’une comédie,
Faites tout le succès,
En vain un Auteur crie,
Appelle-t-on de vos arrêts ?
C’est ce qu’on n’a point vu de la vie,
Et ce qu’on ne verra jamais.
Fin