[Pierre-Yvon Barré, Pierre-Antoine-Augustin Piis, Jean-Baptiste Radet]
Constance
Parodie de Pénélope en un acte et en vaudevilles
Représentée pour la première fois par les Comédiens Italiens Ordinaires du Roi
Le vendredi 6 janvier 1786
Paris, Brunet, 1786
Acteurs
Malice, ancien corsaire absent depuis 12 ans : Monsieur Trial
Constance, sa femme : Madame Gonthier
Lisimaque, leur fille : Mademoiselle Carline
Alerte, père de Malice : Monsieur Rozière
Simone, servante de Constance : Mademoiselle Masson
La Tante de Constance : Madame Lacaille
Cousines et autres parents et parentes de Constance
Un poursuivant, ou amant de Constance : Monsieur Chenard
Plusieurs autres poursuivants ou amants de Constance
La scène est dans un petit village sur les côtes de Normandie.
L’orchestre joue pour l’ouverture les airs suivants : Il y a trente ans que mon cotillon traîne, \emph Nous nous marierons dimanche, \emph On ne peut aimer qu’une fois, \emph Allez-vous en gens de la noce.
Constance
Le théâtre représente d’un côté la maison de Constance, et de l’autre des arbres. Au fond, on voit des rochers et un coin de la mer.
Scène i
Constance, Simone, les poursuivants
Ces derniers sont à table, sous une treille, près de sa maison. Les uns boivent et les autres fument. Quelques uns jouent aux cartes. Constance et Simone n’entrent qu’après le premier couplet.
un poursuivant
Air : Que le sultan Saladin
Que le jaloux Ménélas
S’emporte et fasse fracas.
Que vers Troie à perdre haleine,
Il poursuive son Hélène
Que lui ravit un vaurien.
C’est bien, c’est bien,
Cela ne nous blesse en rien.
Moi, je pense comme Grégoire
J’aime mieux boire.
chœur
Moi, je pense comme Grégoire
J’aime mieux boire.
constance, sortant de chez elle avec Simone
Air : Attendez-moi sous l’orme
Tandis qu’ils sont à table,
Simone, éloignons-nous.
Et d’un air lamentable
Songeons à mon époux.
Seulement pour la forme,
Arrive qui pourra,
Attendons-le sous l’orme,
Peut-être il reviendra.
Elles vont s’asseoir sous un orme qui est sur le devant de la scène.
un poursuivant
Air : Que le Sultan Saladin
Que pour ce tour de Pâris,
Dont on eut ri dans Paris,
Maint et maint guerrier habile
Aille brûler une ville,
Pillant chaque citoyen.
C’est bien, c’est bien,
Cela ne nous blesse en rien.
Moi, je pense comme Grégoire
J’aime mieux boire.
chœur
Moi, je pense comme Grégoire
J’aime mieux boire.
Scène ii
Les mêmes, la tante et les cousines de Constance
la tante
Air : Ah, voilà la vie
Quel affreux tapage !
Loin de son mari,
Comme le ménage
Doit aller ainsi !
Avec les cousines.
Ah ! voilà la vie, la vie
Jolie.
Ah ! voilà la vie
Que l’on mène ici.
les poursuivants
oui ! voilà la vie, etc.
constance
Oh ciel ! ma tante et mes cousines !
la tante
Air : Trembleurs
Quoi ! nous verrions en silence
Tes amants pleins d’arrogance,
Que, du moins par bienséance,
Tu devrais renvoyer tous.
Mais, sans respect ni décence,
Leur faisant faire bombance,
Tu nourris leur espérance
Aux dépends de ton époux.
constance
C’est pour me débarrasser d’eux. Quand ils sont à table, ils ne me parlent pas de leur amour.
les poursuivants, ils sont tous un peu gris
Écoutez donc, Mesdames...
simone
Chut ! C’est la tante et les cousines de ma maîtresse. Allez-vous-en ! Vous reviendrez quand elles seront parties.
un poursuivant
Oui, oui, nous reviendrons. Sans adieu, dame Constance.
constance
Au revoir, Messieurs.
une cousine
Au revoir ! oh ! nous mettrons bon ordre à cela.
les poursuivants, chantent en se retirant
Moi, je pense comme Grégoire,
J’aime mieux boire.
Scène iii
Constance, Simone, la tante et les cousines de Constance
la tante
Enfin, depuis plus de douze ans que Monsieur Malice, ton mari, l’un des plus riches et des plus braves corsaires de la Normandie est parti sans qu’on sache ce qu’il est devenu, voilà pourtant la vie que tu mènes !
constance
Que peut-on me reprocher ?
la tante
Air : Nous nous marierons dimanche
Dans cette maison
Jamais de raison,
Une conduite incroyable,
Et chacun peut voir
Du matin au soir,
Qu’on chante et qu’on y tient table.
Ainsi, le bien qu’on peut avoir
S’épanche.
Sur la coutume et le devoir
On tranche,
Jeudi,
Mercredi,
Samedi,
Lundi,
Chez toi c’est toujours dimanche.
constance
Ne suis-je pas fidèle à la mémoire de mon mari, et malgré que tout semble me prouver qu’il soit mort ? Me voyez-vous épouser aucun de ceux qui se proposent pour le remplacer ?
la tante
Il vaudrait bien mieux en choisir un une fois que d’avoir sans cesse chez toi une douzaine de poursuivants qui scandalisent tout le pays.
constance
Il serait difficile d’en trouver un qui ressemblât au défunt. Bon marin, brave guerrier, et le plus habile praticien de la Normandie.
une cousine
Il avait donc bien du mérite ?
constance
Air : Pauvre monde
Oui, tout à fait,
Mon époux fut parfait
En vertu, courage et science.
Et mes galants,
Ma foi, ne sont pas gens
À m’en ôter la souvenance.
L’un n’a que sa valeur,
l’autre sa belle humeur,
Un son esprit, un autre sa prudence.
mais pour en avoir un portrait
Qui le retrace trait pour trait,
La douzaine
Suffirait à peine.
la tante
Air : De tous les capucins du monde
Oh ! j’entends fort bien ce langage,
Ma nièce prévoyante et sage,
N’ose prononcer, je le vois,
Et craignant un hymen précoce,
Madame hésite dans son choix
Pour faire tous les jours la noce.
une cousine
Eh ! tu crois que nous souffrirons ça, nous qui sommes tes cousines, et qui avons à peine chacune un mari !
une autre
Oh ! ça ne sera pas !
la tante
Air : Chantons Lœtamini
Ta famille s’irrite
De ces folles amours.
Ainsi de ta conduite
Il faut changer le cours.
une cousine
Prends-y garde, cousine.
la tante
Fais-y attention, ma nièce, je suis femme.
simone, à part
Et vieille.
la tante
J’ai de l’humeur.
simone, à part
Ça doit être.
la tante
Je vois tout ce qui se passe et je t’avertis que...
Avec les cousines.
Chantons Lœtamini
Ça ne durera pas toujours.ter
Scène iv
Constance, Simone
constance
J’en ai peur.
simone
Mais, Madame, en vous remariant vous feriez cesser tous leurs caquets.
constance
Air : Le démon malicieux et fin
Ce qu’on dit de mon époux, hélas !
Chaque jour confirme son trépas.
Je veux bien vivre comme une veuve,
Malgré cela, ma chère, heureusement,
Je n’ai pas une assez grande preuve
Pour oser faire un époux d’un amant.
simone
Air : Pour un maudit péché
Il est depuis douze ans
Parti de Normandie.
or, il n’a pas céans
Écrit pendant ce temps.
Ainsi sans répartie
Le proverbe vous sert,
Qui quitte la partie,
La perd.
constance
Je ne sais pas ce que j’ai, mais depuis ce matin...
Air : Vaudeville,
Je ne puis vaincre la tristesse
Qui me tourmente malgré moi.
mais, soit terreur ou soit faiblesse,
Tout redouble enfin mon effroi.
Ce fond d’humeur me dit, ma chère,
Que Malice a perdu le jour.
simone
À ses présages au contraire,
Moi, je croirais à son retour.
constance, effrayée
Air : Une abeille toujours chérie
Tiens, Simone, voilà son ombre,
Du tombeau je la vois qui sort.
simone
Bon, ce n’est que dans la nuit sombre
Que l’on voit revenir un mort.
constance
Oui, mais malgré la destinée,
L’ombre d’un mari, mon enfant,
Parait souvent dans la journée,
Et l’effroi n’en est que plus grand.
simone
À la bonne heure.
constance, regardant toujours
Oh ! c’est lui... le voilà bien. Oh ! qu’il est pâle !
simone
Comme un mort.
constance
Mais tu ne vois donc rien, toi ?
simone
Oh ! nous autres confidents, nous n’avons pas assez d’esprit pour voir de si belles choses.
constance
Si pourtant, Simone, mon époux allait revenir... Si ma fille Lisimaque, qui court le monde pour trouver son père, l’avait enfin rencontré...
Air : On ne peut aimer qu’une fois
Ramène-le dans ces moments.
Ô ma fille chérie !
Bientôt s’enfuiront les amants
Dont je suis poursuivie.
Ou si ton zèle et tous tes soins
N’ont pu trouver ton père,
Hélas ! viens partager, du moins,
Les peines de ta mère.
simone
Même air
Pourquoi désirer maintenant
De revoir votre fille ?
Vous êtes belle assurément
Mais elle est bien gentille.
Ou cessez des vœux imprudents,
Ou renoncez à plaire.
Car une fille de quinze ans
N’embellit pas sa mère.
constance
Tu as raison, qu’elle ne vienne donc pas.
simone
Voici vos poursuivants.
Scène v
Les mêmes, les poursuivants
un poursuivant
Eh bien ! finissons-nous, mon cœur ?
un autre poursuivant
À quand la noce ?
le premier poursuivant
Air : Savez-vous d’où vient qu’Ovide
D’un amant tendre et sincère
Couronnerez-vous l’ardeur ?
un autre poursuivant
Dites, faut-il que j’espère ?
un autre poursuivant
Serai-je votre vainqueur ?
tous les poursuivants
Faites le bonheur
De celui de nous, ma chère,
Qui mérite votre cœur.
le premier poursuivant, aux autres
Écoutez donc, mes amis, si vous m’en croyez, nous ne chanterons pas tous ensemble. Cela va mal, laissez-moi chanter seul, et vous approuverez seulement par un geste ou par un mot.
les autres poursuivants
Il a raison, laissons-le dire.
le premier poursuivant, reprenant la fin du couplet
Faites le bonheur
De celui de nous, ma chère,
Qui mérite votre cœur.
constance
En vérité, Messieurs, vous êtes bien pressants.
le premier poursuivant
Air : Un cordelier
Un bon marin, et surtout un corsaire,
Sait dans une affaire
Profiter du temps
Et brusquer les instants.
Avec ardeur, il attaque, il engage,
Saute à l’abordage,
Fait un coup de main
Ou revire soudain.
simone
Eh ! de grâce, Messieurs, oubliez un instant que vous êtes corsaires. Faut-il donc traiter les femmes en pirates ?
le premier poursuivant
Air : C’est la petite Thérèse
En vain le sexe nous fronde
Par des traits injurieux.
Ce que nous sommes sur l’onde,
La beauté l’est en tous lieux.
L’amour qui brûle notre âme
Nous fait éprouver à tous
Que de beaux yeux pleins de flamme
Sont plus corsaires que nous.
les autres poursuivants
C’est la vérité.
le premier poursuivant
Allons, mon cœur, nommez votre époux.
les autres
Choisissez.
constance
Air : Sans dépit, sans légèreté
Il m’est bien triste, il m’est affreux,
Comme chacun le peut connaître,
De ne faire ici qu’un heureux,
Sur tant d’amants dignes de l’être.
le premier poursuivant
Cela est fort honnête, mais comme vous n’en pouvez épouser qu’un, il faut choisir.
constance
Tenez, Messieurs, laissons cela pour aujourd’hui. Remettez-vous à table et ne parlons plus d’amour.
le premier poursuivant
Mais, l’un n’empêche pas l’autre.
Air : Aussitôt que la lumière
Ma maîtresse et ma bouteille,
Pour moi c’est plaisir nouveau.
Sans Bacchus, l’amour sommeille,
Et son feu s’éteint dans l’eau.
Mais lorsque ce dieu s’éveille,
Cherchant un éclat plus beau,
C’est dans le jus de la treille
Qu’il rallume son flambeau.
constance
Air : Pierre Bagnolet
Messieurs, différons, je vous prie,
Ce choix qui doit m’embarrasser.
le premier poursuivant
Non, finissons ma belle amie,
Sans délai il faut prononcer.
constance
Je ne veux plus qu’un jour, de grâce !
le premier poursuivant
Non, c’est quelque nouveau détour.
constance
Encore un jour !
le premier poursuivant
C’est un détour.
constance
Encore un jour !
le premier poursuivant
C’est un détour.
constance
Encore un jour...
le premier poursuivant
Non, non, chacun de nous se lasse.
Nommez l’objet de votre amour.
les autres poursuivants
Oui, nommez.
constance
Mais, Messieurs, pour vous nommer, il me faudrait au moins savoir vos noms, et je vous avoue que...
un des poursuivants
Oui, c’est juste, il faudrait dire nos noms.
le premier poursuivant
Ah diable ! C’est embarrassant !
À l’un des autres poursuivants.
Air : Croyez-vous à la magie
Sais-tu comment on te nomme ?
un des poursuivants
Qui, moi ? non.
les autres poursuivants, successivement
Ni moi.
constance, au premier poursuivant
Mais, êtes-vous gentilhomme ?
le premier poursuivant
Qui, moi ? non.
les autres poursuivants, successivement
Ni moi.
constance
Vous voyez donc bien, Messieurs...
Scène vi
Les même, Lisimaque en dragon
le premier poursuivant
Air : Quand un tendron vient dans ces lieux
Mais, quel est donc cet étranger ?
Son aspect m’importune.
Vient-il encor pour partager
Notre bonne fortune ?
les autres poursuivants
Oh, oh, oh, oh ! Ah, ah, ah, ah !
Nous sommes bien assez déjà
Pour ça.
lisimaque
Oh, oh, oh, oh ! Ah, ah, ah, ah !
Bientôt ici l’on tremblera
La, la.
constance, examinant Lisimaque
Que vois-je ? Est-ce possible ? C’est toi, mon enfant ! Ma chère Lisimaque ?
les poursuivants, étonnés
Qu’est-ce qu’elle dit donc ?
lisimaque
Air : Vaudeville,
D’une fille qui vous est chère,
Recevez les embrassements.
Voici la fin de vos tourments,
Nous allons tous revoir mon père,
Votre époux va sécher nos pleurs.
constance
Il n’est pas mort ! ah ! je me meurs.
simone
Ce que c’est que la joie !
les poursuivants
Comment ? il revient...
constance
Je vais donc embrasser mon époux ! hélas ! Tristement. tu en es bien sûre ?
lisimaque
Oh ! très sûre ! À part. Pourvu qu’elle ne me demande pas comment je l’ai appris.
constance
Mais, dis-moi donc, ma fille, pourquoi ce déguisement ?
lisimaque
Air : Guillot un jour trouva Lisette
Ah ! dans ce siècle de licence,
Pour peu qu’on ait quelques appas,
Sans exposer son innocence,
Hélas ! on ne peut faire un pas.
Or une fille qui voyage
Peut braver sous cet équipage
Les indiscrets, les fanfarons.
Elle n’a pas plus de courage,
mais rencontre plus de poltrons.bis
constance
C’est raisonner en personne sage et bien élevée.
un poursuivant, aux autres
Ah ça, mais dites donc, vous autres, si ce mari allait revenir ?
le premier poursuivant
Cela retarderait la noce.
simone, à Constance
Eh bien, Madame, et la vision de tantôt ?
lisimaque
Comment ! Quelle vision ?
simone
C’est Madame votre mère qui, tout à l’heure, croyant son mari défunt, s’amusait à voir revenir son esprit.
constance
Air : Il n’est pire eau que l’eau qui dort
Pourquoi blâmer la terreur de mon âme ?
Est-ce, dis-moi, d’aujourd’hui seulement,
Que l’on a vu s’effrayer une femme
De l’ombre d’un mari vivant ?
le premier poursuivant
Bah ! bah ! il n’est plus mort qu’il ne faut. Si cela n’était pas, nous l’aurions vu revenir avec sa fille.
constance
Ce retard ne prouve rien.
Air : Réveillez-vous, [belle endormie]
Ah ! lorsqu’ennuyé de son poste,
Un mari nous échappe, hélas !
Le perfide s’enfuit en poste.
S’il revient c’est au petit pas.
lisimaque
Vous ne tarderez pas à le revoir.
le premier poursuivant
Air : Vaudeville,
En venant annoncer son père,
Ce zèle peut être suspect.
lisimaque, portant la main à son sabre
Heim !
constance
Calme-toi, ma fille, à ta mère
Aucun n’a manqué de respect.
le premier poursuivant
Mon enfant, je crois vous entendre,
Vous n’auriez pas ce grand courroux,
Si bien loin de prendre un époux,
votre maman prenait un gendre.bis
lisimaque
Air : Vaudeville,
Ventrebleu !
le premier poursuivant
Quelle ardeur guerrière !
mes chers amis, retirons-nous.
À Lisimaque.
Ah ! quittez cette humeur altière
Et ces habits peu faits pour vous.
Vénus est plus forte sans armes.
Veut-elle nous soumettre tous,
Son pouvoir n’est que dans ses charmes,
Et nous tombons à ses genoux.
les poursuivants, en chœur
Son pouvoir n’est que dans ses charmes,
Et nous tombons à ses genoux.
Ils sortent.
constance
Ils sont toujours comme cela, on ne peut pas se fâcher avec eux.
lisimaque
J’aperçois, je crois, le bon homme Alerte, mon grand père.
Scène vii
Lisimaque, Constance, Simone, Alerte
alerte
Air : Carabi
Une voix qui m’est chère,
A passé jusqu’à moi.
Quoi !
C’est toi !
Embrasse ton grand-père.
Tu me vois, mon enfant,
Bien portant,
Toujours guilleret,
Leste du jarret,
Aimant le vin clairet.
Mais, dis-moi, m’apports-tu des nouvelles de mon cher fils ?
Sans revenir
Me réjouir,
Me laissera-t-il mourir ?
lisimaque
Non, rassurez-vous, mon bon papa, vous allez le revoir aujourd’hui même.
alerte
Aujourd’hui ! À Constance. Dit-elle vrai ?
constance, tristement
Hélas ! oui.
alerte
Air : Que Pantin serait content
Ah, que je serais content !
Si la nouvelle était sûre,
J’ordonnerais à l’instant
Un petit bal bien galant.
Mais nous quatre en attendant,
Nous pouvons tranquillement,
En faveur de l’aventure,
Danser en rond simplement.
Ah, que je serais content ! etc.
constance
Comment ! papa, danser ainsi nous-mêmes...
alerte
Eh, pourquoi pas ! Trouverais-tu plus gai d’aller nous asseoir dans un coin pour regarder danser les autres ?
Air : Le premier du mois de janvier
Dans ces cas-là, le spectateur
Se réjouit moins que l’acteur.
Ainsi, c’est une erreur extrême
De vouloir, pour chasser l’ennui,
S’amuser du plaisir d’autrui,
Quand on peut en prendre soi-même.
Venez, venez, je veux tous vous mettre en train. Une petite chanson !
Ils se prennent par la main.
Air : Ce n’est que pour Madelon
Allons gai, dansons en rond,
Bientôt nous allons voir paraître
Mon fils, ton père, et toi, ton époux, toi, ton maître.
Eh, allons donc,
Un rigaudon,
Un entrechat, un cotillon.
La joie est toujours de saison.
Ceci n’est point une chanson.bis
Quand un fils chéri nous embrasse,
Eut-on cent ans, fût-on de glace,
Ça rajeunit un barbon.bis
Tous chantent en dansant en rond.
Quand un fils chéri nous embrasse, etc.
alerte, à Constance
Même air
L’amour comme la raison,
À le bien recevoir t’engage,
Et son bonheur doit être ici ton ouvrage.
Sur le passé point de soupçon,
Ton air malin, ton œil fripon,
De sa tendresse tout répond.
Ceci n’est point une chanson.bis
Quand un mari, plein de sa flamme,
Après douze ans, revoit sa femme,
Quel plaisir dans la maison !bis
On reprend en faisant le rond.
Quand un mari, plein de sa flamme, etc.
lisimaque
Comme vous êtes encor leste, mon papa.
alerte
On ne me nomme pas Alerte pour rien... Mais, tenez, mes amis, retirons-nous, il pleut.
tous, ensemble
Oui, vraiment.
lisimaque
Si mon père est en route, il aura bien mauvais temps.
constance
Rentrons vite, car la pluie redouble.
Ils rentrent.
Scène viii
Malice seul
On le voit arriver de loin sur des rochers, tandis que l’orchestre joue quelques vaudevilles exprimant l’orage.
malice
Ah bon dieu ! quel temps ! mais je suis arrivé, et mon cœur est satisfait. Reposons-nous un instant avant que d’entrer chez moi.
Air : Pèlerins de Saint-Jacques
Mon cher pays, mon cher village,
Mes champs, mes bois,
Enfin, après un long voyage,
Je vous revois !
Tout est comme autrefois céans.
Plaisir extrême !
Mais ma femme, depuis douze ans
Sera-t-elle la même ?
Cela n’est pas possible. D’abord, elle doit être vieillie, et puis... Il chante.
Ô ma femme ! qu’avez-vous fait ?
Quand je le lui demanderais, elle ne me le dirait pas. Mais au moyen de ce déguisement, je vais observer tout ce qui se passe ici, sans être reconnu de personne... Oh ! oh ! voilà des gens qui semblent sortir de chez moi.
Scène ix
Malice, Lisimaque, Alerte
alerte
Air : Ne v’la t-il pas que j’aime
Le temps me semble bien remis.
Je m’en vais ici proche
Chercher, pour parler de mon fils,
Quelque arrivant du coche.
lisimaque
Air :
Je vais avec notre garçon...
alerte
Non, non, qu’il demeure tranquille.
Dois-je rester dans la maison,
Quand ici je puis être utile ?
malice, à part
Ce vieux-là pourrait bien être mon père, et l’autre apparemment mon fils... Mon fils ! mais autant que je puis m’en ressouvenir, c’est une fille que je dois avoir... Assurément... Et plus je l’examine...
lisimaque
Puisque vous voulez absolument sortir, mon papa, je vais aller avec vous.
malice
Air : Babet, que t’es gentille
C’est ma fille en effet.
Son teint, son doux langage,
Tout m’assure du fait.
Elle aura pris, je gage,
Se sentant un cœur
Fait pour la valeur,
Les habits de son père.
On connait un héros ailleurs,
Qui n’ayant que le don des pleurs,
Devrait prendre dans ses malheurs,
Les habits de sa mère.
lisimaque, qui, ainsi qu’Alerte, a examiné Malice pendant son couplet
Mais,, quel peut être ce vieillard ?
alerte
Il m’a l’air étranger.
malice, à part
Ils ne me reconnaissent pas.
Air : Dérangée
Que de pèrebis
Méconnus de leurs enfants,
Le sont aussi de leurs pères !
Que de pèrebis
alerte
Abordons-le.
Air : Allons au banquet,
Êtes-vous du canton ?
malice
Je ne dis pas non.
alerte
Ah ! j’en suis réjoui.
malice
Je ne dis pas oui.
lisimaque
Non, ni oui... comment...
alerte
Quel étonnement !
J’entends parfaitement.
Monsieur est Normand.
D’un grand âge
Ce visage
Porte l’empreinte et les traits.
malice
Je voyage,
Et l’orage
Me retenait... mais
Dans peu je m’en vais.
alerte
Non, reposez-vous
Un instant chez nous.
lisimaque
Voilà notre maison,
Venez sans façon.
malice
Vous êtes bien bons.
Avant tout, parlons
D’un marin de renom
Malice est son nom.
lisimaque
Vous serait-il connu ?
malice
À Paris, je l’ai vu,
Êtes-vous, Messieurs, de sa famille ?
alerte, montrant Lisimaque
C’est sa fille...
Oui, sa fille.
lisimaque, montrant Alerte
Vous voyez aussi
Son bon père ici.
malice
Il fut mon ami...
Ah ! j’en ai gémis,
car il est...
lisimaque et alerte, ensemble
Je frémis.
lisimaque
Mon père !
alerte
Mon fils.
Ce Normand fameux
Est mort ? Ah ! grands dieux !
Je n’ose en ce moment
Demander comment.
lisimaque
Air : Que ne suis-je La Fougère
Hélas ! j’ai perdu mon père !
alerte
Hélas ! j’ai perdu mon fils !
tous deux, ensemble
À quelle douleur amère,
Ô ciel ! sommes-nous réduits ?
malice, à part
Que ce moment a de charmes !
C’est un plaisir plein d’appas,
Que de voir couler les larmes
Qu’on donne à notre trépas.
ensemble, ensemble
deuxcol,
lisimaque, alerte, ensemble
Aux plus mortelles alarmes,
Vous qui nous livrez, hélas !
Soyez le témoin des larmes
Que nous cause son trépas.
malice
Que ce moment a de charmes !
C’est un plaisir plein d’appas,
Que de voir couler les larmes
Qu’on donne à notre trépas.
lisimaque
Air : Monsieur La Palisse est mort
Mon père a fini son sort,
Prêt à revoir sa patrie.
Hélas ! s’il n’étais pas mort...
malice
N’achève pas, ma fille, je vois que tu as de l’esprit, et que tu es digne de ton père.
lisimaque
Dieux ! mon père !
alerte
Mon fils !
malice
Mon père !
alerte
Mais cela ne se peut pas, vous êtes plus vieux que moi.
malice, ôtant sa barbe
Non, c’est une vieillesse postiche.
alerte
Toujours Malice.
malice
J’ai eu cela à Paris, ce sont des habits du magasin. J’avais là des connaissances qui m’ont donné de quoi me vieillir.
lisimaque
Mais, mon père, pourquoi donc nous avoir dit que vous étiez mort ?
malice
Il ne fau pas que cela vous étonne. Vous me verrez comme cela faire le mort de temps en temps. Mais donnez-moi vite des nouvelles du pays, de ma maison, comment tout va-t-il ici ?
alerte
À merveille, mon garçon.
Air : Dans les prisons de Nantes
La ferme est bien tenue.
malice
Ah ! ah !
Je ne parle point de cela.
alerte
Et quant à la charrue ?
Mon ami, tu verras...
malice
Vous ne m’entendez pas.
alerte
Mais tout ici prospère.
malice
Ah ! ah !
Je ne parle point de cela.
lisimaque
Surtout les bois, mon père.
alerte
Ah ! quand tu les verras...
malice
Vous ne m’entendez pas,
Je parle de ma femme.
lisimaque et alerte se regardant., ensemble
Ah ! ah !
Que lui dirons-nous de cela ?
malice
Trahit-elle ma flamme ?
Que plutôt son trépas...
alerte
Oh ! tu ne m’entends pas.
malice
Air : Maris, qui voulez fuir l’affront
Constance a-t-elle un amoureux ?
Suis-je loin de sa mémoire ?
alerte
Ah ! si elle n’en avait qu’un...
malice
Comment ! en aurait-elle deux ?
Ah ! je tremble pour ma gloire.
alerte
Ah ! si elle n’en avait que deux...
malice
Combien donc en a-t-elle ? hem !
Vous restez interdits...
Dix ?
alerte
Brr.
malice
Pourrais-je croire
Que chez elle il en vint
Vingt,
Trente
Ou quarante.
alerte
Air : La catacoua
Je ne sais pas bien, à vrai dire,
Le nombre de ces Messieurs-là.
malice
Ma femme ! Ah ! grands dieux, quel martyre !
alerte
Elle est sage malgré cela.
lisimaque
Ma mère les brave sans cesse,
Et ses amants
Font ses tourments.
alerte
Des poursuivants
Toujours buvants,
Très peu parlants,
Surtout jamais galants.
malice
Il ne faut pas grande sagesse
Pour rebuter de telles gens.
Mais je veux, avant de me faire connaître à elle, lui parler ici et pénétrer ses sentiments. Rentre à la maison, ma fille.
Air : À la façon de Barbari
Pour faire réussir au mieux
Mon petit stratagème,
Dis à ta mère qu’en ces lieux,
Un pèlerin qui l’aime.
veut lui donner en ce moment
Pour calmer sa peine, adoucir son tourment,
Des nouvelles de son mari,
Biribi,
À la façon de barbari
Mon ami.
Vous, mon père, allez-vous-en dans le village répandre le bruit de ma mort. Les poursuivants de ma femme ne manqueront pas de se rendre chez moi, et alors... Oui, l’idée est bonne. Écoute, ma fille.
Il lui parle à l’oreille.
lisimaque
Cela suffit.
malice
Je crois que je vais leur faire une belle peur. Surtout le plus profond silence sur mon retour.
Air : Tandis que tout sommeille
Dans l’ombre du mystère,
Cachons bien mon projet.
Gardez-moi le secret.
Amis, il faut nous taire.
Croyez qu’ainsi,
Ma femme ici,
Ne me sera point ravie.
Je veux voir tous mes survivants,
Et, par des pièges décevants,
Je poursuivrai les poursuivants
Dont elle est poursuivie.
ensemble, ensemble
deuxcol,
lisimaque, alerte, ensemble
Il va voir tous ses survivants,
Et, par des pièges décevants,
Il poursuivra les poursuivants
Dont elle est poursuivie.
malice
Je vais voir tous mes survivants,
Et, par des pièges décevants,
Je poursuivrai les poursuivants
Dont elle est poursuivie.
Scène x
Malice seul
malice
Allons, Malice.
Récitatif de l’opéra
\og Du grand art de dissimuler,
Voici l’instant de faire usage.
Commande à tes regards, compose ton visage,
Défends à tes pleurs de couler\fg.
Air : Dans un détour
Adroitement
Usons de mon déguisement,
Et dans ce moment
Un Normand
Ment.
Scène xi
Malice, Constance, Simone
constance
Air : L’avez-vous vu
Vous avez donc vu mon époux ?
Parlez-moi sans contrainte.
Venez, bonhomme, approchez-vous,
N’ayez aucune crainte.
J’ai toujours estimé les vieux,
Surtout pour causer avec eux.
malice, à part
Mais sa beauté
A résisté
Au chagrin de son âme,
Et je la trouve, en vérité,
Assez bien pour ma femme.
constance
Air : Il y a trente ans que mon cotillon traine
Depuis douze ans
Que mon cœur est en peine,
Depuis douze ans,
Tous les jours je l’attends.
Depuis douze ans
Mon espérance est vaine.
Depuis douze ans,
Que de tristes instants.
Depuis douze ans, etc.
malice
Et vous vivez comme une veuve désolée ?
constance
Comme une veuve ! vraiment, j’ai bien plus souffert qu’une veuve !
Air : Nous jouissons dans nos hameaux
Quoiqu’une femme ait de tourment
Par un cruel veuvage,
Celle dont l’époux est absent
Souffre bien davantage.
Elle est, tant qu’il ne revient pas,
À pleurer destinée.
Et le deuil d’une veuve, hélas !
Ne dure qu’une année.
N’oubliez rien, je vous prie, de tout ce que vous savez des aventures de mon mari.
malice
Vous n’ignorez pas sans doute qu’il fut attiré à Paris pour y soutenir un procès fameux qu’avait un de ses amis. Malice y acquit une grande réputation, car il fit durer cette affaire dix ans.
Air : L’autre jour, étant assis
Procureur intelligent,
Il sut embrouiller la chose.
Puis, avocat éloquent,
Il plaida, gagna sa cause.
constance
Croyez-vous m’étonner ?
Ah ! Malice possède,
Dans l’art de chicaner,
Un charme à qui tout cède.
malice
Air : Monsieur l’abbé, où allez-vous
Pendant ses éclatants succès,
Une femme ayant un procès,
Vint le prier de le faire...
constance
Eh bien !
malice
Réussir cette affaire,
Vous m’entendez bien.
constance
Il s’en chargea ?
malice
Non, Madame, quoiqu’elle s’y prit de toutes les manières pour l’y engager. Vous savez qu’il aime le bon vin ? Elle s’en aperçut, et lui en offrit d’excellent.
constance
Qu’il refusa ?
malice
Non.
Même air
Il but le vin qu’on lui versait,
Mais en buvant, il se disait :
Buvons avec prudence...
constance
Eh bien !
malice
À ta santé, Constance,
Vous m’entendez bien.
constance
C’est charmant, mais cette femme n’était peut-être pas aimable ?
malice
Non, au contraire, mais une autre... Ah ! Madame.
Air : Prenez au village une maîtresse
Peignez-vous une brune piquante,
Souris caressant,
Œil agaçant,
Corsage mignon, taille élégante,
Air intéressant,
Ensemble ravissant,
L’entretien brillant,
Le ton d’aisance,
L’esprit pétillant,
Sans médisance,
Vive et tendre
Pour se rendre,
Ayant l’art de se défendre,
De plus, tout l’éclat de la richesse :
Hôtel à Paris,
Meubles de prix,
Le char imposant d’une déesse.
Joignez à cela,
La loge à l’Opéra.
constance
Air : Du bas en haut
À l’Opéra,
Que je crains pour ma destinée !
malice
Au contraire, Madame.
Car l’Opéra,
À votre époux vous rappela.
Il y vit une infortunée,
Constante, quoique abandonnée...
constance
À l’Opéra !
malice
Il est vrai que ce rôle était joué...
Air : Tous les pas d’un discret amant
Que Pénélope nous touchait !
Hélas ! en répandant des larmes,
Que de larmes elle arrachait !
Et que sa voix avait de charmes !
Jamais on enchanta les sens
Par une plus douce harmonie.
Ah ! d’Apollon c’était les accents
Dans la bouche de Polymnie.
constance
Et c’est là ce qui l’a fait penser à moi ?
Scène xii
Les mêmes, Lisimaque, Alerte, les parents de Constance, les poursuivants
[ensemble], ensemble
Air : Not’ demoiselle a dit oui
deuxcol,
les parents de constance
Malice ne revient pas,
Tu n’es plus sa femme.bis
Malice ne revient pas,
Tu n’es plus sa femme.
Il leur cède le pas.
constance
Eh mais, je ne vous comprends pas.
les poursuivants
Malice ne revient pas,
Il n’a plus de femme.bis
Malice ne revient pas,
Il n’a plus de femme.
Il nous cède le pas.
malice
Eh mais, ne l’affligez donc pas.
les poursuivants
Croyez-nous, Madame.bis
deuxcol,
constance
Eh mais, je ne vous comprends pas.
les parents de constance
Tu n’es plus sa femme
Depuis son trépas.
malice
Eh mais, ne l’affligez donc pas.
les poursuivants
Il n’a plus de femme
Depuis son trépas.
constance
Oh, Ciel !
le premier poursuivant, montrant Malice
Air : Accompagné de plusieurs autres
C’est ce vieillard qui l’a connu,
Et tout exprès est revenu
Nous apprendre ce coup funeste.
constance, à Malice
Quoi ! Bonhomme, c’est vous... comment...
alerte
Malice est mort certainement
Montrant Malice.
Puisque c’est lui qui nous l’atteste.
constance, à Malice
Vous ne mentez pas...
malice
Madame...
constance
Pardonnez, mais j’ai été si souvent trompée... et puis vous êtes du pays, et vous avez un certain air de candeur et de sincérité qui m’empêche de vous croire, quelle preuve...
malice
Cet anneau d’or que votre époux m’a légué.
constance
Même air
C’en est donc fait, il a péri !
malice, à part
Ah ! comme elle aime son mari !
Haut.
Calmez ce désespoir, Madame.
constance
Ne craignez rien.
Quelque soit mon funeste sort,
J’aime encor mieux le savoir mort
Que vivant pour une autre femme.
lisimaque, à Malice
C’est ça, de la tendresse.
malice
Ah ! on n’en a pas d’idée.
constance
Ma fille, fais apporter ici tout ce qui me reste de ton père, que je pleure une bonne fois tout à mon aise, qu’ensuite on mette le feu à tout cela, et que je n’en entende plus parler.
malice, à part, à Lisimaque
N’oublie pas ce que tu fais.
le premier poursuivant
Air : J’ai perdu mon âme
D’après cette preuve,
Sûre autant que neuve,
À qui donnez-vous votre foi ?
constance
Messieurs, de grâce, laissez-moi
Le temps d’être veuve.bis
On apporte une partie des armes de Malice, entre autres un arc.
Que ces tristes objets me rappellent d’heureux moments ! Quand je songe que dans les premiers mois de mariage...
Air : Nous nous aimions dès l’enfance
De cet arc faisant usage,
Souvenir que je chéris !
Sur les garçons du village,
Mon époux gagna le prix.
Joignant la force à la grâce,
De tous il fut triomphant.
le premier poursuivant
Eh mais, Madame, à sa place,
Nous en eussions fait autant.
constance
Peut-être.
Les poursuivants essaient vainement tour à tour de tendre l’arc, tandis que l’orchestre joue le commencement du duo de Rose et Colas : Ah ! comme il y viendra. Pendant ce temps, on apporte le reste des armes de Malice, dont on forme une espèce de trophée.
malice
Je doute, Messieurs, que vous soyez capables de succéder dignement à Malice.
les poursuivants
Comment...
malice
Écoutez-moi. J’étais son ami, et il m’a chargé d’annoncer ici sa dernière volonté. Celui qui sera choisi pour épouser Constance doit être d’une bravoure et d’une intrépidité à toute épreuve.
les poursuivants
Eh bien, contre qui faut-il se mesurer ?
malice
Contre moi. Mais auparavant nous allons, en bons marins, fumer une pipe ensemble.
les poursuivants
Volontiers.
malice
Vous voyez ce baril, il est plein de poudre à canon.
les poursuivants
Que nous importe ?
malice
Air : Il était une fille
Si c’est un vrai principe
De courage et d’honneur,
Qui dans vous guide la valeur,
Pour allumer sa pipe,
Chacun ici viendra
Battre le briquet là.
les poursuivants, effrayés
Air : Dans l’ardeur qui m’emporte,
Mais, quelle extravagance !
malice
Eh quoi, Messieurs, vous tremblez, je pense !
Il bat le briquet sur le baril de poudre.
les poursuivants
Mais, quelle extravagance !
Cet homme est des plus fous :
Sauvons-nous,ter
Ils s’enfuient. Pendant le couplet précédent, Lisimaque est occupée à rassurer Constance et toute sa famille.
malice, aux poursuivants
Eh bien, Messieurs, écoutez donc.
alerte, aux poursuivants qui fuient
Allez-vous en gens de la noce
Allez-vous en gens de la noce
Allez-vous en chacun chez vous.
malice, les regardant aller
Ils sont déjà bien loin, et je crois qu’ils n’ont pas envie de revenir sur leurs pas.